mercredi 30 novembre 2016

CHILI: LA DÉTENTION D'UNE CHAMANE MAPUCHE FAIT POLÉMIQUE

Des terres ancestrales revendiquées par les mapuches

Sur les lieux du drame, les enquêteurs retrouvent des pamphlets sur l’autonomie des Mapuches. Ce peuple vivait dans cette région avant même la colonisation espagnole, et une petite minorité d’entre eux, chiffrée à un million, revendique leurs terres ancestrales.

En effet, entre la fin du XIXe siècle et le début du XXe, l’État chilien avait offert des terres à tout immigrant voulant les cultiver. Mais ces terres dites vierges appartenaient en fait aux Mapuches. Ainsi, depuis plus d’une vingtaine d’années, une partie d’entre eux souhaitent les récupérer. Le couple Luchsinger-McCkay appartenait à une des premières familles de migrants arrivées dans la région. Ils étaient très riches, très influents, notamment dans le parti de droite Rénovation nationale, de l’ancien président de la République Sebastian Pinera. Leur mort a donc non seulement beaucoup choqué, mais la pression est grande pour retrouver les coupables.

Selon le procureur, la machi Francisca Linconao serait à la tête du groupe qui a incendié la maison. Seulement, la défense a démonté une à une les preuves contre elle. La seule qui reste désormais est le témoignage d’un autre accusé dans l’affaire qui s’est ensuite dédit. Il a expliqué devant le tribunal que la police qui le détenait l’avait obligé à signer. La machi est pourtant en détention provisoire depuis mars dernier. Et cette femme de 60 ans se trouve dans un état de santé préoccupant. Elle a été hospitalisée d’urgence 4 fois déjà, et elle est en ce moment même dans un centre de médecine mapuche. Elle a notamment des problèmes d’hypertension.

mardi 29 novembre 2016

LES DIRIGEANTS DU PARLEMENT CHILIEN ASSISTERONT AUX FUNÉRAILLES DE FIDEL CASTRO


Le décès de l'ancien dirigeant cubain vendredi dernier à l'âge de 90 ans a entraîné de nombreuses réactions attristées au Chili. Les chaînes de télévision du pays ont interrompu leurs programmes pour annoncer le décès du lider màximo, tandis que les journaux ont consacré des éditions spéciales à cette personnalité latino-américaine.

La présidente Michelle Bachelet a rendu hommage dans un communiqué à « un dirigeant de la dignité et de la justice sociale à Cuba et en Amérique latine ».

LE LOURD BILAN DES VICTIMES DES MINES ET ENGINS EXPLOSIFS À LA HAUSSE


Selon l'experte, la hausse des victimes s’explique notamment par l’intensité grandissante des conflits. «C’est bien sûr lié essentiellement au conflit de l’année dernière et pour certains encore en cours, que ça soit en Syrie, au Yémen notamment. Et c’est de façon générale la violence de certains conflits qui explique aussi la hausse des victimes. On voit bien qu’en Syrie par exemple, on est dans un contexte de guerre totale où les civils sont en première ligne et les premières victimes des combats. Mais également dans des contextes comme le Yémen ou l’Ukraine, il y a énormément de civils qui sont exposés aux dangers posés par les mines et les restes d’explosifs de guerre. »

Manque de financements

Marion Libertucci estime qu’il est urgent de déployer plus de moyens pour faire face à ce problème. « On constate une baisse des financements pour répondre aux besoins des victimes de mines pour le déminage, etc. On est dans une situation effectivement assez critique concernant la protection des civils des accidents par mines. » L’experte d’Handicap International « appelle vraiment la communauté internationale à se ressaisir. »

« On a l’impression que pour certains pays, le problème des mines antipersonnel, c’est un peu du passé alors que malheureusement, c’est totalement d’actualité. En Syrie, au Yémen, les besoins vont être énormes en termes de dépollution, des villes entières sont minées, sont piégées. Et si on veut protéger les civils, si on veut leur permettre de revenir chez eux, il va falloir mettre énormément de moyens. Et aujourd’hui malheureusement, on ne voit pas que la communauté internationale est prête à mettre l’argent nécessaire sur la table. »

Utilisation en zones urbaines

L’experte de l’ONG Handicap International note qu’il y a une hausse de la fabrication de mines par des groupes armés. « Ça ne coûte pas cher, c’est facile à utiliser etc. Et ça a des effets particulièrement dramatiques sur les populations. Et également on constate, dans le cas notamment de la Syrie, du Yémen ou de l’Irak, que les mines ou les restes explosifs de guerre, qui sont dangereux à long terme, sont souvent utilisés dans les zones urbaines. Donc ça créé beaucoup de victimes civiles. Ça fait longtemps malheureusement que les groupes armés utilisent des mines ou fabriquent des mines artisanales. Mais c’est vrai que nous, on a constaté une hausse d’au moins 20% de victimes dues à ces mines artisanales. Donc il y a malheureusement une évolution négative. » 

lundi 28 novembre 2016

L’AVENIR DE LA RÉGULATION BANCAIRE SE JOUE AU CHILI

LE COMITÉ DE BÂLE VOUDRAIT RENFORCER LES FONDS PROPRES DES BANQUES

C’est une réunion à hauts risques que va tenir le Comité de Bâle à Santiago du Chili, les lundi 28 et mardi 29 novembre. Cette instance – chargée d’élaborer les règles bancaires mondiales depuis 1974 et la sortie du vieux système monétaire de Bretton Woods – a mis à l’agenda un ordre du jour des plus délicats : accoucher des nouvelles normes de capitaux propres qui s’appliqueront, en 2019, à toutes les banques de la planète, de Washington à Moscou, de Paris à Tokyo, afin de renforcer la solidité du système financier.


