dimanche 29 novembre 2015

« BIELSA EST TOUT, SAUF UN SALAUD »



Que représente le foot au Chili ?

MARCELO BIELSA 
C’est une activité essentielle. Ça fait partie des rares choses qui unissent les Chiliens. Dans un pays polarisé comme le Chili, seul le football peut rassembler comme ça.

La récente victoire en Copa América a servi de catalyseur social ?

Jusque-là, on n’avait jamais eu de bons résultats. J’étais au stade pour la finale et c’était fou. Je disais à mes enfants que je n’avais jamais rien connu de tel, pas plus que mon père ou mon grand-père. Mon fils, qui a 5 ans, a une chance énorme d’avoir déjà vu le Chili champion d’Amérique. Avant, c’était horrible, on visait, au mieux, le match nul. Contre le Brésil, l’objectif était toujours de prendre un point ou de perdre par le plus petit score possible. La sélection actuelle nous rend heureux, car elle a effacé des années de frustration.

Justement, tu as déclaré que la culture avait disparu pendant la dictature. Le football a lui aussi été touché ?

Je ne suis pas le seul à le dire, tout le monde pense la même chose. Une dictature détruit tout, elle abîme l’âme d’un pays, son énergie. Je ne sais pas exactement comment cela a affecté le football, mais personne ni rien ne passe à travers les gouttes, personne n’est tranquille. Le stade, par exemple, a servi de camp de concentration et de lieu de torture à la dictature. Carlos Caszely a été très important, il a eu le courage de s’opposer à Pinochet en prenant part à la campagne du NO ! (Le joueur avait notamment refusé de serrer la main du dictateur. Un affront public qui vaudra à sa mère un séjour dans les camps de concentration. Mère et fils militeront par la suite activement contre la dictature de Pinochet, ndlr)

Carlos Caszely, l'homme qui a dit non à Pinochet
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CARLOS CASZELY ET OLGA GARRIDO SA MÈRE  

Selon toi, la victoire du Chili en Copa América, c’est aussi celle de Bielsa ?

Quand il est arrivé, il a doté notre football d’une vraie personnalité. On a commencé à aller de l’avant, à faire peur, à faire mal aussi. Bielsa a une mentalité différente des Chiliens, une mentalité plus agressive. C’est un Argentin, un type qui n’a peur de rien, qui fait confiance aux joueurs et qui a donné une énergie inouïe à son équipe. Sampaoli, qui est un fan de Bielsa, a eu l’intelligence de poursuivre son travail. Mais pour moi, le déclic a eu lieu lors du dernier Mondial. On a perdu de manière absurde aux tirs au but contre le Brésil, mais je me souviens que les Brésiliens étaient morts de peur contre nous. Ils étaient très nerveux, on sentait qu’ils étaient angoissés. Qu’on arrive à les mettre dans un tel état m’a rendu vraiment très fier.

Tu peux nous dire pourquoi Bielsa a quitté Marseille ?

C’est un type super honnête. Il n’abandonne jamais une équipe sans raison. Bielsa fait les choses parce qu’il les sent, il est très pur. Je ne crois pas qu’il ait voulu porter préjudice à Marseille. C’est tout sauf un salaud. S’il est parti, c’est parce qu’il n’a pas pu travailler à sa manière.

Tu l’as déjà rencontré ?

J’ai discuté avec lui pendant 5 minutes lors d’une soirée et il m’a dit qu’il avait beaucoup apprécié mes films. Des amis réalisateurs chiliens avec qui il est proche m’ont dit que c’était un grand cinéphile. Apparemment, il s’intéresse beaucoup à la mise en scène.

Tu viens d’une famille aisée, est-ce que tu supportes l’Universidad Católica qui est considérée comme le club bourgeois de Santiago ?

Mon père était prof à la Católica, donc on allait toujours au stade. Mais j’ai arrêté d’être fan de la Católica. On a été finalistes du championnat, 8 fois. À chaque fois, j’étais au stade. Et à chaque fois, on a perdu. Pareil avec les deux Libertadores. C’est une équipe qui ne sait pas gagner. La supporter est une souffrance permanente parce qu’elle sait juste être deuxième. J’en ai eu marre d’être frustré, à tel point que j’ai mis deux maillots dans la chambre de mon fils. Un de la Universidad de Chile et un autre de Colo-Colo. Je lui ai dit de choisir entre ces deux-là en lui précisant qu’il n’avait pas le droit de supporter la Cato. J’ai trop souffert à cause d’elle. Tout le monde se moquait de moi à l’école. J’ai eu une enfance douloureuse, une enfance de second. Je n’ai pas envie de ça pour mon fils.

Le Chili a toujours nourri un complexe d’infériorité par rapport à l’Argentine. Les battre en finale de la Copa América a été un soulagement ?

Mais si la France était à coté de l’Argentine, elle aurait aussi eu un complexe d’infériorité ! Voir le Chili battre cet adversaire, en jouant dès le début en attaquant pour gagner, c’était fou. On les a battus tactiquement, dans l’envie. Messi n’a pas existé, on l’a arrêté. C’est très libérateur pour un pays entier, le fait de gagner. C’est un exutoire.

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Mis à part ça, c’est quoi tes autres grands souvenirs de foot ?

