lundi 5 septembre 2016

ENTRETIEN AVEC JOSÉ MALDAVSKY

Quand j’avais 7-8 ans, j’avais une bande de potes qui
JOSÉ MALDAVSKY À BUENOS AIRES
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ALBERTO NADRA
étaient plus ou moins délinquants. On allait au port où il y avait beaucoup de marins qui venaient du monde entier ; on allait voir les bordels et les boîtes de nuits, et je me suis fait surprendre par mes parents à distribuer des cartes de visites des bordels. À cette époque, je ne me rendais pas compte que je côtoyais la pauvreté, les gamins me racontaient qu’ils faisaient ça pour manger. Suite à cela, mes parents ont décidé de déménager. Mais j’ai continué à aller au lycée public de Valparaiso : on était 1 500 élèves et je côtoyais tout le monde. À l’époque, la majorité des enfants allaient déjà au lycée, mais les gens des  classes sociales supérieures allaient dans des écoles privées. Le Chili était dirigé par la droite et il y avait de nombreuses et fortes luttes sociales, il y avait de la répression également… Pour donner un exemple, les squats étaient habituels au Chili. Dans les grandes villes, les gens qui n’avaient pas de logement occupaient des terrains vides qui appartenaient toujours à des personnes privées. Il y avait une forte répression, la police tabassait les gens, il y avait parfois des morts. Ces squats n’étaient pas des mouvements organisés, mais derrière il y avait quand même les partis politiques, notamment le Parti communiste chilien qui était très puissant, faisant presque 25 % des voix. Historiquement, c’était le parti d’extrême gauche et il encourageait toujours les mouvements sociaux, il soutenait les pobladores, les associations d’habitants sans logement. Ils plantaient quatre bouts de bois et commençaient à vivre là. Les autorités n’arrivaient pas à les déménager et étaient finalement obligées d’installer l’eau courante, l’électricité ; ça devenait des quartiers, mais des quartiers chauds. Les habitants étaient présents à chaque manifestation de travailleurs : le 1er mai, pendant les grèves, etc. parce qu’il y avait beaucoup de chômeurs. Le mouvement lycéen faisait aussi écho à ces problématiques même s’il avait ses propres revendications étudiantes : l’amélioration des conditions de travail à l’école, le problème de carence de professeurs… On se battait aussi pour que tout le monde puisse aller à l’école dès le primaire, car il y avait une partie de la population qui ne pouvait pas y aller, pas parce que les parents ne voulaient pas qu’ils y aillent, mais simplement parce qu’ils n’avaient pas d’argent pour les y envoyer, pour leur payer leurs cahiers. Ces manifestations étaient elles aussi réprimées de façon brutale. Il y avait des flics cachés, et je me souviens très bien avoir participé à des manifs où les flics chargeaient à cheval. Il y avait des blessés, il fallait s’échapper… ce n’était pas évident. Tout ça, associé aux conversations de salon de mon frère avec ses amis, qui étaient des intellos mais très liés aux communistes, m’a forgé une forme de conscience politique.

Un jour, j’ai demandé à mon père s’il pourrait vivre avec ce que gagnaient ses salariés. Il m’avait répondu que cela lui permettrait de vivre seulement trois jours, mais que c’était légal. « Mais tu trouves ça normal de ne pas pouvoir vivre avec ce que tu les payes ? » Il m’avait répondu que j’allais hériter de cet argent-là, alors je suis allé chez le notaire et j’ai légué tout mon héritage à ma mère et à mes frères : je ne suis pas un héros, c’est juste que je ne voulais pas le toucher.

De Madrid à Paris

Quand je suis sorti du lycée, après le bac, je suis rentré à l’école d’architecture, mais je ne sais pas pourquoi… il fallait faire quelque chose. J’étais jeune, les écoles d’architecture étaient plutôt bohèmes, on faisait la fête. Donc j’ai fait un an et demi d’architecture et j’ai connu la mère de mes enfants. On était assez proche politiquement. Elle était d’origine beaucoup plus modeste que moi, mais elle avait toujours rêvé d’aller en Europe. En 1966, elle avait réuni un peu d’argent et m’a dit : « je pars à Madrid ». J’avais un pote qui avait obtenu une bourse pour faire des études en Italie, j’ai réussi à convaincre mon père que j’allais en Italie pour accompagner ce pote, il m’a payé un billet de bateau : un mois de voyage entre Valparaiso et Naples. Je suis resté quelques jours à Rome puis je suis parti à Madrid. Je lui ai écrit « je reste, et si c’est nécessaire, je vais travailler ». Mon père, ça ne lui faisait pas peur que je travaille puisqu’il avait travaillé toute sa vie, et il m’a répondu « oui ».

Je me suis retrouvé en Espagne fasciste. Si je suis allé là-bas, c’était pour la langue, c’était plus facile. Cela m’attirait aussi d’aller me battre contre Franco. J’avais été bercé dans l’idée de la République espagnole, la guerre civile, ça me faisait rêver, j’avais lu Hemingway.