 LES ACCORDS DE BRETTON WOODS

L’objectif de cette nouvelle réglementation – qui constitue, en fait, le dernier chapitre d’un paquet de règles global, dit de « Bâle III » – est d’éviter un nouveau choc bancaire dévastateur pour l’économie et la croissance, tel que le fut la crise de 2007-2008, toujours prégnante. Or entre la croissance poussive, le Brexit et l’élection de Donald Trump aux Etats-Unis, jamais le contexte n’a pesé aussi lourd qu’en cette fin 2016. Jamais il n’a rendu l’exercice aussi difficile pour les banquiers centraux et les autorités de tutelle membres du Comité de Bâle.

Leur premier défi est de concevoir des règles plus strictes, en s’assurant que les fonds propres des banques soient bien ajustés aux risques (de crédits, taux, marchés…), sans toutefois entraver ces dernières dans leur premier métier, plus que jamais essentiel pour le retour de la croissance : financer l’économie, soit les entreprises et les ménages. Les exigences de fonds propres ont déjà été doublées depuis la crise.

Mauvais film

Le second défi n’est pas moindre : il s’agit de composer avec une nouvelle donne politique, dont personne ne sait encore les effets qu’elle produira. Que feront le Royaume-Uni de Theresa May et les Etats-Unis de Donald Trump une fois ces standards adoptés ?

Du côté des Européens, l’inquiétude prévaut. Car par le passé, en matière de régulation, dans un contexte politique pourtant plus stable et prévisible, les Américains ont poussé pour l’adoption des règles comptables internationales dures (les « IFRS »)… qu’ils n’ont pas appliquées. Le même scénario s’est joué pour le précédent paquet de règles bancaires, dit de « Bâle II ».
LES NOUVELLES RÈGLES BANCAIRES RÉVÉLERAIENT UN DÉFICIT DE CAPITAUX PROPRES PLUS IMPORTANT DANS LES BANQUES EUROPÉENNES
Les Européens eux, en bons élèves, avaient transposé la réglementation. Ils redoutent donc un remake de ce mauvais film… D’autant que M. Trump veut abolir la loi Dodd-Franck de stabilité financière, votée par les démocrates après la crise financière, et prend le chemin d’une dérégulation massive du secteur…

Surtout, les nouvelles règles bancaires, telles qu’elles sont ­conçues, révéleraient un déficit de capitaux propres plus important dans les banques européennes. Ces craintes sont partagées en Asie, notamment au Japon, où ces dispositions produiraient des effets comparables.

« Impensable ! »

« Les nouvelles règles prudentielles (…) ne doivent pas augmenter de plus de 5 % les exigences de fonds propres imposées aux banques européennes », répète-t-on à l’envi dans l’entourage de Michel Sapin, alors que le projet entraînerait un bond en capital de 20 % à 25 %. « Impensable ! », renchérit-on à Bruxelles, où le Commissaire aux services financiers, le Letton Valdis Dombrovskis, menace déjà de ne pas appliquer des règles inéquitables. Une perspective fatale pour le Comité de Bâle, dont l’influence serait remise en cause !

De fait, sur le plan technique, et en résumé, le Comité de Bâle prône la généralisation d’une approche « standardisée » du risque – la même pour toutes les banques –, réduisant le poids des références internes utilisées par celles-ci. Cette méthode étant déjà employée aux Etats-Unis, les banques américaines s’en trouveraient avantagées.

Cette approche consiste, pour calculer les risques d’une banque, donc le capital à immobiliser en conséquence, à appliquer une méthode d’évaluation externe, préétablie. En sus, des seuils planchers de capitaux (« floors ») seraient fixés, en deçà desquels les banques ne pourraient descendre.

« Trouver le bon arbitrage »

Au contraire, les banques européennes ont privilégié une méthode de calcul interne, où chacune évalue ses propres risques, sous le contrôle de sa tutelle. Le passage à Bâle III constituerait donc une rupture. Avec plus d’argent à mobiliser, de manière forfaitaire, quel que soit le profil de risques d’une banque.

Dans le camp américain, l’argument des Européens ne passe pas. Si les banques européennes ne satisfont pas aux nouvelles normes, c’est qu’elles sont sous-capitalisées, martèle-t-on. A elles de s’adapter, pour le bien de tous et pour la stabilité financière.
« L’UE DOIT ACCEPTER CES RÈGLES, MÊME SI CELLES-CI NE LUI SONT PAS FAVORABLES »
Très politique, le débat est suivi de près par les économistes. « Il est légitime pour l’Europe de vouloir peser dans ces discussions. Il en va du financement de l’économie, sur un territoire où les banques comptent pour plus de 70 % de ce financement », déclare Laurence Boone, chef économiste du groupe AXA et responsable de la recherche chez AXA Investment Managers.