J’ai grandi avec la sélection de Sa-Za (Salas-Zamorano). C’était une équipe qui avait beaucoup de qualités, mais qui était extrêmement frustrante. Tout allait bien et tout d’un coup, sans raison, elle faisait n’importe quoi, elle disparaissait du match. On ne savait jamais ce qui allait se passer, car c’était une équipe qui ne savait pas se gérer. Les joueurs n’arrêtaient pas de gueuler, ils étaient tous excités, et souvent ça dégoupillait. C’était marrant à suivre.

Quel est ton joueur préféré aujourd’hui ?

Gary Medel. Il est petit, il représente le Chilien moyen, il vient d’une famille modeste, il réussit tout plus par l’effort que par le talent, et il est très proche de sa famille. C’est facile de s’identifier, car il représente des traits physiques et moraux très chiliens. Il est honnête, il se bat, il a une pureté intéressante. Et il n’est pas attaquant, il ne met pas de buts. Il fait le sale boulot pour l’équipe, mais les gens le voient comme un héros, car il est proche d’eux. C’est plus facile de s’identifier à lui qu’à Alexis Sánchez qui a un talent inné. Mais en réalité, je les aime tous : ils sont tous champions d’Amérique !

Michelle Bachelet a bien compris l’intérêt de la chose : Sa cote de popularité est remontée en flèche suite aux selfies avec les joueurs. Tu en penses quoi ?

Je n’ai aucun souci avec ça, moi aussi j’en ferais si j’étais à sa place ! Je vois cela comme le geste d’une fan, mais on le lui reproche, car c’est un femme. Si Piñera ou Lagos avaient fait la même chose, ça aurait posé un problème ? Bien sûr que non. Dans cette histoire, il y a clairement un problème de machisme.

samedi 28 novembre 2015

BIOGRAPHIE POLITIQUE DE ALEJANDRO MUTARELLO

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PHOTO DES ANNÉES 1950, PRISE DANS À L'OCCASION D'UNE CAMPAGNE ÉLECTORALE LOCALE. DON ALEJANDRO MUTARELLO SE TROUVE À LA SEPTIÈME POSITION DE GAUCHE À DROITE. 

IL est né à Antofagasta au Chili et y a passé son enfance. Dans les année quarante avec la grande crise mondiale il se voit obligé de partir chercher du travail à Calama mais  il trouve finalement à la mine de Chuquicamata. 

En 1941 il se fait embaucher  dans la mine de cuivre de Chuquicama, il avait 17 ans et a du tricher car il fallait avoir 18 ans. Un ami de sa sœur a réussi à lui changer la date dans ses documents. C’est cette même année qu’il a rejoint la jeunesse communiste et la « Confédération de Trabajadores de Chile » en découvrant la réalité  de la vie extrêmement difficile des mineurs.

Entre 1942-1943  il part faire son service militaire. Il était très apprécié par ses supérieurs qui voulaient absolument l’embaucher dans l’armée et avaient prévu un futur de grand officier pour lui. Ces derniers ont été  énormément déçus lorsqu’ils ont découvert son projet de vie militante. 

Fin 1943 début 1944 il retourna à Chuquicamata, où comme punition pour être syndicaliste a été envoyé dans la fonderie de la mine pendant 3 mois.

1944 il entreprit plusieurs voyages entre Santiago et Valparaiso pour finir par s’installer dans cette dernière ville où il occupe divers emplois et où il va militer au sein du parti communiste et continuer son engagement syndicaliste. 

1948 a travaillé pour la campagne de Gabriel Gonzalez Videla, après la Victoire de ce candidat, son premier décret a été de mette le parti communiste hors la Loi.

Alexandre fut arrêté avec son groupe en résistance en septembre 1948 et fit un an prison à Valparaiso. Il a été accusé d’être le chef du groupe et à ce titre prit une condamnation a perpétuité.  Il fut libéré fin 1949 par un acte de grâce d’un nouveau gouvernement et a continué à militer clandestinement au sein du Parti communiste comme responsable de l'organisation de la vie du parti et de la propagande.

Vers les années 50 le parti communiste a retrouvé sa légalité. La vie politique a repris son cours normal et jusque dans les années soixante dix Alexandre a été responsable de l'organisation de la 4ème section au Parti communiste toujours à Valparaiso. 

Pendant les trois campagnes électorales de Salvador Allende il était responsable de campagne sur le secteur de Valparaiso. 

En 1970 en dehors de son activité d’organisation au sein de son parti, il participait à la rédaction du «El popular» petit journal local, organe du parti communiste. 

Durant toutes ces années il exerçait également une activité professionnelle d’entrepreneur dans le bâtiment (il travaillait a son compte avec une équipe d’ouvriers). 

1973 pour le coup d'Etat de la junte composée par les quatre généraux chiliens dont Pinochet,  il est entré de nouveau dans la clandestinité mais a continué à militer pour le Parti communiste. 

1975  persécuté et en grand danger il doit prendre la décision de partir en Argentine où il se regroupe avec  d’autres militants chiliens et continue  à militer au parti  pendant 2 ans. 

1976 Survient le coup d’Etat en Argentine, les partis de gauche sont dissous.  L’insécurité et la rupture des équilibres sociaux sont devenues monnaie courante et les « étrangers » qui étaient en fait les ressortissants chiliens indésirables. 