Aller dans la gueule du loup c’est quelque chose que j’aime faire depuis toujours, j’ai soif d’aventure plus que de politique. On est allé là-bas et j’ai commencé à étudier la littérature. Malheureusement mon père est mort, et je suis rentré au Chili auprès de ma mère. J’ai ramené ma compagne tout en lui promettant de revenir en Europe, mais cette fois en France. On s’est marié et on est allé s’y installer en 1967. Là-bas, j’ai suivi des études de journalisme. On s’est débrouillé, entre les petits boulots et les études… puis est arrivé Mai 68. À l’époque on habitait rue de Bac, on a participé aux luttes, ça nous a aidés tous les deux à aller au-delà de la problématique sociale chilienne. Il y a eu la question féministe, le changement de mœurs, ça a élargi notre regard sur le monde. Une chance inouïe.

Après on a fait un boulot absolument loufoque pendant un mois à Singapour, qui était le bordel des Américains qui se battaient au Vietnam. On a travaillé dans un cabaret, avec un show artistique de mime sur de la musique psychédélique, dirigé par un Chilien, une de mes vieilles connaissances. On a vu les soldats américains, complètement traumatisés par une guerre où ils devaient envoyer du napalm partout et tuer des innocents. Et puis tous les gens qui ont péri… ça a aidé à avoir une conscience sociale, mais plus internationale.

Élection de Salvador Allende et mise en place du programme d’unité populaire

En 1967, il y a eu la mort du Che puis en 1970 l’élection de Salvador Allende qui, après s’être présenté quatre fois à la présidence de la République, avait enfin été élu. En 1970, j’avais fini mes études de journalisme, et j’avais déjà une gamine née en France. On a décidé de rentrer au Chili et j’ai été embauché par le journal du Parti communiste chilien, El Siglo, sans pour autant être obligé de militer au parti. Ils étaient assez orthodoxes concernant la politique internationale, je leur disais parfois : «quand il pleut à Moscou vous ouvrez le parapluie au Chili ». J’étais en désaccord avec eux sur Prague[1]…  mais en politique interne ils étaient très ouverts, et culturellement c’était le parti de Pablo Neruda et de la majorité des artistes. En 1971-1972 j’ai décidé de militer dans le Parti communiste, c’est l’époque qui m’a poussé à le faire. Au journal, les réunions de cellule étaient les réunions de rédaction, et ça n’avait rien à voir avec une cellule classique. Au fond, ma manière de militer c’était être journaliste plus qu’autre chose. J’étais extrêmement motivé, comme tous mes amis, par le processus d’unité populaire[2]. Parce que c’était faire une révolution de la liberté, avec une presse libre. Le Chili avait nationalisé les richesses les plus importantes comme le cuivre, il y avait aussi une réforme agraire, redistribuant les terres agricoles, que j’ai d’ailleurs beaucoup couverte en tant que journaliste. On avait nationalisé les 90 plus importantes entreprises du pays, le programme de l’unité populaire s’appliquait. On avait aussi commencé à faire une réforme de l’éducation. Mais évidemment on touchait les intérêts les plus importants des Américains mais aussi de la grande bourgeoisie chilienne qui était en partie propriétaire de tout ça. La droite est devenue extrêmement combative et il y a eu un mouvement qui s’appelait Patrie et Liberté qui commençait à faire des attentats terroristes contre le gouvernement. Il y avait une campagne, on le sait aujourd’hui puisqu’ils l’ont avoué, dirigée par la CIA et le département d’État américain, qui a poussé les camionneurs à faire deux grandes grèves, un lock-out total. Ce mouvement a entraîné un rationnement des denrées, puisque les camionneurs étaient les seuls à pouvoir transporter les marchandises jusqu’aux commerces. Qui plus est, les commerçants soutenaient aussi souvent le mouvement initié par les Américains et refusaient de distribuer leurs produits. Il y avait un malaise énorme. On sait aujourd’hui que les États-Unis payaient les camionneurs tous les jours pour ne pas travailler. En réponse, le gouvernement a créé des mouvements populaires dans chaque quartier, c’était des associations qui avaient la permission d’aller fouiller dans les commerces avec l’aide de la police. On appelait ça des associations de voisins et on découvrait tous les jours quantité de marchandises cachées : de l’huile, du riz, du lait… les gens en avaient marre de faire la queue tous les jours en raison du rationnement.

Suite aux élections de 1970, Allende qui avait obtenu 36 % des suffrages avait fait un accord avec la démocratie chrétienne – 28 % des suffrages – pour avoir le quorum majoritaire à l’Assemblée nationale. Il avait donné quelques garanties : liberté de la presse, tout ce qu’on disait que les communistes n’allaient jamais respecter. Le Parti socialiste c’était autre chose que François Hollande, c’était des marxistes tout comme les communistes. S’il y avait deux partis politiques différents c’est qu’ils avaient des divergences sur l’analyse du stalinisme.