« L’objectif, appuie-t-elle, c’est de trouver le bon arbitrage entre cet impératif et la sécurité du système financier. » Car, poursuit Mme Boone, « on a tendance, post-crise, à empiler les réglementations, sans prendre le temps d’effectuer le bilan des mesures déjà en place. Or il se faut se méfier des effets secondaires, non anticipés… »

« Financer les plans de relance »

Pour Jean-Patrice Prudhomme, responsable de la stratégie d’investissement de Barclays Bourse, « l’enjeu est d’autant plus fort, qu’il faudra des banques solides pour ­financer les plans de relance qui s’annoncent, en Europe et aux Etats-Unis ». « Il est important qu’elles soient toutes évaluées de la même manière », ajoute-t-il, confiant sur l’issue des débats :

WILLIAM COEN, SECRÉTAIRE
GÉNÉRAL DU COMITÉ DE BÂLE.
« Les pays développés ont intérêt à une solution commune, bonne pour l’économie. Et c’est aussi dans cet objectif d’accompagner les Etats vers la croissance, que s’inscrivent la Banque centrale européenne et le Comité de Bâle… »
Très agité ces derniers mois, le débat paraissait d’ailleurs s’apaiser un peu, à la veille de la réunion au Chili, avec la recherche d’un compromis. Dans un discours remarqué, en octobre, le ­secrétaire général du Comité de Bâle, William Cohen, donnait ainsi quelques gages, écartant la piste d’un durcissement uniforme des règles :

« L’objectif est de réduire la variabilité observée dans la mesure du risque entre banques, en se concentrant sur les situations aberrantes… Tout en n’augmentant pas significativement les exigences globales en fonds propres. »

NICOLAS VÉRON
« Je crois à un accord, au Chili ou dans les prochaines semaines, pour avancer sur une base commune », conclut Nicolas Véron, économiste au think tank européen Bruegel et au Peterson ­Institute de Washington, pour qui le renforcement de la régulation prime.

« L’Union européenne doit accepter ces règles, même si celles-ci ne lui sont pas favorables, dit-il. C’est une position doctrinaire que de dire qu’on ne veut pas d’augmentation significative de capital, sans regarder au fond une réforme qui vise à ­venir à bout des angles morts de la régulation. Il y a aujourd’hui des trous dans la raquette, avec des banques qui pondèrent mal leurs risques. L’Europe défendra mieux ses intérêts en se mettant en conformité. »


dimanche 27 novembre 2016

MORT DE FIDEL CASTRO


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FIDEL CASTRO EN 1994, À LA HAVANE.
PHOTO GERARD RANCINAN 

Lors du deuxième sommet de la Communauté d’États latino-américains et caraïbes (Celac), le 29 janvier 2014, les dirigeants des trente-trois pays de la régions ont proclamé Fidel Castro « guide politique et moral d’Amérique », un titre qui illustre la stature singulière du « líder máximo ».
David moderne, l’homme incarne la résistance contre le Goliath nord-américain. Invasion, tentatives d’assassinat, embargo économique, financement de l’opposition : Washington aura tout tenté pour renverser les « barbus » parvenus au pouvoir en 1959 et démontrer le danger de leurs ambitions. De la même façon que la menace soviétique a conduit les élites européennes à quelques concessions au cours de la deuxième moitié du XXe siècle, Cuba a — un temps — obligé les États-Unis à modifier leur approche de leur « arrière-cour ». Dès le 13 mars 1961, le président John Fitzgerald Kennedy proclame : « Transformons à nouveau le continent américain en un vaste creuset d’idées révolutionnaires (…). Réveillons à nouveau notre révolution américaine jusqu’à ce qu’elle guide les combats des peuples en tout lieu. ». Aurait-il employé un tel vocabulaire si les combattants de la Sierra Maestra n’avaient pas, défiant tous les pronostics, toutes les prudences, défait une dictature corrompue inféodée aux États-Unis ? Il fallut néanmoins attendre plus d’un demi siècle avant que Washington ne lève (en partie) l’embargo qu’il infligea à l’État et au peuple qui avaient introduit le désordre — c’est-à-dire un peu de justice — dans une région longtemps peuplée de dictateurs et de tyrans.


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SIMONE DE BEAUVOIR ET JEAN-PAUL SARTRE AVEC  
FIDEL CASTRO PENDANT LEUR VISITE À CUBA EN 1960
Cuba a presque la population de sa voisine Haïti. Cela donne une idée de ce qu’aurait pu devenir le pays en matière d’éducation, de santé, de fierté nationale, de prestige international sans la révolution. Quel pays aujourd’hui n’est pas représenté à La Havane par des diplomates de talent? Une telle reconnaissance, nourrie par l’épopée d’une des plus grandes révolutions de l’histoire de l’humanité, a reposé sur des hommes hors du commun. Au départ, ils n’étaient qu’une poignée. Fidel Castro fut du nombre. A l’âge de 13 ans, il organisait sa première insurrection : celle des travailleurs des champs de canne à sucre de son père (1).