A partir de ce moment il était très surveillé et ne pouvait pas travailler,  il ne pouvait pas non plus avoir d’autre logement que certains hôtels désignés. 
Des rafles étaient organisées régulièrement dans ces hôtels, les militaires cassaient les sols et les toits afin de trouver des arsenaux avec les armes. Ils ne trouvaient jamais rien mais revenaient continuellement. 

L’opération condor de la CIA a été mise en place et ses agents exécutaient leurs ordres : ils devaient faire en sorte de disparaître des personnes, enlever des adultes et des enfants, entre autres.  Pendant cette période beaucoup de militants et de sympathisants ont disparu. 

Néanmoins Alexandre a continué à résister et organisait des rencontres pour informer les gens de la situation qui se vivait au quotidien. Le prétexte de ces rencontres était les anniversaires des enfants. Il continuait également a écrire et faisait parvenir ses écrits au siège local de l’Acnur (Agence des Nations Unies pour les réfugiés) afin de les faire circuler. 

1978 a été expulsé d'Argentine vers la France avec sa femme et enfants où il arrive en novembre 1978 à Fontenay Sous Bois à la Mission de France, de nos jours Maison des citoyens Jacques Damiani. 

A nouveau il a retrouvé des amis chiliens par l’intermédiaire de celui qui allait devenir un grand ami et camarade Jacques Damiani, et a continué son engagement militant  durant de longues années jusqu’à ce que sa santé ne le lui permette plus. 

Il a participé également à des congres de syndicalistes à Buenos Aires, Damas, et à Vienne.

MOTS POUR MON PÈRE

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 ALEJANDRO MUTARELLO LORS DE SON 90ÈME ANNIVERSAIRE 

Nous voici à nouveau réunis pour rendre hommage à l’un de nos amis, mari et père.  Ceci exige de nous un très grand effort car en dehors de trois autres amis partis récemment, ces derniers jours nous en avons également perdu d’autres au cours des terribles événements que tout le monde connaît.

par Gilda Mutarello

Alexandre, tu étais un homme de conviction, dès l’âge de 17 ans tu as compris la misère humaine et l’injustice et tu as voulu la combattre.  Tu as eu une vie ni simple ni tranquille, mais remplie de beaucoup d’expériences et de rencontres entre trois continents.
Une vie marquée par l'humanisme, le partage de ton amour et de ton amitié, le dévouement, mais aussi par le goût d’un risque pour sauver tes compagnons, ainsi que l'écoute des autres.  Tu a franchi beaucoup d’obstacles et triomphé des difficultés et pour y parvenir, tu n’as pas ménagé tes efforts jusqu’au bout.

Ton activité de militant et associatif témoigne de ton esprit collectif et de ton dévouement pour les autres.
Tu étais aussi mari, père, grand père, arrière grand père, artiste peintre amateur, musicien amateur, écrivain, voyageur.

Parfois tu pouvais sembler distant voir froid mais c’était ton côté réservé, tu étais moqueur, moraliste, avais un humour qui pouvait être confondu pour de l’ironie ou du sarcasme et très gourmand de gâteux et de chocolat. Cependant tu étais aussi un homme intègre, droit et rigoureux. 

On me dit que j’ai hérité de toi de nombreux traits de caractère, que tu as du hériter de ton père qui s’était engagé comme pompier et a été un des fondateurs de la caserne de pompiers Croates dans la ville de Calama.  Les pompiers au Chili sont des bénévoles qui exercent leur labeur de sauvetage en dehors de leur activité professionnelle.

Ton engagement contre les injustices, la cruauté, la xénophobie, je l’ai très tôt compris et fait mien, les valeurs que tu m’a inculquées avec Maman sont profondément ancrées en moi et ont crée un savant mélange de carburant dans ma vie.

Je voudrais te dire, ces quelques mots qui seront sans doute trop faibles, combien je suis fière d'être ta fille.  Tu m'as accompagné avec Maman dans mes doutes, mes échecs et mes réussites.

Malgré la grande tristesse que nous inflige ton départ, nous sommes soulagées que tu ne souffres plus, durant ces dernières années tu t’es beaucoup battu contre la maladie, et les derniers mois ont été assez durs pour toi et aussi pour nous.  Aujourd’hui nous te savons en paix.

Tu as été rejoindre le club de copains équilibrant ainsi les choses : quatre révolutionnaires, dont deux fêtards René et Leonel et deux têtes brûlés Jacques et toi.  Quatre hommes qui ont connu les sombres conséquences de la bêtise et la cruauté humaine mais qui ont résisté et nous laissent un héritage et un exemple à suivre.

Mais il vaut mieux se souvenir de quelques anecdotes qui illustrent mieux qui tu étais, par exemple celles ou :

- Grand blagueur, lorsqu’on était a table et qu’un ami arrivai, tu disais : « oh la la, qu’on range le pain, qu’on ramène la casserole », tu le disais d’une façon tellement sérieuse que plusieurs d’entre eux se sont fait avoir et ne savaient pas quoi dire ni faire. 

- Lorsque quelqu’un partageait notre table, tu n'étais pas tranquille tant que cet invité ou les invités n’aient pas mangé tout ce qui avait été préparé jusqu’au chocolat que tu gardais pour le café ou le thé.