À cette époque-là est né le Mouvement de la gauche révolutionnaire (MIR). Avant qu’Allende arrive au pouvoir, la gauche révolutionnaire chilienne faisait parfois des attentats, des petites choses mais sans jamais tuer des innocents. C’était vraiment des étudiants, certains étaient des anciens militants du Parti communiste très radicalisés, mais très intellos : charmants. Quand plus tard je me suis retrouvé en taule avec eux, on est devenu très pote. Ils ne tuaient pas les gens, mais ils portaient un discours de révolution armée, leur idée était de faire un nouveau Cuba. Ils étaient guévaristes, et comme le Che ils disaient : « on va faire deux, trois Vietnam », on doit faire la révolution par la lutte armée. Pourquoi pas ? On était tous touchés par la révolution cubaine[3]. Avec la victoire de la gauche aux élections, ils ont arrêté la lutte armée mais ils n’ont pas non plus participé au gouvernement. Cependant ils étaient très proches d’Allende : c’est eux qui composaient sa garde rapprochée et non pas la police. Ils profitaient de cette proximité avec le président pour encourager les réformes, ils poussaient le gouvernement, dans lequel on trouvait des communistes, des socialistes et des chrétiens de gauches, à agir. C’étaient des pro cubains, des fidélistes, des gens qui pensaient qu’il fallait respecter et soutenir la voix d’Allende mais que ça n’allait pas marcher. Pour eux la lutte armée était nécessaire, car les États-Unis n’allaient jamais laisser l’expérience démocratique portée par Allende aller jusqu’au bout. C’est ce qui s’est passé. Si je ne militais pas avec eux c’est que je pensais qu’il n’y avait pas les conditions réelles : la majorité du pays n’était pas pour la lutte armée, ce n’était pas comme à Cuba. Je continue à penser que tu ne peux pas faire la lutte armée sans avoir la majorité des personnes derrière toi. C’est comme le Che en Bolivie : les gens se demandaient « mais qu’est-ce qu’il fait celui-ci ? » Quelques années plus tard, je suis allé voir les paysans du coin pour un reportage et ils m’ont dit « il était très sympa ce gars, mais on comprenait que dalle à son discours ». Le seul qui avait compris ce que disait le Che c’était l’institutrice du village.

Le gouvernement d’Allende a duré 3 ans, et les 36 % faits aux élections de 1970 étaient devenus 43 % aux élections législatives de mars 1973. La droite et les États-Unis se sont rendu compte qu’ils n’avaient plus le quorum pour destituer un jour Allende à l’Assemblée nationale puisqu’ils avaient besoin de 2/3 des voix. Ils ne comprenaient pas qu’avec tous ces rationnements et les différents problèmes, les gens continuaient à appuyer Allende. Mais l’éducation, le logement, les conditions de vie s’amélioraient quand même pour les couches les plus populaires. Doucement. La réforme agraire portait ses fruits, la nationalisation du cuivre permettait à l’État d’avoir de l’argent pour régler des problèmes que la droite et le centre n’avaient jamais pensé régler.

On sentait l’arrivée d’un coup d’État, les mouvements d’extrême droite faisaient de plus en plus d’attentats, ils faisaient sauter les poteaux électriques, des choses comme ça. Et en juin 1973, ils ont fait une sorte de répétition du coup d’État. C’était le 29 juin, quand je me suis réveillé, j’ai mis la radio… Allende disait qu’il allait résister. Je suis parti pour essayer de rentrer dans la Moneda, le palais présidentiel, mais la place qui lui faisait face était pleine de militaires. C’était difficile de rentrer, alors je me suis placé au quatrième étage d’un bâtiment qui donnait sur la place ; j’ai pu faire une chronique de ce qui se passait, je l’ai transmise par téléphone au journal. Le coup d’État a échoué parce qu’il restait un militaire à la tête de l’armée qui était resté fidèle à Allende : c’était Carlos Prats González. Il avait un prestige énorme. Après le coup d’État de Pinochet, il sera rapidement éliminé… C’était un type très loyal qu’Allende avait même nommé ministre de la Défense à un moment donné pour essayer de stopper la montée de l’extrême droite. Ce n’était pas un allendiste mais le type était démocrate. Après le coup d’État raté de juin, les chefs de la révolte sont allés en prison, mais déjà la majorité de l’armée était hostile au président.

L’armée de terre c’était là où les classes moyennes envoyaient leurs enfants à défaut de les envoyer à l’université, car ils étaient pris en charge, nourris, logés et avaient une condition professionnelle. La bourgeoisie choisissait plutôt la marine. Et l’aviation c’était le point faible de l’armée. Elle n’était pas très puissante à l’époque et plutôt composée de classes moyennes. Quant à la police, qui a participé au coup d’État, c’était des gens de province en majorité, des couches très populaires… mais il y avait un mépris de la grande bourgeoisie pour ces gens-là.