En 1960, en visite à Cuba, Jean-Paul Sartre choisit
justement de titrer « Ouragan sur le sucre » la série d’articles qu’il consacra à l’île qui venait de rendre sa fierté à l’Amérique latine et qui s’apprêtait à devenir un quartier général des révolutionnaires de la Tricontinentale. Sartre écrivait : « Le plus grand scandale de la révolution cubaine n’est pas d’avoir exproprié les planteurs, mais d’avoir mis les enfants au pouvoir. (…) S’il faut un fil conducteur — et il en faut un — la jeunesse est l’évidence la plus immédiate, la plus indéniable ; (…) ici, sans cesser d’être un âge de la vie, elle est devenue une qualité intérieure de ses chefs. (…) Il faut n’avoir pas trop vécu pour commander ; pour obéir, il suffit d’avoir plus de trente ans. (2) »

Mais le philosophe avertissait : « Quand l’homme-orchestre est trop vieux, la révolution grince, elle est raide. » Au fil des décennies, les pénuries, les procès, la répression ont assombri le bilan éclatant de la révolution. Et, depuis des années déjà, Cuba n’appartient plus vraiment à l’homme orchestre qui l’a fait exister dans la conscience des peuples du monde entier.



(1) Cf. Volker Skierka, Fidel Castro : A Biography, Polity Press, Cambridge, 2004.  (2) Jean-Paul Sartre, « Ouragan sur le sucre », reportages publiés dans France-Soir, Paris, du 28 juin au 15 juillet 1960.

VU DU MEXIQUE. ADIEU AU DERNIER GRAND HOMME DU XXÈME SIÈCLE


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LA RÉVOLUTION CUBAINE 1959 MENÉE PAR FIDEL CASTRO
PHOTO BURT GLINN  

Le journal souligne en particulier que nombre de mouvements révolutionnaires d’Amérique latine – et d’ailleurs- ont puisé leur inspiration à l’aune de l’expérience cubaine.

Reste que le décès du grand homme, s’inquiète La Jornada, intervient à un moment très fragile pour Cuba, à l’heure où un nouveau président américain pourrait bien mettre entre parenthèses le réchauffement des relations entre les Etats-Unis et Cuba, initié par Barack Obama et Raúl Castro, l’actuel président de Cuba.


samedi 26 novembre 2016

EN AMÉRIQUE LATINE : « HASTA SIEMPRE FIDEL »


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« HASTA SIEMPRE FIDEL » LA HAVANE 2006 
PHOTO ALEJANDRO ERNESTO

La mort de Fidel Castro, vendredi 25 novembre, à l’âge de 90 ans a été annoncée par son frère Raul à la télévision cubaine. Quelques heures après l’annonce de la mort de Fidel Castro, dans la nuit de vendredi 25 novembre 2016, les dirigeants des pays d’Amérique commençaient à réagir.

Nicolas Maduro, président du Venezuela, héritier politique d’Hugo Chavez :
NICOLÁS MADURO
« Je viens de parler au président Raul Castro pour lui faire de notre solidarité et de notre amour pour le peuple cubain face au départ du commandant Fidel Castro. À 60 ans du départ du Granma du Mexique, Fidel part pour l’immortalité de ceux qui luttent toute leur vie… Jusqu’à la victoire, toujours. À tous les révolutionnaires du monde, il nous revient de suivre son héritage et reprendre le flambeau de sa lutte pour l’indépendance, le socialisme et la patrie humaine ».
Salvador Sanchez, président du Salvador :
SALVADOR SÁNCHEZ
« Nous recevons avec une profonde douleur la nouvelle du cher ami et éternel compagnon, le commandant Fidel Castro Ruz ».



Rafael Correa, président de l’Equateur :
RAFAEL CORREA
« Un grand est parti, Fidel est mort, Vive Cuba, vive l’Amérique latine ».





Enrique Peña Nieto, président du Mexique :
ENRIQUE PEÑA NIETO
« Je déplore le décès de Fidel Castro Ruz, leader de la Révolution cubain et référent emblématique du 20ème siècle ».



Dilma Rousseff, présidente brésilienne, élue en 2010, destituée en août 2016
DILMA ROUSSEFF
« Dilma regrette la mort de Fidel Castro : un visionnaire que croyais dans la construction d’une société fraternelle et juste. »



Mauricio Macri, président argentin :
MAURICIO MACRI

« Mes condoléances au gouvernement cubain pour le décès de Fidel Castro»





Diego Maradona, légende du football argentin
DIEGO MARADONA
« C’est une journée horrible. On m’a annoncé la mort de celui qui était le plus grand, sans aucun doute. Fidel Castro est mort. Je suis terriblement triste, parce qu’il était pour moi comme un second père », a expliqué Diego Maradona à Zagreb, où il assiste à la finale de la Coupe Davis de tennis entre la Croatie et l’Argentine.