- Lorsque j’étais plus jeune tu partais avec moi à Paris sous prétexte d’une promenade avec ta fille, mais c’était aussi pour manger des gâteux, jusqu’à ce que j’ai en eu marre, car ils me rendaient malade et que je te dise que je ne voulais plus en manger. Promenade oui mais plus de gâteaux.

Puis combien de soirées ou de moment où l’on pouffait de rire tous les deux ou avec mes frères de tes pitreries et moqueries.   Combien d’amis ont pâti de celles-ci avant de bien sûr, les partager.  

Des moments où l’on n’était pas d’accord tout les deux, et dont chacun campait sur ces positions mais trouvant finalement out un compromis.  Des soirées à refaire le monde, a partager des moments où l’on se fâchait ensemble d’horreurs qui survenaient aux quatre coins du monde.

Bien sur il y a tellement d’autres, mais je m’arrête là pour aujourd’hui.

Toi qui avait une grande aversion pour la couleur noire, on te rassure, Maman a tenu sa promesse de s’habiller aujourd’hui avec d’autres teintes et moi qui suis régulièrement habillée  de cette  couleur, ai fait en sorte de te faire plaisir.

Je tiens à remercier mes amis Bamiléké avec lesquels je partage depuis quelques années mon travail de doctorat, mais aussi une belle amitié. Ils n’ont pas connu mon père, mais ils s’enquerraient régulièrement de son état. Leurs massages de condoléances nous ont beaucoup touché maman et moi. 

Nous avons une très grande pensée pour tous ceux qui ont perdu la vie et ceux qui ont été blessés ces derniers jours ainsi que pour leurs familles.  Nos amies Patricia et Elsa étaient au Bataclan et laissent leurs familles dans un profond désarroi et grande tristesse, nous partageons leur douleur.
Nous tenons à remercier l’équipe de St François de l’avoir accompagné jusqu’à la  fin de sa vie et qui était là dans les moments difficiles, ainsi que les membres de familles d’autres pensionnaires. De même que son médecin, le Dr. Gauthier qui en dehors de ses compétences professionnelles lui a consacré du temps et avait une attention toute particulière pour lui.

Nous désirons exprimer notre plus grande reconnaissance à tous les amis de Fontenay qui nous ont accompagné au long de toutes ces années et avec lesquels on a partagé beaucoup, beaucoup de choses tristes et heureuses, des expériences fortes et une belle amitié. 

Enfin nous tenons à  vous remercier vous tous pour votre présence, votre affection, votre soutien, et de votre grande amitié. Soyez de tout cœur remerciés.


LE FOOTBALL CHILIEN DANS LA TOURMENTE

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LA PANENKA D'ALEXIS SÁNCHEZ. PHOTO REUTERS 
Alors que le Chili doit disputer un match en Uruguay, le voyage du président prend une tournure de film hollywoodien. Il serait sorti en premier de l’avion, escorté par des membres du FBI. Raúl Guzmán, journaliste chilien, s’épanche : «  Il a été traité de manière différente. Même les artistes et les diplomates ne sont pas reçus ainsi (avec autant de sécurité, ndlr). Aucun policier ne voulait parler.  » Après la gifle contre les coéquipiers de Cavani, la nouvelle tombe : Sergio Jadue a présenté sa démission, qui sera acceptée par les instances de la Fédération. Au Chili, une page se tourne. Et maintenant ?

Coalition contre Jadue

Les premiers détails de l’affaire filtrent. Jadue est interrogé aux USA dans le cadre du scandale de la FIFA. Comme Luis Bedoya, son homologue colombien qui a récemment quitté son poste, il est sous le coup d’une enquête pour avoir reçu des pots-de-vin liés au FIFAgate et à la CONMEBOL. Selon la justice américaine, de nombreux présidents de fédérations sud-américaines ont reçu 1,5 million de dollars de l’entreprise Datisa pour les droits de la Copa América 2015. Sa lettre de démission est rapidement publiée par les médias locaux. Une missive conclue par un sobre «  Mission accomplie  » , cher à Pinochet.

 LETTRE DE DÉMISSION SERGIO JADUE
Si sa démission marque la fin d’une ère, elle n’est que la partie émergée de l’iceberg. Le football chilien est en pleine crise. De nombreux clubs avaient affichés leur mécontentement : un groupe de clubs nommé sobrement G-13 (dont les gros, Universidad de Chile, Colo-Colo et Universidad Católica ne font pas partie) au fort pouvoir au sein de la Fédération a décidé qu’aucun dirigeant lié au scandale de la FIFA ne devait occuper un poste dans l’instance chilienne. «  Il faut faire un nettoyage géant  » , affirmait un membre du groupe. Alors qu’il niait en bloc, les médias chiliens affirment que Jadue s’est déclaré coupable devant la justice américaine, afin d’éviter une lourde peine. Il devrait donc collaborer pour l’enquête. Le journal El Mercurio précise : «  Il a reconnu sa culpabilité face aux charges retenues contre lui par la justice américaine et a accepté de coopérer à l'enquête en échange d'une peine réduite. Il restera à New York tout le temps de la procédure judiciaire et y effectuera sa peine, que les experts estiment entre trois et cinq ans de liberté surveillée.» 