Pinochet, jusqu’au 11 septembre 1973, a joué à l’hypocrite puisqu’il assurait à Allende fidélité totale, il a même réussi à convaincre le général Prats. D’ailleurs Pinochet n’est monté à la direction du coup d’État qu’à la dernière minute. Il a hésité jusqu’au bout. C’est lui qui le dit dans ses mémoires. Le 11 septembre, c’est le coup final, il a sauté sur le pouvoir et ne l’a plus lâché.

Le coup d’État et l’entrée en résistance

Au même moment, le journal m’avait envoyé à Paris[4] comme représentant à la Fête de l’humanité. C’est là que j’ai appris le golpe.

J’ai interviewé Georges Marchais[5] sur la situation pour le journal chilien. Je n’en garde pas un très bon souvenir, il était arrogant. Bon… il fallait que je le fasse et lui aussi au vu du contexte. Le Chili d’Allende était un exemple pour la gauche du monde entier. Toute la gauche internationale était allée voir cette expérience inédite. Je me souviens de Mitterrand, quand il est allé au Chili : il avait donné une conférence de presse. Il était accompagné de Felipe Herrera, le président de la Banque interaméricaine de développement. Et le journal m’avait envoyé à la conférence de presse parce que je parlais français, et moi la seule chose que je voulais lui demander c’était s’il se sentait responsable des morts en Algérie quand il avait été ministre de l’Intérieur en 1957. Il n’a pas répondu… Les organisateurs m’ont dit que ce n’était pas le sujet. «Mais ça l’est ! Ce monsieur vient apprendre quoi ? À faire un gouvernement populaire alors qu’il a un passé comme ça ? Ce n’est pas possible, il y a un problème.» La conférence de presse s’était arrêtée là.

Bref, du coup le 11 septembre 1973 j’étais à Paris. J’ai essayé de rentrer tout de suite mais j’ai dû m’arrêter à Buenos Aires car la frontière chilienne était fermée. Par téléphone, ma femme m’a appris que la maison avait été fouillée et que j’étais recherché comme tous les journalistes du journal. Il y avait des listes de personnes recherchées. Elle me dit « attention ce n’est pas de la tarte, on tue les gens, il n’y a pas de procès». Le grand stade de foot de Santiago avait été rempli de prisonniers, les gens étaient envoyés dans ce qu’on appelait des camps de concentration. J’ai été pris en charge à Buenos Aires par le petit Parti communiste argentin et j’ai commencé à faire passer clandestinement des Chiliens en danger, à les aider à entrer en exil. J’ai fait ça pendant plus d’un an, jusqu’au jour où j’en ai eu marre : je voulais rentrer au Chili. Début 1975, j’ai arrêté de faire des allers-retours et je me suis installé définitivement en clandestinité au Chili. J’étais déjà clandestin en Argentine, où j’étais aussi persécuté : un jour ils se sont trompés, les milices d’extrême droite ont pris un copain à moi qui me ressemblait et ils l’ont tabassé. Les salauds qui ont fait ça faisaient parti d’un mouvement très lié aux agents secrets chiliens qui s’appelaient l’AAA : l’Alliance Argentine Anticommuniste. C’est eux qui avaient éliminé le général Prats à Buenos Aires. L’opération Condor[6] était déjà en place et fonctionnait très bien. À l’époque, le ministre de l’Intérieur de Perón, le président argentin, c’était José López Rega, un véritable salopard : c’est lui qui dirigeait l’AAA. Je ne sais pas pourquoi Perón avait mis ce type… le péronisme, ça a toujours rassemblé des gens de l’extrême droite à l’extrême gauche, c’est un parti particulier, mais c’est une autre histoire.

Je suis rentré au Chili et j’ai travaillé dans la clandestinité : je faisais mille choses. J’ai notamment fait de la presse clandestine afin de préparer la militance communiste à la lutte armée… le Parti communiste chilien n’avait encore jamais fait la lutte armée. On a créé un mouvement qui s’appelait le Front patriotique Manuel Rodriguez, parce que c’était un combattant de l’indépendance contre l’Espagne en 1810. Quand le pays a pris son indépendance, ce guérillero de l’époque a été liquidé par ses propres compatriotes parce que c’était un mec trop à gauche… Il ne faut pas oublier que le colonisateur a été remplacé par la bourgeoisie ; elle ne voulait pas de gens qui s’occupent du peuple, mais seulement prendre la place du colonisateur.