FREI BETTO : «IL A FAIT DE CUBA UNE NATION SOUVERAINE»


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LE REFLET D’UNE L’IMAGE DE FIDEL CASTRO
DANS UN QUARTIER OUVRIER DE LA HAVANE.
PHOTO PAOLO PELLEGRIN

Frei Betto, dominicain brésilien et ami de Castro, rend hommage à la «dernière grande figure politique du XXe siècle».
FREI BETTO ET FIDEL CASTRO EN 1985
Le dominicain brésilien Frei Betto, 72 ans, est sans doute l’un de ceux qui ont le mieux connu Fidel Castro, dont il fut l’ami. Sa série d’entretiens sur la religion avec le leader cubain a été publiée en France en 1986. Conseiller des mouvements populaires, il est aussi une des grandes figures de la théologie de la libération, courant né dans les années 60 en Amérique latine pour promouvoir l’engagement de l’Église au côté des pauvres.

«J’ai connu Fidel Castro le 19 juillet 1980 à Managua, lors du premier anniversaire de la révolution sandiniste. Ce soir-là, on a parlé jusqu’à l’aube, lui et moi. Il m’a demandé de l’aider à rapprocher l’Eglise catholique cubaine de son gouvernement. Je lui ai répondu qu’il me fallait d’abord l’aval des évêques locaux - que j’ai obtenu. Au fil de ma mission, Fidel et moi nous sommes rapprochés. Ces dernières années, il me recevait chez lui. A plusieurs reprises, en me quittant, il a eu ces mots : "Priez pour nous." J’ai le sentiment qu’il n’était déjà plus un homme athée, qu’il est mort en agnostique. Cela transparaît dans la préface de ma biographie [à paraître prochainement, ndlr], qu’il a rédigée.

«Notre ultime rencontre date du 13 août, le jour de ses 90 ans. Il était affaibli mais lucide. Fidel Castro était la dernière grande figure politique du XXe siècle. Avant lui, Cuba était tenu pour "le prostibule des Caraïbes". Il en a fait une nation souveraine. S’il voyait en Barack Obama un homme serein, il restait méfiant face à ses gestes d’ouverture, craignant un simple changement tactique pour remettre Cuba dans l’orbite des Etats-Unis. On l’accuse d’avoir bafoué les droits de l’homme. Or, grâce à lui, les plus fondamentaux de ces droits - l’accès à alimentation, la santé et l’éducation - sont garantis à Cuba. Aucun autre pays latino-américain ne peut en dire autant. Je dirais même qu’il a contribué au retour à la démocratie dans notre région en entraînant des membres des guérillas opposées aux dictatures qui avaient pris le pouvoir avec l’aide de la CIA, dans les années 60 et 70. Son action, ses paroles ont stimulé la gauche latino-américaine, qui perd une référence. C’est le pape François - dont il était un admirateur - qui est appelé à jouer ce rôle. De par sa critique du capitalisme, mais aussi parce qu’il a réhabilité la théologie de la libération que Jean Paul II et Benoît XVI avaient combattue, éloignant les plus démunis de l’Eglise.»

Chantal Rayes à São Paulo

FIDEL CASTRO SERA INCINÉRÉ DÈS SAMEDI À LA HAVANE


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LUIS CORVALAN SALVADOR 
ALLENDE ET FIDEL CASTRO 
À La Havane, les rues sont restées calmes dans la nuit de samedi en raison de l’heure tardive de l’annonce de sa mort, rapporte l’Agence France-Presse. Plusieurs habitants ont toutefois exprimé un chagrin qui contrastait avec les scènes de liesse observées à Miami, capitale officieuse de la diaspora anticastriste.

 FIDEL CASTRO ET 
AUGUSTO PINOCHET 
« Je suis bouleversée. On peut dire ce que l’on veut, il s’agit d’une figure que tout le monde respectait et aimait», a déclaré Sariel Valdespino, étudiant à La Havane à l’AFP.

 FIDEL CASTRO ET 
SALVADOR ALLENDE 
À Miami, des exilés cubains se sont réunis dans les rues en brandissant des drapeaux, dansant et tambourinant sur des poelles et des casseroles, selon plusieurs vidéos diffusées par des médias américains et sur des réseaux sociaux.

État de santé faible
SEBASTIAN PIÑERA
ET FIDEL CASTRO 
Castro avait abandonné en avril 2011 ses dernières responsabilités officielles, en cédant son poste de premier secrétaire du Parti communiste de Cuba à Raul, numéro deux du parti depuis sa fondation en 1965.


 FIDEL CASTRO  ET 
SALVADOR ALLENDE 1972
L’ex-président cubain avait totalement disparu des écrans cubains entre février 2014 et avril 2015, ce qui avait alimenté de nombreuses rumeurs sur son état de santé.