Le Chili dans l’inconnu

Une page importante du football chilien se tourne. Celle d’un dirigeant décrié pour ses rapports tendus avec Marcelo Bielsa. Celle d’un homme qui a su revitaliser le football chilien, en modernisant les stades, en accueillant la Copa América, et en offrant à Jorge Sampaoli la possibilité d’entraîner une sélection vierge de titre pour la mener sur le toit de l’Amérique. D’ailleurs, l’avenir de l’entraîneur argentin s’écrit en pointillés. Convoité par certains clubs européens, il clame son envie de rester au Chili, et son rêve d’entraîner un jour River Plate, club qu’il supporte. Actuellement blessé, Charles Aránguiz a durement critiqué les instances du pays, dans les colonnes de Las Últimas Noticias : «  Le football chilien est plus que mort. Je souhaite que les gens reviennent au stade, que les tickets soient moins chers, que l’ambiance revienne. Je ne comprends pas pourquoi, au Chili, les supporters ne peuvent plus entrer avec des banderoles et des instruments.  » L’avenir du football chilien est donc flou. En attendant, Marcelo Salas, légende locale, s’est déclaré candidat à la présidence. Et les médias chiliens continuent d’enfoncer l’ancien président. Selon Chilevisión Noticias, il aurait payé une maison d’environ 635 390 euros en cash. Une enquête pour blanchiment d’argent aurait aussi était évoquée. Pire, il aurait fait pression pour qu’Harold Mayne-Nicholls, son prédécesseur au poste, soit suspendu par la FIFA. Pas mal de casseroles donc, pour Sergio Jadue. Et cette fois-ci, ce n’est pas une panenka d’Alexis Sánchez qui le sauvera.

PAR RUBEN CURIEL

AU CHILI, DES BACTÉRIES FONT LE TRAVAIL DES MINEURS DE CUIVRE

PHOTO BIOSIGMA

L'entreprise Biosigma, créée en 2002 par la société d'Etat Codelco - principale productrice de cuivre dans le monde - et le groupe japonais JX Nippon Mining and Metals, a réussi au terme d'un long processus à mettre au point ce procédé dont l'exploitation commerciale a débuté il y a six mois dans une mine du nord du pays. 

"C'est la fin du gigantisme dans l'industrie minière, la biotechnologie pourrait être l'avenir, et avec le biolessivage nous sommes en train de parler de l'optimisation d'un processus naturel, avec un impact environnemental moindre et une efficacité accrue", s'enthousiasme auprès de l'AFP Pilar Parada, responsable de Biosigma. 

En plus d'une décennie de recherche, 70 brevets ont été déposés au niveau mondial, et 120 autres sont en cours de validation. 

Un travail unique qui a permis d'identifier "une +dream team+ de bactéries qui préservent le minerai, séparant le fer et le sulfure de cuivre": ces bactéries, versées comme solution liquide sur la roche, permettent d'extraire le cuivre qui est ensuite rassemblé sous forme de planche de métal exportable en l'état, explique encore Mme Parada. 

"En quelques mois nous accélérons un procédé naturel, qui dans la nature prend des années, et nous démontrons que cette technologie est de 30% à 50% plus efficace que les technologies conventionnelles", ajoute-elle.  

Ce procédé n'est cependant viable que lorsque la concentration de métal dans la roche est faible (entre 0,45% et 2%). 

Rien que pour Codelco - 1,8 million de tonnes en 2014, 11% de la production mondiale de cuivre -, "il existe plus de 1,7 milliard de tonnes de roches à faible concentration disponible, ce qui potentiellement pourrait représenter deux millions de tonnes de cuivre supplémentaires", explique Mme Parada. 
- 'Mieux protéger l'environnement' - 

Le biolessivage utilise six fois moins d'eau et trois fois moins d'énergie que les technologies traditionnelles. 

Dans les prochaines années, cette technologie pourrait permettre de produire entre 50.000 et 60.000 tonnes supplémentaires de cuivre fin. 

Plus prudent, Jaime Rivera, responsable du commerce et de l'innovation chez Codelco, affirme que si le procédé a montré son efficacité, "il n'a pas encore provoqué un chamboulement pouvant concurrencer les technologies plus +massives+". 

Mais "en continuant d'améliorer cette nouvelle technologie, on pourra à l'avenir exploiter plus de minerai à faible concentration" et affronter les importants défis de l'activité minière, comme son aspect durable, notamment dans le traitement et la préservation de l'eau, précise-t-il à l'AFP. 

Car, tandis que les normes environnementales sont toujours plus strictes, le secteur minier doit parallèlement travailler avec des roches à plus faible concentration et contenant plus d'impuretés. 

Avec le biolessivage "et en temps de crise, nous avons un avantage car l'investissement et les coûts (de ce projet) ont eu lieu à une époque de prix élevés du cuivre", assure M. Rivera. 

"Maintenant nous avons la technologie et son application, donc le faible prix du cuivre ne nous crée pas de problème" pour poursuivre le projet, ajoute-t-il. 

Cette chute des cours a poussé Codelco à lancer ces derniers mois un plan d'économies de 48 millions de dollars par an, prévoyant une augmentation de 18% de la productivité dans les quatre prochaines années. 

