mardi 6 novembre 2012

CHILI: L'INQUIÉTANTE ABSTENTION.


Ces élections étaient les premières à fonctionner selon le nouveau système d'inscription automatique avec vote volontaire alors qu'avant, l'inscription était volontaire mais le vote obligatoire une fois inscrit.

Tous les partis politiques et le gouvernement avaient appelé à une participation massive...

Le jour des élections, l'absence de files d'attente laissait présager une faible participation, ce qui a généré de nouveaux appels par radio et TV invitant à aller voter.

La déception fut grande le soir quand il est apparu qu'environ 60 % des inscrits s'étaient déplacés.

Une autre déception fut celle de la coalition des partis du gouvernement de droite qui a perdu des municipalités emblématiques comme celles de Santiago-Centre, Concepción (seconde ville du pays), Independencia, Recoleta et surtout Provindencia où Cristian Labbé, élu maire depuis 16 ans et figure du pinochettisme a perdu devant une candidate sortie des primaires de centre-gauche.

Tous les analystes ont d'abord relevé le faible taux de participation et, avec la classe politique en général, se sont inquiétés du manque d'engagement pour des élections qui concernent directement les citoyens puisque en relation directe avec leur vie de tous les jours.

Il fallait s'attendre à cette abstention quand on analyse le résultat des nombreuses enquêtes d'opinions des mois précédents où, par exemple à la question de savoir à quelle coalition s'identifie le citoyen, environ 20 % se considèrent proche de la concertation de centre-gauche dans l'opposition, environ 15 % pour l'alliance de droite au gouvernement et plus de 50 % ne se sentent proches d'aucune des deux.

De même, les citoyens rejettent à plus de 50 % la façon dont les élus (députés ou sénateurs) exercent leur devoir d'opposition ou de gouvernement.

Ce rejet des politiciens en général n'est pas non plus une surprise quand on sait que 20 ans de gouvernement de centre-gauche après le retour de la démocratie en 1990 n'ont pas fondamentalement changé le système mis en place par la dictature. L'éducation reste un commerce lucratif pour le privé, la santé de bonne qualité est toujours chère, la protection sociale faible.

A titre d'exemple, quand le Président Lagos a quitté le pouvoir en 2006, son succès le plus important, selon lui, avait été la mise en place d'un système d'assurance individuelle contre la perte d'emploi, alimenté par des cotisations du travailleur à raison de 0,6 % de ses revenus et 2,4 % de cotisations de l'employeur. Si le travailleur perd son emploi, il puise dans sa cagnotte jusqu'à épuisement des fonds et puis....c'est fini.

Quoi d'étonnant alors que le Chilien considère que voter pour l'un ou pour l'autre revienne au même et se désintéresse d'une politique qui ne lui propose pas d'alternative.

Dans une conversation avec un ex sénateur d'un parti de centre-gauche, celui-ci justifiait le manque de changements depuis 20 ans par un système électoral ne permettant pas de dégager des majorités nettes aux législatives. Lui qui a vécu au Vénézuela pendant la dictature faisait le parallèle avec ce pays où la participation à l'élection présidentielle d'octobre avait été de plus de 80 % alors que le vote n'est pas obligatoire. La preuve que, quand le citoyen a un choix bien défini à faire, la participation est importante.

Les partis d'opposition au Chili seraient bien inspirés de proposer, dans la foulée des manifestations étudiantes, une alternative de gauche véritable pour remobiliser le citoyen endormi.