MICHELLE BACHELET
ET FIDEL CASTRO
 
Mais depuis un an et demi, même si ses déplacement restaient limités, il avait recommencé à publier des «réflexions» et s’était remis à recevoir chez lui personnalités et dignitaires étrangers. Son décès survient à peine deux ans après l’annonce historique du rapprochement entre Cuba et les États-Unis, initiée par Barack Obama et Raul Castro.

vendredi 25 novembre 2016

CHILI - PLUS DE RECULS QUE D’AVANCÉES SUR LES QUESTIONS DE DROITS HUMAINS

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 DESSIN ALVARO TAPIA
Cela fait plusieurs années que nous n’avons pas publié de texte se faisant l’écho des avancées de la justice chilienne sur les violations des droits humains survenues pendant la dictature militaire (1973-1990). Comme on le verra dans cet article d’Arnaldo Pérez Guerra publié le 24 octobre 2016 par Noticias Aliadas, le bilan actuel n’est pas très positif. Les familles des victimes de la dictature dénoncent le manque de volonté politique pour punir les responsables de crimes contre l’humanité.
 DESSIN JEAN PLANTUREUX
Alterinfos
«Vingt-six ans se sont écoulés depuis la fin de la dictature et il n’y a pas de volonté politique pour enquêter sur tous les crimes, annuler le Décret-loi d’amnistie, fermer la prison de Punta Peuco, dégrader les militaires condamnés, accorder des réparations dignes aux victimes et nombre de choses encore », déclare à Noticias Aliadas, Alicia Lira, présidente de l’Association des familles des personnes exécutées pour raisons politiques (AFEP).


C’est aux États-Unis, et non au Chili, qu’a été déclaré coupable le lieutenant à la retraite Pedro Pablo Barrientos – aujourd’hui citoyen états-unien – en tant que l’un des responsables de l’assassinat du chanteur Víctor Jara. Les huit jours qu’a duré le jugement civil à la Cour d’Orlando contrastent avec « les longues années vécues avec la douleur de l’impunité » a déclaré sa veuve, Joan Jara. Víctor Jara, l’un des artistes emblématiques du mouvement de la Nouvelle Chanson chilienne, a été arrêté après le coup d’État qui a renversé le Président Salvador Allende (1970-1973), le 11 septembre 1973, torturé et assassiné à l’intérieur du Stade Chili [1].

Des parlementaires de droite et de la majorité ont présenté trois projets de loi qui permettraient d’accorder des remises de peine à des condamnés, en raison de leur âge, de leur état de santé et pour des raisons humanitaires. Ces initiatives, selon le sénateur Alejandro Navarro, président de la Commission des droits humains « visent directement à créer des conditions qui bénéficieraient à d’anciens militaires coupables de violations des droits humains».

« Outre l’impunité, les condamnations légères et les prisons spéciales [2], [ces projets de loi] cherchent à libérer les quelques génocidaires que nous avons réussi à condamner », remarque Lorena Pizarro, présidente de l’Association des familles de détenus disparus (AFDD), dans ses déclarations au quotidien Uchile.

À la fin du mois de septembre, Mario Carroza, le ministre [juge] en visite a ré-ouvert le cas de la Caravane de la mort – un groupe militaire a parcouru le pays en 1973, sur ordre du dictateur Augusto Pinochet (1973-1990) conduisant à l’exécution et la disparition de 97 détenus – sur la base que la Police d’investigation a inclus dans un rapport des données issues du Livre des nouveautés de la Garde du régiment Arica, d’octobre 1973, qui consignait la sortie de prisonniers politiques de la prison de La Serena en direction du régiment, avec parmi eux, les victimes fusillées.

L’ex-commandant en chef de l’armée, Juan Emilio Cheyre, fait actuellement l’objet d’un procès en qualité de complice dans cette affaire. Selon l’avocat de l’accusation, Cristián Cruz, la découverte du Livre de la Garde conforte encore davantage les moyens de preuve contre Cheyre.

« Celui qui a fait sortir les prisonniers est un sous-officier d’intelligence qui a déclaré clairement devant la justice qu’il avait obéi à Cheyre, alors lieutenant, son chef », explique-t-il.

Au début du mois de juin, le ministre de l’intérieur, Jorge Burgos, a ordonné le renvoi du responsable du Programme des droits humains, Jorge Cabezas, et de l’avocat Rodrigo Lledó, chef du département juridique du programme, pour éviter qu’ils puissent concrétiser leur intention de demander la mise en examen de Cheyre.

Lledó a rejeté les pressions de l’exécutif et, avant de quitter son poste, a demandé au ministre en visite Carroza la mise en accusation de l’ex-chef militaire au titre de complice d’homicides et d’enlèvements qualifiés.

« Des pressions ont été exercées sur le ministre Carroza pour que Cheyre ne soit pas mis en examen et il est fort possible que le renvoi des responsables du programme obéisse à la même intention », confie Lledó à Noticias Aliadas.

Pour l’avocate Carmen Hertz – veuve de Carlos Berger, assassiné par la Caravane de la mort –, «qu’à 43 ans du coup d’État et de sa machine génocidaire, on prétende continuer à occulter l’identité des assassins est non seulement intolérable mais place aussi le Chili en marge des obligations internationales. C’est extrêmement grave».