LA JUSTICE MILITAIRE DU CHILI VIOLE LE SECRET DES SOURCES DANS UNE AFFAIRE DE DÉTOURNEMENTS DE FONDS PUBLICS

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MAURICIO EST LE FILS  AÎNÉ DE JOSÉ WEIBEL,
DÉTENU DISPARU EN 1976 AU CHILI
Le journaliste et auteur du reportage, Mauricio Weibel Barahona, le propriétaire et représentant légal de The Clinic, Pablo Dittborn, le directeur de la publication, Patricio Fernández et l’éditrice du journal Andrea Moletto ont été convoqués par le juge militaire Rodrigo Acevedo en charge d’enquêter sur ces fuites.

Au Chili, depuis 2011, la justice militaire n’est pourtant pas habilitée à enquêter sur des cas impliquant des civils, et ne doit en théorie traiter que de dossiers directement liés à l’armée. Selon la version officielle, ces quatre protagonistes étaient donc simplement entendus comme témoins, mais en réalité ils ont été incités à dévoiler leurs sources. Ce secret des sources est pourtant garanti par la loi sur la presse chilienne (Ley de Prensa) et par les résolutions sur le sujet de la Cour inter-américaine des droits de l’homme (CIDH), que l’Etat chilien a obligation de respecter.

“Cette violation du secret des sources et cette tentative d’intimidation de la part de la justice militaire chilienne est intolérable, il s’agit d’une grave atteinte à la liberté de la presse et à la démocratie au Chili, déclare Emmanuel Colombié, chef du bureau Amérique latine de Reporters sans frontières. Nous appelons les autorités chiliennes à respecter la loi sur la presse et leurs engagements internationaux.”

L’affaire dite du Milicogate a été rendue publique dans le cadre d’une série de reportages réalisés par Mauricio Weibel et publiés dans The Clinic en aout 2015.

Ces reportages ont révélé l’existence d’une grande opération de détournement de fonds publics, opérée par des officiels et des membres de l’armée chilienne, entre 2010 et 2014. Le montant de la fraude atteindrait plusieurs millions de dollars et l’argent détourné aurait servi à financer des voyages, des fêtes, l’achat de chevaux ou encore des virées dans des casinos.

Jusqu’ici, le gouvernement chilien est resté très discret et ne s’est pas prononcé publiquement sur ce scandale de corruption ni sur les méthodes utilisées par la justice militaire pour tenter d’étouffer l’affaire. Un silence préoccupant d’autant que c’est la première fois dans le pays que la justice militaire procède à ce genre d’interrogatoire de journalistes depuis la fin de la dictature.

En 2012 et 2013, Mauricio Weibel avait déjà été placé sous protection policière après avoir dévoilé dans un livre des archives secrètes sur la dictature militaire au Chili (1973-1990). Il avait à l’époque reçu de nombreuses menaces, sa maison avait été cambriolée et son matériel professionnel dérobé..

CHILI: ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR GRATUIT POUR LES ÉLÈVES LES PLUS PAUVRES


Un système éducatif ultralibéral hérité de la dictature Pinochet

PHOTO NICOLAS SAUVAIN 
En 1981, le dictateur Augusto Pinochet qui dirigeait alors le pays, a complètement dérégulé le système éducatif chilien. Depuis, l’université est payante y compris les universités publiques. Le Chili est le pays du monde où l’université coûte le plus cher en comparaison du niveau de vie de la population, et c’est aussi le pays où les familles payent le plus pour l’éducation.

La gratuité pour 100% de étudiants d'ici 2020

Ce sera la première fois depuis plus de trente ans que des étudiants ne paieront pas un seul peso pour l’université. Ce n’est qu’une clause dans un budget pour le moment. Le but du gouvernement de la présidente socialiste Michelle Bachelet est de créer l’année prochaine une loi qui régule la gratuité dans l’éducation supérieure. Il souhaitait donner la gratuité à 70 % des étudiants d’ici à la fin du mandat de la présidente, c’est-à-dire dans deux ans. Et à 100 % d’ici à 2020. Ce ne sera sûrement pas possible du fait du ralentissement de la croissance du pays en raison de la baisse du cours mondial du cuivre. Cela signifie moins de rentrées dans les caisses de l’Etat et moins de financements publics pour de grosses réformes. 

Une éducation gratuite, publique et de qualité

PHOTO NICOLAS SAUVAIN 
L’aspect positif également de cette mesure, c’est qu’elle est soumise à conditions. Tous les étudiants les plus pauvres n’y accéderont que s’ils étudient dans les universités et les instituts professionnels qui ne font pas de profit et qui sont accrédités par l’Etat, c’est-à-dire qui démontrent un certain niveau de qualité. C’est la première fois depuis Pinochet qu’un gouvernement soumet un financement public dans l’éducation à une telle condition. Ça veut dire que l’Etat ne subventionnera pas les établissements qui font du profit au détriment des familles chiliennes. Cela pourrait paraître logique à beaucoup, mais au Chili, c’est nouveau et c’est un signe fort !

jeudi 26 novembre 2015

INDE PAS DE REMISE EN LIBERTÉ POUR LA NANTAISE RÉCLAMÉE PAR LE CHILI

La justice du Chili, qui demande l'extradition de Marie-Emmanuelle Verhoeven, la soupçonne d'avoir participé à l'assassinat du sénateur de droite Jaime Guzmán Errazuriz en avril 1991 par un groupe d'extrême gauche, le Frente Patriotico Manuel Rodriguez (FPMR).