On ne pouvait pas entrer dans la lutte armée du jour au lendemain. Sortir de la voie démocratique, des élections, auxquels participait le parti depuis des décennies et tout à coup dire « on va prendre les armes ». Mais il y avait un travail idéologique à faire pour convaincre les militants du Parti communiste qu’il fallait agir de la sorte, que Pinochet méritait d’être combattu par les armes. Le processus d’avancée démocratique était stoppé par la dictature et ils ne nous laissaient pas de marge pour récupérer la démocratie. La violence réactionnaire méritait la violence révolutionnaire.

La lutte des classes était présente parce que finalement, avec la dictature, la situation était épouvantable pour les couches défavorisées de la population. On se disait que la seule façon pour que les gens puissent améliorer leurs conditions sociales c’était de récupérer la démocratie. Mais il y avait aussi la répression et on en avait marre de se faire réprimer sans riposter. On savait très bien qu’on n’allait pas abattre la dictature, ni gagner la guerre contre l’armée de Pinochet. On voulait simplement lui faire mal et faire des petites ou grandes actions ciblées. On a essayé de tuer Pinochet – quand je dis « on » je n’ai pas participé personnellement –, on a échoué.

C’était un attentat qui avait été préparé pendant un an et demi et a été tenté en 1986. À l’époque, j’étais déjà exilé en France. C’est le Parti communiste qui a décidé de liquider le dictateur, ils se sont dits : «on tue la tête et ça va créer un bordel énorme chez eux», d’autant plus que Pinochet avait accumulé tous les pouvoirs et qu’il n’y avait pas de successeur véritable.

Pinochet avait l’habitude d’aller dans une maison de campagne proche de Santiago, tous les week-end ou presque, et il rentrait en voiture avec une garde de deux voitures blindées. Une derrière, une devant. Les copains ont loué une maison, à proximité de la route qu’ils empruntaient, comme s’ils s’installaient dans une communauté hippie ; il y en avait dans le coin, la cordillère attire depuis toujours des gens comme ça. Les gens étaient habitués à ce type de voisins. Les copains ont bien étudié le parcours jusqu’au jour de l’attentat. Un dimanche, et l’anecdote, ce qui a été dit par ces gars-là après, c’est qu’ils avaient trois missiles, deux soviétiques et un américain. Les deux missiles soviétiques ont fait véritablement exploser les voitures des gardes du corps, et on dit qu’ils ont raté Pinochet avec le missile américain… Pinochet a fini un peu blessé, mais les gars qui ont fait l’attentat ont fait l’erreur de ne pas aller vérifier qu’il était mort et, quand ils sont rentrés à Santiago, ils ont appris à la télé qu’il était vivant.

Je continue à croire que si l’attentat avait marché, l’histoire du Chili aurait été différente. Le prestige du PC, s’ils avaient réussi à tuer le dictateur, aurait été énorme.

Avant le coup d’état, le Parti communiste chilien et Allende avaient déjà des désaccords avec les Cubains, ces derniers pensaient qu’il n’y avait qu’une voie révolutionnaire et c’était celle de la lutte armée. Une fois le 11 septembre 1973 accompli, Fidel Castro ne s’est pas privé de dire que la voie choisie par le Chili risquait de ne pas marcher… Malgré ça, il nous a beaucoup aidé, des jeunes sont partis s’entraîner à Cuba. À cette époque, il y avait aussi la guerre de libération au Nicaragua, l’URSS, la RDA aussi ont aidé. Ils ont donné des armes, de l’argent et des formations militaires – même de la formation sur le terrain comme au Nicaragua. Mais pour eux j’étais trop vieux, j’avais presque 30 ans. Il fallait des mecs de 18-20 ans. J’ai participé dans les bases idéologiques, sur pourquoi il fallait faire la lutte armée. Par exemple, je faisais des articles, des études sur l’histoire du Chili. Je prenais quelques personnages de l’histoire du Chili pour expliquer qu’il y avait une tradition de lutte armée quand la situation était extrême. On avait lutté avec les armes contre les Espagnols, mais avant ça, la population originelle, les indiens Mapuche chiliens avaient, à la différence d’autres pays d’Amérique latine, combattu pendant trois siècles le colonisateur. Pendant plus de 300 ans, les indiens ont défendu leurs territoires et les colonisateurs n’ont pas réussi à les vaincre. Les indiens Mapuche, dont on parle beaucoup aujourd’hui, sont des gens très combatifs et qui n’acceptaient pas la présence des Espagnols ou des Chiliens : c’était leur territoire, leur culture. Finalement, le gouvernement chilien a réussi à les vaincre à la fin du XIXe siècle. Plus tard, j’ai fait des films sur cette histoire pour défendre la cause indienne[7].

Dans les argumentaires que je mettais en place, je mobilisais aussi les luttes de Simón Bolívar, de José Martí. J’aidais également dans les tâches de renseignement et d’information. J’étais surtout à Santiago, c’était très dangereux, on avait peur d’être fait prisonnier, d’être attrapé, on avait énormément de mesure de sécurité pour vivre. Je ne prenais jamais le chemin direct pour aller quelque part, je mettais deux heures et quatre bus, je regardais toujours derrière moi, réflexe que j’ai gardé après pendant longtemps. Je me suis habitué à cette manière de vivre.