On maintient le secret

Le 31 août, la Chambre des députés a pris la décision de maintenir secrets les témoignages et les documents recueillis par la Commission nationale sur emprisonnement politique et torture (Commission Valech) – créée en 2003 pour établir l’identité des personnes qui ont été détenues et torturées par des agents d’État durant la dictature militaire. Ce faisant on protège l’identité des responsables de crimes contre l’humanité. Bien que cette décision constitue une violation des traités internationaux, on maintiendra, durant 50 ans, la clause du secret qui interdit de divulguer les témoignages contenus dans le rapport Valech.

« On ne connaîtra pas les noms des tortionnaires et les crimes qu’ils ont commis, on n’intentera pas de procès contre les bourreaux », déclare Lira. « Ils sont assurés d’une totale impunité et cela va à l’encontre du discours sur la quête de vérité, de justice et de réparation. Cette décision de la Chambre est honteuse. Nous avons le droit de savoir ce qui s’est passé, qu’on en finisse avec l’impunité, que l’on juge et emprisonne ceux qui ont violé les droits humains. Il y a des années que la présidente (Michelle Bachelet) s’est engagée à nous recevoir et à nous donner une réponse sur cette question mais à ce jour, toujours rien », ajoute-t-elle.

La AFDD a annoncé qu’elle aurait recours à la Commission interaméricaine des droits humains (CIDH) pour dénoncer l’État chilien en raison du rejet de la Chambre des députés de lever le secret. En août 2014, la CIDH avait fait savoir au Chili qu’il devait annuler toute disposition qui empêche de respecter les normes internationales concernant les procès en attente sur les crimes contre l’humanité.

Le 11 septembre, 43 ans après le coup d’État militaire, la présidente Bachelet a nommé Lorena Fries, ex-directrice de l’Institut national des droits humains, à la fonction de Première Sous-Secrétaire des droits humains.

« Nous avons réalisé des avancées importantes en matière de reconnaissance, de vérité, de justice et de réparation, et nous voulons continuer dans cette voie. Il y a encore des causes en attente, nous n’avons pas avancé autant que nous l’aurions souhaité », a reconnu Bachelet.

Visiblement émue, Bachelet a présidé la cérémonie de réparation que la CIDH a exigé d’organiser, en octobre 2015, pour les cas de 12 ex-membres de la force aérienne (FACH) qui n’avaient pas adhéré au régime militaire et qui furent condamnés par des Conseils de guerre, entre 1973 et 1975. Le 3 octobre 2016, ils ont été « absous » par la Cour suprême. Au nombre de ces cas figure le père de la présidente, le général Alberto Bachelet, mort des suites des tortures.

Pour l’écrivain Hernán Montecinos, « les larmes et l’émotion de la présidente sont sincères. Cependant il faut préciser que cette revendication de l’État n’était pas sincère, elle est hypocrite. Elle a lieu après le verdict et l’exigence de la CIDH qui a statué que l’État devait revendiquer les militaires constitutionnalistes détenus, torturés et condamnés comme traîtres à la patrie. Jamais l’État en tant que tel, de lui-même et face à lui-même, ne s’est imposé cet engagement moral et juridique. Il s’est trouvé dans l’obligation de le faire ».

L’ex-commandant de la FACH, Ernesto Galaz, l’une des victimes, déclare : « En 2001, la Cour suprême a rejeté le recours de révision que nous avions déposé et, en 2003, a rejeté un autre recours. Ayant épuisé les recours à toutes les instances de notre pays nous avons fait appel au tribunal international ». Fin septembre 2016 seulement, la Cour suprême a ratifié les condamnations contre les tortionnaires du général Bachelet : les colonels à la retraite Edgar Cevallos Jones et Ramón Cáceres Jorquera qui ont été condamnés à quatre ans d’emprisonnement.

C’est l’impunité qui prévaut

Erika Hennings, présidente de la Corporation Londres 38 – organisation de défense des droits humains qui doit son nom à l’adresse d’un ancien centre de répression et d’extermination de la dictature – a dénoncé le fait que d’anciens officiers des Carabiniers, condamnés pour crimes contre l’humanité ayant fui la justice, continuent à percevoir leurs pensions de retraite. « Les délais pour les mises en accusation et les condamnations donnent la possibilité aux responsables de s’enfuir. Les réseaux de protection et les pactes de silence sont évidents. Plusieurs continuent à travailler au sein des Carabiniers. Le gouvernement se rend complice car il ne prend pas de mesures fermes pour mettre fin à l’impunité et faire en sorte que les condamnés purgent leurs peines », a déclaré Hennings au quotidien Uchile.

En outre, l’AFDD a fait appel de la décision du tribunal qui, le 5 octobre, a accordé la liberté conditionnelle à Raúl Iturriaga Neumann, ancien sous-directeur de la Direction nationale du renseignement (DINA), la police secrète de la dictature, responsable d’assassinats, d’enlèvements, de disparitions et de tortures.

« Il a été libéré alors qu’il devrait purger sa peine jusqu’en 2037, pour l’assassinat, entre autres, de l’ex-commandant en chef de l’armée, Carlos Prats, et de son épouse, à Buenos Aires », indique Lira. « À l’inverse de ce que font les juges qui enquêtent vraiment, découvrent la vérité et appliquent les condamnations, d’autres accordent des remises de peine, des peines minimales ou simplement innocentent les coupables. »

« C’est là le propre d’un pays où règne l’impunité », met en garde Pizarro.