Les avocats de la Française demandent sa libération immédiate, en attendant la décision finale, et proposent pour cela de remettre son passeport à la justice et ont soumis une lettre de l'Ambassade de France garantissant sa coopération avec la justice indienne.

 LE JUGE TIRATH SINGH THAKUR
PHOTO COUR SUPRÊME DE L'INDE
Mais la Cour suprême a refusé d'accéder à cette demande de libération provisoire. L'affaire a été ajournée au 8 décembre.

"Cette femme française est accusée d'activité terroriste, de meurtre et de participation à un groupe subversif ayant tué un sénateur", a dit le juge T S Thakur.

"Que peut faire le gouvernement français si elle fuit en dépit de sa garantie. Nous ne permettrons pas d'arrangement provisoire", a-t-il ajouté. 

La justice du Chili, qui demande l'extradition de Marie-Emmanuelle Verhoeven, la soupçonne d'avoir participé à l'assassinat du sénateur de droite Jaime Guzman Errazuriz en avril 1991 par un groupe d'extrême gauche, le Frente Patriotico Manuel Rodriguez (FPMR).

Ce sénateur, également professeur de droit, avait été abattu alors qu'il sortait de l'Université catholique du Chili. Il était considéré comme le principal inspirateur de la dictature d'Augusto Pinochet (1973-1990). 

La justice indienne doit se prononcer sur la validité de la demande d'extradition du Chili. Elle doit dire si le traité d'extradition existant, mais qui date de 1897 alors que l'Inde était toujours une colonie britannique, est toujours valable. 

La Française avait déjà été arrêtée en janvier 2014 à l'aéroport de Hambourg, en Allemagne, à la demande de la justice chilienne. Marie-Emmanuelle Verhoeven avait ensuite été libérée en juin dernier. 

AFP

mercredi 25 novembre 2015

CHILI: PINOCHET AURAIT EU 100 ANS, SES PARTISANS S'EN SOUVIENNENT

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LE VEUVAGE, UNE BONNE OCCASION DE TRINQUER. PHOTO AGENCIA UNO
La cérémonie est organisée par la Fondation du Président Pinochet et le parti politique "Pour ma patrie" (Por mi patria), dont le dirigeant n'est autre que le petit-fils de l'ancien dictateur, Augusto Pinochet Molina, qui espère toujours lancer un mouvement d'hommage à son grand-père. 

CÉRÉMONIE POLITICO-RELIGIEUSE AU
PIED D'UNE STÈLE COMMÉMORATIVE 
Mais aucune figure publique n'ose désormais défendre Augusto Pinochet et, hormis la cérémonie, aucune célébration populaire n'est prévue dans le pays. 

"Nous y allons parce que nous sommes reconnaissants. Le général Pinochet a sauvé ce pays", affirme à l'AFP l'un des participants, qui souhaite garder l'anonymat par peur des représailles.  


LA PLACE DE CHACUN AVAIT ÉTÉ DÉFINIE TRÈS STRICTEMENT.  AU DEUXIÈME RANG SE TIENT L'ANCIEN GARDE DU CORPS DU DICTATEUR, CRISTIAN LABBÉ GALILEA, COLONEL DE L’ARMÉE À LA RETRAITE, ANCIEN AGENT DE LA DINA ET INSTRUCTEUR DE TORTIONNAIRES, ANCIEN MAIRE DE LA COMMUNE DE PROVIDENCIA, À SANTIAGO.
Ceux qui se rendront à cette commémoration font partie de ce que l'on appelle le "noyau dur", un petit groupe de nostalgiques d'une oeuvre politique qu'ils estiment insuffisamment reconnue et jugeant "ingrate" la droite chilienne actuelle. 

Vingt-cinq ans après la fin du régime, on revendique rarement son attachement à l'ex-dictateur. 

LA MESSE DES PINOCHETISTES FUT CÉLÉBRÉE SOUS CHAPITEAU
"Ce qui se passe c'est qu'aujourd'hui il est politiquement incorrect d'être en faveur de Pinochet", en raison des violations des droits de l'homme qui ont eu lieu durant sa dictature, avec 3.200 victimes, mortes ou disparues, explique Marta Lagos, directrice de l'institut de sondage Mori. 

Et pourtant, une grande partie de la société continue de valoriser son héritage politique et surtout économique : une économie très libéralisée, qui a laissé la santé, l'éducation et les retraites aux mains du secteur privé. 

"Les partisans les plus convaincus qui célèbreront la naissance de l'ancien dictateur sont peu nombreux, mais ceux qui défendent le gouvernement de Pinochet sont nombreux, beaucoup trop quand on considère le nombre d'années passées", souligne Mme Lagos. 

- 'L'un des meilleurs présidents' - 

"Il y a deux types de soutien à Pinochet", renchérit Patricio Navia, politologue de l'Université Diego Portales : "Il a ceux qui célèbrent le personnage, le général Pinochet, et ceux qui célèbrent les réformes engagées par son gouvernement". 

Et ce sont deux groupes bien distincts de partisans. 

"Ceux qui célèbrent le dictateur Pinochet sont ceux qui commémoreront l'anniversaire de sa naissance. En revanche, ceux qui souhaitent mettre en avant les réformes du régime préfèrent rester discrets, en raison du risque de décrédibiliser ces réformes qui seraient alors associées aux violations des droits de l'homme", détaille M. Navia. 