Mes voisins, par exemple, se demandaient ce que je faisais. Pour ne pas éveiller les soupçons, je sortais tous les jours à la même heure, comme si j’allais au boulot, et après je m’emmerdais comme un fou. Je lisais, je me baladais, mais la clandestinité c’est l’ennui. Tu fais des coups précis, une fois par mois, deux fois, mais tout le reste du temps tu n’as rien à faire… donc tu circules, tu bois des cafés, tu ne peux croiser personne… si je rencontrais par hasard des gens que je connaissais il fallait faire comme si je ne les connaissais pas. Parfois, j’allais passer la journée chez une cousine, on causait de tout et de rien, elle me passait des cassettes de films… on s’interdisait d’aller au cinéma puisqu’ils étaient surveillés : la police pensait bien que des gens comme moi, journalistes et forcement intello, étaient intéressés par la culture. Et évidemment je n’allais pas dans les peña, des bars où les nouvelles chansons contestataires commençaient à surgir au début des années 1980.

Une fois, mon chef m’a annoncé : « on a décidé d’éliminer untel : un traître ». Je ne le connaissais pas trop mais ça ne me plaisait pas du tout de faire un truc comme ça et en même temps mon chef donnait des arguments, il avait trahi, dénoncé… Je me souviens lui avoir dit « et si on parlait un peu avec lui avant pour connaître les raisons ». J’ai réussi à le convaincre de discuter avant de le buter. Et donc, en effet, le type a avoué qu’il avait dénoncé, mais parce que la police avait une de ses filles… l’explication était extrêmement humaine. Évidemment ça avait coûté cher, des copains avaient été attrapés. Mais il n’a pas été tué, c’était un pauvre type qui était dans une situation de contradiction extrême. On a décidé de l’exclure, mais c’est tout. Même si on était en guerre, ce n’était pas possible de tuer un type froidement qui n’était pas un ennemi. Il ne faut pas s’éloigner du sens humaniste dans tous ces combats, on pouvait facilement devenir d’une froideur épouvantable, des machines. Je crois qu’il n’y a pas plus dangereux que de devenir un soldat irréductible du dogme et d’oublier les principes que tu défends.

J’avais une interdiction totale de participer à n’importe quelle manifestation contre la dictature. Mais au bout de sept ans de clandestinité, je n’ai pas pu m’empêcher d’aller à une manifestation, un 8 mars, pour la journée internationale des femmes. C’était une petite manif en centre-ville et je n’aurais pas dû y aller… J’ai vu un pote se faire coincer par les flics et j’ai essayé de le sortir de là. Je n’ai évidemment pas réussi et j’ai été attrapé. On a passé quatre jours dans un commissariat. Et un journaliste – que je connaissais – d’un journal démocrate chrétien qui avait recommencé à paraître à l’occasion d’une petite ouverture de Pinochet, a dit que je travaillais pour lui. Grâce à cela, on m’a foutu la paix. Je suis sorti de prison, mais j’ai réveillé les services de l’État… et ils se sont dit « le mec qu’on pensait ne plus être là, il est là ! » et le Parti communiste chilien m’a dit de partir, de m’exiler. J’ai dit « non, non, je ne quitte pas le Chili, et je vais chercher du boulot, je vais me réinsérer ». Mauvaise solution, parce que la police de Pinochet a commencé à me suivre et finalement ils ont débarqué chez moi alors que j’avais commencé une vie « normale », j’avais trouvé un boulot dans une radio musicale. Ils m’ont conduit en prison. Là-bas j’ai retrouvé un pote qui appartenait à la jeunesse communiste : mais je ne connaissais pas son nom, juste son surnom « el negro », car il avait la peau très foncée. Ils nous ont emmenés dans une zone de torture et j’ai compris ce que c’était qu’être dans les mains de ces gens-là. Ils n’ont pas arrêté de me demander qui était ce type et je ne savais pas. Et c’est là que j’ai compris que moins tu en sais mieux c’est. Ils l’ont relâché… alors qu’après j’ai appris qu’il était beaucoup plus important que moi dans la hiérarchie de la clandestinité.

Ma femme a réagi très vite pour me faire «réapparaître », car elle savait que la police arrêtait les militants et les faisait disparaître : on n’a jamais retrouvé les corps de certains… elle a dénoncé ma disparition à l’église catholique, au cardinal Raúl Silva Enriquez, un type qui avait fait de son archevêché l’opposition à Pinochet. Il avait créé un corps particulier pour défendre les prisonniers politiques, avec des juristes, des sociologues, sous couverture de l’archevêché. Dans le Chili catholique, même Pinochet n’osait pas toucher à l’archevêché.