Finalement le 19 octobre, la Deuxième Chambre de la Cour suprême, par un jugement unanime, a révoqué la sentence prononcée par la Cour d’appel en faveur d’Iturriaga Neumann.

Bien que le Parlement, le 5 octobre, ait déclaré que Pinochet a été le chef d’État le plus violent et le plus criminel de l’histoire du Chili, les tribunaux et l’État continuent à être complices de l’impunité. Quand ils se sont trouvés contraints d’enquêter, ils ont eu recours à des subterfuges afin de réduire les peines, permettant que la majorité des condamnés vivent une vie normale à leur domicile ou dans des prisons spéciales.

« En outre, des tractations en faveur de l’impunité sont à l’œuvre, au bénéfice des condamnés détenus à Punta Peuco, pour obtenir leur libération, en présentant les génocidaires comme de pauvres petits vieux. L’exécutif a concédé l’impunité à la dictature. Évaluer les avancées est assez complexe car on a l’impression que les tribunaux rendent chaque jour des verdicts mais c’est complètement insuffisant. Si l’impunité n’est pas plus flagrante encore, c’est que les actions que nous, les organisations des familles de victimes, avons menées l’ont empêché », conclut Pizarro.

CHILI: LIBERTÉ CONDITIONNELLE POUR UN MILITAIRE CONDAMNÉ POUR CRIME CONTRE L'HUMANITÉ



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MANIFESTATION D'ASSOCIATIONS DE DÉFENSE DES
 DROITS DE L'HOMME AU CHILI PHOTO IVAN ALVARADO 
La plus haute autorité judiciaire du pays, la Cour suprême, vient de confirmer la liberté conditionnelle pour l’auteur d’un crime contre l’humanité. Le colonel Guillermo Gonzalez Betancourt a été condamné à la prison à perpétuité en 1992 dans l’affaire dite «des égorgés», l’une des plus retentissantes de la dictature du général Augusto Pinochet.

GUILLERMO GONZÁLEZ BETANCOURT,
RESPONSABLE DE SÉQUESTRATION ET
ASSASSINAT DES TROIS MILITANTS
COMMUNISTES EN MARS 1985
Pour bien comprendre l’importance de cette mise en liberté, il faut remonter à mars 1985. Un groupe de militaires dirigé par le colonel Guillermo Gonzalez Betancourt enlève alors trois intellectuels  communistes chiliens, Santiago Esteban Nattino, Manuel Leonidas Guerrero y José Manuel Parada un : un publicitaire un professeur et un sociologue. Il les torture, puis les emmène aux abords de Santiago où les trois prisonniers sont égorgés et leurs cadavres abandonnés.

La violence extrême de cette scène a à l’époque tellement choqué l’opinion publique nationale et internationale que le chef d’état-major des carabiniers auquel appartenait le groupe de militaires, a du démissionner en pleine dictature. Un procès est même ouvert et, en 1992, deux ans après le retour à la démocratie, la justice condamne Guillermo Gonzalez Betancourt à la perpétuité. Une condamnation qui fait date : c’est la première dans une affaire importante de violation des droits de l’homme commise sous les années noires.

Aujourd’hui, cette même justice le met en liberté conditionnelle…

Au Chili, le décret qui réglemente la liberté conditionnelle date des années 20. Il est donc bien antérieur aux crimes perpétrés sous la dictature d’Augusto Pinochet : plus de 3200 morts et disparus et près de 30 000 victimes de torture. Mais ce décret ne fait pas la différence entre un voleur de poule et l’auteur d’un crime contre l’humanité. Aussi Guillermo Gonzalez Betancourt a-t-il été considéré comme un voleur de poule : il a accompli plus de la moitié de sa peine, s’est bien comporté, a bien suivi les cours de la prison et a suivi les ateliers de réinsertion. Il est donc libre et peut rentrer chez lui.
GUILLERMO GONZÁLEZ BETANCOURT,
RESPONSABLE DE SÉQUESTRATION ET
ASSASSINAT DES TROIS MILITANTS
COMMUNISTES EN MARS 1985

Colère des victimes…

Tant d’années de lutte pour obtenir justice, et voilà qu’on transforme le bourreau en victime : voilà ce que nous a confié la présidente de l’association des familles des exécutés politiques (l'AFEP), Alicia Lira. Car c’est au nom des droits de l’homme que Guillermo Gonzalez Betancourt a été remis en liberté.

Une décision qui va à l’encontre de tous les traités internationaux signés par le pays mais qui n’étonne guère Alicia Lira. Guillermo Gonzalez Betancourt n’est autre que le quatrième officier condamné pour crime contre l’humanité qui obtient une liberté conditionnelle ces dernières années. Qui plus est, les militaires condamnés dans ces affaires obtiennent au pire cinq ans de prison, souvent une condamnation symbolique et 180 criminels ont été jusqu’ici condamnés sans mettre un seul jour les pieds en prison, une prison spéciale d'ailleurs : Punta Peuco est bien plus confortable que les prisons chiliennes ordinaires.