En juillet 2015, une étude sur "l'image de Pinochet et de la dictature", par les instituts de sondages Mori et Cerc, a révélé que 15% des Chiliens considèrent Augusto Pinochet comme "l'un des meilleurs présidents que le Chili ait connu". 

Et 21% d'entre eux (soit 5 point de plus qu'en 2013) pensent que les militaires avaient raison de s'emparer du pouvoir lors du coup d'Etat du 11 septembre 1973 contre le gouvernement socialiste de Salvador Allende. 


"Cela reste des chiffres élevés", déplore Marta Lagos.  

Le régime d'Augusto Pinochet était tombé après le plébiscite de 1988, le dictateur n'ayant obtenu que 44% des votes.  

Après cette défaite, en mars 1990, Pinochet avait remis le pouvoir au président Patricio Aylwin, incarnation de la transition démocratique.  

L'ancien dictateur était cependant resté à la tête de l'armée chilienne pendant huit ans, avant d'occuper un siège de sénateur jusqu'en 2001. 

Après sa retraite politique il est resté éloigné de la vie publique jusqu'à sa mort d'un infarctus le 10 décembre 2006, peu après l'ouverture d'une nouvelle enquête par la justice chilienne pour d'autres faits de violation des droits de l'homme et détournement de fonds publics. 

Poursuivi et placé en résidence surveillée dans le cadre de cette affaire, il était pourtant mort sans avoir été condamné. 

Lors de ses funérailles, au cours desquelles il avait reçu les honneurs militaires, près de 50.000 personnes étaient présentes. 

IN MEMORIAM ALEJANDRO MUTARELLO

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ALEJANDRO MUTARELLO : UN DERNIER HOMMAGE LUI FUT RENDU LE JEUDI 19 NOVEMBRE 2015, DANS LE CIMETIÈRE COMMUNAL DE FONTENAY SOUS BOIS,  EN PRÉSENCE DU MAIRE M JEAN-FRANÇOIS VOGUET ET DES NOMBREUX CAMARADES ET AMIS. 

- Lui qui portait fièrement le drapeau Chilien dans toutes les commémorations auxquelles assistait l’association des Chiliens de Fontenay. Le 8 mai par exemple. 

- Homme modeste et fin, cultivé avec un humour terrible. Un pince sans rire, plein d’humour et de dérision. En 1992 quand Lénin est rentré au Chili il lui a dit à la douane tu devras leur dire « Ce n’est pas Lénin, c’est Saint-Peter » en référence au changement de nom qui avait eu lieu en 1991 avec la fin de l’URSS. 

- Il s’est toujours battu. Comme à Londres en 1999 quand les Chiliens de Fontenay et leurs amis étaient allés conspuer l’assassin Pinochet lors de son assignation à résidence. Ils étaient déjà avec mon père les deux anciens et avaient eu le droit à un couchage particulier et moins sommaire que les autres. 
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ALEJANDRO MUTARELLO ET SON ÉPOUSE CARMEN, LORS DE SON 90ÈME ANNIVERSAIRE

- Et ces anniversaires de mon père où Alejandro et lui rigolaient en comptant ensemble les décennies qu’ils avaient vécu depuis leurs adhésions respectives aux Jeunesses Communistes en 1941... Et avec Joachin Lopez qui était un peu plus ancien et qui lui avait adhéré en 1936 et se moquait des deux jeunes. Ils avaient en commun l’expérience de la clandestinité et la certitude de pouvoir construire un monde meilleur. Alejandro en mars 1941 à son entrée à la mine et au syndicat; papa en mai à son entrée à la prison de Fresnes… Puis 50, 60 ans, 70 ans de parti chacun. Chemins parallèles séparés de plus de 11 000 km mais qui s’étaient rejoints dans une salle de la mission de France. Des vies entières dont ils étaient ensemble étonnés… et fiers l’un pour l’autre je crois comme deux vieux frères qui partagent plus de choses en un regard, quelques mots ou une accolade, plus de choses que personne autour de la table n’en partageraient jamais.  

- Notre ville peut être fière d’avoir eu pendant tant de temps un homme si droit qu’Alejadro parmi ses habitants. Je le lui avais dit lorsqu’avec Carmen ils avaient été naturalisés. Notre pays gagnait de grands citoyens et nous de bons concitoyens…

- Chance de l’avoir embrassé une dernière fois fin septembre à la maison de retraite Saint-François. On avait parlé un peu. « ¿Cómo estás? Bien, bien » et quelques mots ensuite échangés. Sa vieille main dans la mienne, un échange simple et fort comme toujours. Alors oui nous sommes heureux malgré notre peine car ton exemple est présent.

Alejandro, querido tío, quiero decir una palabra del poeta, nuestro compañero Pablo Neruda : « Una sola palabra, gastada, pero que brilla como una antigua moneda: ¡Gracias ! » (Un seul mot, usé, mais qui brille comme une vieille pièce de monnaie : Merci !). Muchas gracias camarada, seguiremos tu camino, con razón y fuerza, con determinación también, hoy y mañana, ahora y siempre, ahora y siempre. 


Loïc Damiani, 
Adjoint au Maire de Fontenay-sous-Bois (Val-de-Marne).