Ils ont bien fini par tuer des gens qui travaillaient là, mais jamais à l’intérieur de l’archevêché. Donc ma femme a obtenu très vite un rendez-vous avec le cardinal et lui a dit « c’est un journaliste, ce n’est pas possible », elle a dénoncé ça à l’Agence France Presse, ça a fait le tour du monde. J’étais déjà depuis quatre jours dans les mains de la police secrète et le cardinal a demandé à ma femme « Maldavsky, c’est un nom juif ? – oui ». Et le cardinal a appelé le grand rabbin de France, Monsieur René Sirat, qui a appelé le grand rabbin de New York. Dans la journée, le grand rabbin de New York a appelé le département d’État américain qui était dirigé par un juif à l’époque, ce type a appelé à son tour l’ambassadeur américain au Chili qui était aussi juif… et lui a contacté le Palais présidentiel : « écoutez, vous faites ce que vous voulez parce qu’on n’aime pas les communistes, mais vous ne le tuez pas, faites-le réapparaître, mettez-le en taule, faites un procès normal ». J’ai appris tout ça plus tard par le grand rabbin quand je suis revenu en France en exil… ça ne me plaît pas trop cette histoire parce que c’est raciste, mais c’est la réalité. Résultat, on m’a passé à la justice ordinaire, qui fonctionnait mal et sous pression des militaires, mais au moins j’étais vivant, et j’étais dans une prison normale. J’ai été condamné… Ils m’ont chargé sur le motif de production de journaux clandestins et ils m’ont condamné à deux ans d’exil interne, c’est-à-dire en village surveillé. Mais dans le village j’étais libre, j’étais même avec ma famille. Au bout de trois mois il est arrivé une espèce d’ordre, un décret, on me foutait hors du pays. Et la France a accepté de me recevoir, car ma fille aînée était née en France. C’était en 1981, je suis arrivé en février, un peu avant l’élection de Mitterrand.

L’exil et le travail de journaliste

Il y a eu un truc qui a failli faire basculer mon parcours. Un an après mon exil, en 1982, j’ai décidé de retourner au Chili malgré l’interdiction. C’était juste pour emmerder Pinochet. L’idée était de retourner en avion à Santiago avec mon passeport chilien pour me faire arrêter à l’aéroport où des copains communistes et un juriste m’attendraient. On avait choisi la date de noël en se disant qu’il y aurait beaucoup de monde. Il n’y avait pas d’ordinateur et la liste des interdits de Chili c’était des grands cahiers et j’ai deux prénoms… À la douane le contrôleur s’est trompé entre mon nom et mon deuxième prénom et tout est tombé à l’eau… J’ai passé la douane sans encombre. Alors j’ai repris contact avec les types du Parti communiste, et ils m’ont dit de profiter tranquillement de noël et du réveillon et qu’ils allaient étudier ce qu’il était possible de faire. Pour moi c’était clair, soit je revenais dans la résistance, soit je repartais. Après le 31 décembre, ils m’ont contacté : « pour faire le bordel tu vas renouveler ton passeport ». À l’état civil, ils ne s’attendaient pas à ce qu’un exilé, interdit de territoire, fasse un truc comme ça, donc naturellement ils m’ont annoncé que le passeport sera renouvelé 48 heures plus tard. Mais quand j’y suis retourné, on m’a dit qu’il y avait un problème bureaucratique, que le passeport n’était pas prêt. Ils savaient qui j’étais, c’était sûr ! Je suis allé sur une radio d’opposition, j’ai dénoncé le truc, j’ai raconté l’histoire et je suis rentré en clandestinité à nouveau. Je donnais des interviews, mais j’étais caché. Et puis le juriste qui était avec moi m’a contacté : « tu sais, on a été approché par les syndicats de douaniers, et le pauvre type qui t’a laissé passer, il a été renvoyé à la frontière du Chili à la cordillère des Andes, il a été puni. Le mieux, c’est que tu fasses une lettre en disant que le type s’est trompé et tu le sauves, et il est réintégré, et on te donne le passeport à condition que tu partes… on ne t’emprisonne pas, mais tu pars ». Ma famille en France me m’était aussi sous pression… J’ai décidé de rentrer en France.

Après, c’est le parcours habituel d’un réfugié politique. Grâce au grand élan de solidarité pour les Chiliens en France, j’ai été pris en charge pendant six mois par l’OFPRA (Office français de protection des réfugiés et apatrides)… et j’ai travaillé pendant quelque temps à la mairie d’Argenteuil à faire des maquettes de journal.

