vendredi 29 décembre 2017

AU CHILI, « PAUVRES PARMI LES PAUVRES », DES DÉTENUES ATTENDENT LE PAPE

[ Cliquez sur l'image pour l'agrandir ]
LE CENTRE PÉNITENTIAIRE POUR FEMMES DE SAN JOAQUIN, 
LE 13 DÉCEMBRE 2017 À SANTIAGO DU CHILI 
 PHOTO MARTIN BERNETTI
Santiago du Chili - Ce sera la première prison pour femmes où se rendra le pape François: le centre pénitentiaire de San Joaquin, à Santiago du Chili, compte 620 détenues, « pauvres parmi les pauvres » qui préparent avec joie la visite du souverain pontife.
«Je suis fière, contente, impatiente et je sais que nous allons toutes pleurer quand nous verrons le pape », s'enthousiasme Viviana Berrios, tout en fabriquant avec ses camarades des bracelets qui seront bénis par François lors de son voyage au Chili puis au Pérou, du 15 au 21 janvier.

Viviana veut simplement « voir son regard, qu'il me transmette cette paix » intérieure. 

Dans cet établissement, autrefois un centre religieux, la mère Nelly Leon, chargée depuis 13 ans de la coordination de l'activité pastorale de la prison, a recueilli bien des confidences de ces détenues. 

Elle a entendu « des milliers d'histoires de douleur, d'angoisse, de désespoir » et se félicite d'autant plus que le dignitaire religieux ait choisi de rendre visite à ces femmes. 

« Le pape a parlé de l'Eglise qui doit sortir, accompagner les périphéries et ici, c'est une périphérie de l'existence, où sont privées de liberté les pauvres parmi les pauvres », témoigne-t-elle. 

Car, dans les prisons du Chili comme ailleurs dans le monde, sont incarcérées "les femmes les plus pauvres, celles qui sont exclues de la famille, de l'éducation, de la santé. Ce sont elles qui vont en prison car celles qui ont un bon avocat n'y vont pas", souligne Nelly. 

À San Joaquin, c'est dans la chapelle que se concentrent l'essentiel des préparatifs, autour d'une crèche de Noël à peine terminée. 

Depuis des mois, les détenues affichant une bonne conduite sont chargées d'élaborer ces petits bracelets de couleur qui, une fois bénis, seront répartis dans toutes les prisons pour femmes du pays. Avec l'aide des religieuses, elles fabriquent aussi des croix. 

- « Un visage joyeux » - 

Pour les résidentes du centre San Joaquin, c'est un passé de meurtres, de vols et surtout de trafic de drogue qui les a menées à perdre leur liberté. 

Après avoir purgé 10 ans de réclusion pour un délit qu'elle ne souhaite pas révéler, Viviana avait bénéficié d'un régime de liberté conditionnelle, avant de repartir derrière les barreaux. La voix entrecoupée de sanglots, elle raconte comment l'assassinat d'un de ses fils l'a plongée dans la dépression et l'a finalement ramenée en prison. 

Incarcérée pour narcotrafic, Stefanie Salas, jeune femme de 24 ans, est pleine d'espoir avant la venue du pape:  «C'est très beau ce qui va arriver, cela va beaucoup marquer ma vie », veut-elle croire. 

Attentive à ce que les caméras de l'AFP immortalisent son air juvénile et son maquillage, Stefanie se félicite d'avoir pu terminer ses études secondaires en prison, mais ne cache pas sa douleur d'être loin des siens. 

Les conditions de détention sont un peu atténuées pour les détenues ayant une bonne conduite: pas d'obligation de porter la tenue de prisonnier, le droit de profiter de vastes espaces en commun et de travailler pour des entreprises en échange d'un modeste salaire. 

Dans ces couloirs, la musique latino et les rires tonitruants dénotent une ambiance décontractée, bien loin des autres secteurs de la prison, interdits aux visites, où sont enfermées les détenues les plus conflictuelles. 

À quelques mètres de la paroisse, Ana Herrera, 47 ans, qui purge sa deuxième peine pour trafic de drogues, travaille à la boulangerie. Elle aussi se dit "contente que (le pape François) ait choisi cet endroit" au cours de sa visite. 

Le souverain pontife « me rend heureuse, il a un visage joyeux, pas comme Jean-Paul II, qui avait une tristesse sur son visage. Les Argentins sont ainsi, joyeux! » 

Maigre et couvert de tatouages, Ana se rappelle qu'à 17 ans, elle avait vu Jean-Paul II lors de sa visite au Chili, en 1987, alors en pleine dictature Pinochet. Depuis elle a toujours rêvé qu'un pape la bénisse. 

« Depuis que je suis ici, j'ai perdu ma mère et, il y a deux mois, mon fils. Je sais que (le pape) va me transmettre sa paix et mon coeur reposera sereinement ». 

SUR LE MÊME SUJET :