Puis j’ai commencé à faire des films, pour la mairie d’abord, puis la télé. Depuis, je n’ai pas arrêté, c’est ma manière de militer. À Paris, j’avais pris contact avec les gens du Parti communiste chilien qui était en exil à Paris. C’était la première fois que je me retrouvais confronté à un militantisme normal. Je me suis rendu compte de leur fonctionnement : on discutait, on prenait des décisions, et finalement on faisait ce que le chef décidait. Je me sens proche de cette pensée, mais je suis incapable d’admettre la discipline attendue des militants, donc on s’est séparé amicalement. J’ai continué à militer à travers l’association des anciens prisonniers politiques, mais surtout j’ai réalisé une centaine de films pour la télé française. Je ne m’intéresse pas seulement au Chili ou à la France. Je suis allé en Palestine, aux Balkans pendant la guerre, en Irak. J’ai réalisé des films sur les indiens Mapuche au Chili et en Argentine, sur Cuba, sur ce qui s’est passé au Salvador, en Bolivie, au Vénézuéla. Je suis devenu un peu antipatriotique, je me fiche de la patrie, mon idée est de soutenir les gens qui résistent à la dictature partout dans le monde.

Sous Pinochet, le mouvement social n’est pas mort. Il y avait des manifestations, des grèves. Vers les années 1985-1986, il y a eu un réveil démocratique qui a été réprimé de manière horrible, mais en même temps il y avait le Front patriotique Manuel Rodriguez qui continuait de faire des actions armées et précises. Il liquidait des types, faisait sauter des trucs, ce qui entraînait ensuite des répressions. La politique du Parti communiste c’était de faire la lutte armée et de continuer la lutte sociale. Des structurations syndicales sont apparues, la démocratie chrétienne a trouvé plus d’espace dans le cadre dictatorial. Tout le monde profitait des organisations démocrates-chrétiennes pour militer à visage découvert, dénoncer les disparitions, tout en étant protégé par l’Église. Et la dictature n’osait pas toucher ces personnes qui étaient surtout des femmes. Il y a eu un mouvement social énorme. Et j’ai couvert ça avec ma carte de journaliste français puisque l’interdiction d’entrer au Chili qui me visait était tombée.

En 1988, sous la pression internationale, Pinochet a organisé un référendum « pour » ou « contre » son maintien au pouvoir. TF1 m’a demandé de couvrir le référendum. Je suis parti tout seul, j’ai trouvé un cameraman et on a réalisé six reportages qui passaient aux JT. Je faisais des reportages sur les partisans du « oui » et du « non » à Pinochet. C’est comme ça que j’ai rencontré les membres de la campagne du « non ». Comme on le voit bien dans le film No, de Pablo Larraín avec l’acteur Gael García Bernal, leur campagne prenait une direction insolite : c’était des publicistes qui prenaient en charge le truc et pas les politiques traditionnels. Mais j’étais emballé : tout le monde chantait la chanson des spots pour le No qui passaient à la télé. Cette chanson, cette gaîté du « non », a permis de convaincre beaucoup de gens, bien au-delà des gens qui pouvaient s’opposer à la dictature.

J’étais au Chili avec du recul, je n’étais plus impliqué, et je ne me permettais pas d’intervenir sur la politique interne. J’avais compris que les gens de gauche qui avaient subi la dictature pouvaient mal réagir à l’aspect publicitaire de la campagne. En même temps, je sentais dans les reportages que je faisais que les jeunes voulaient regarder vers l’avenir et qu’il fallait gagner ce référendum. Les publicistes avaient raison : oui, la campagne était populiste, mais l’essentiel était de faire perdre Pinochet qui allait essayer de truquer jusqu’au bout les élections. Ce qu’il a fait d’ailleurs, mais le chef de l’armée de l’air, avant d’aller discuter avec lui, avait annoncé à la presse « le Non à gagné »… Alors que pendant ce temps les pinochetistes continuaient à dire que c’était le « oui » qui avait gagné. Le chef de l’armée de l’air a fait ça délibérément, il a dû penser que Pinochet, ça suffisait… C’était le 5 octobre 1988, après dix-sept années de dictature.

* Membre du comité de rédaction de la revue Mouvements.

[1] En 1968, l’URSS intervient militairement à Prague et met fin à l’expérience de « socialisme à visage humain » mise en œuvre par le Parti communiste tchécoslovaque.

[2] L’Unité populaire est le résultat d’un accord politique entre les partis de centre-gauche et de la gauche du Chili ayant pour but l’élection de Salvador Allende à la présidence de la République.

[3]En 1959, le dictateur cubain, pro-américain, Fulgencio Batista est renversé par la guérilla menée par Fidel Castro et le Mouvement du 26 juillet dont faisait notamment partie Ernesto Che Guevara.


[5] Secrétaire général du Parti communiste français de 1972 à 1994.

[6] L’opération Condor est le nom donné à une campagne d’assassinats et de lutte contre les mouvements progressistes orchestrée par les États-Unis et l’extrême droite latino-américaine. P. Abramovici, « “Opération Condor”, cauchemar de l’Amérique latine », Le Monde Diplomatique, mai 2001.

[7] J. Maldavsky, Patagonie, les couleurs de la discorde, 2009.