samedi 17 juin 2017

HELMUT KOHL, LE CHANCELIER DE LA RÉUNIFICATION ALLEMANDE, EST MORT


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L'ANCIEN CHANCELIER ALLEMAND ET LE DÉFUNT PRÉSIDENT
PATRICIO AYLWIN EN 1991 À SANTIAGO DU CHILI
PHOTO EL MERCURIO

L'ancien chancelier Helmut Kohl, mort vendredi à 87 ans, restera dans l'histoire mondiale comme le chancelier de l'Allemagne réunifiée, l'imposant en quelques mois aux grandes puissances et la plaçant au cœur du projet européen.
HELMUT KOHL
PHOTO DPA
Malade et affaibli depuis plusieurs années, Helmut Kohl s'est éteint dans sa maison de Ludwigshafen (sud-ouest), écrit le journal Bild, très proche de celui qui détient le record de longévité à la chancellerie allemande (1982-1998) depuis la fin de la Deuxième guerre mondiale.

Quand à 52 ans il prend la tête, en 1982, du gouvernement de l'Allemagne de l'Ouest à la faveur d'un changement d'alliance au Parlement, il est encore l'objet de railleries pour son côté rustique et provincial et personne n'aurait parié que ce fils d'un fonctionnaire du fisc issu d'une famille de la petite bourgeoisie de Ludwigshafen entre dans la mémoire collective européenne Mais le 9 novembre 1989, le mur de Berlin s'effondre subitement et le chancelier conservateur, alors contesté dans son propre parti (CDU), endosse, pour reprendre ses propres termes, « le manteau de l'Histoire ».

SIGNATURE PAR MIKHAÏL GORBATCHEV ET HELMUT KOHL
D'UNE DÉCLARATION COMMUNE (BONN, 13 JUIN 1989)
Et il va vite. Ce catholique pratiquant surprend en proposant dès le 28 novembre un plan en 10 points devant conduire à l'unification allemande.

Dans les mois qui suivent l'automne 1989 et la chute des régimes communistes européens, il parvient à obtenir du dirigeant soviétique Mikhaïl Gorbatchev qu'il retire d'Allemagne l'Armée soviétique. Il convainc aussi ses alliés américain, français et britannique inquiets à la perspective d'avoir de nouveau une grande Allemagne au cœur du continent.

Dans ses mémoires, il écrira s'être forgé sa conviction lorsque dans les rues d'Allemagne de l'Est le slogan des protestataires « Nous sommes le peuple » s'est mué en « Nous sommes un peuple ». Cette ambition se réalise le 3 octobre 1990 : l'Allemagne est de nouveau une. Passée l'euphorie, Helmut Kohl doit faire face au défi d'intégrer une ex-RDA à l'économie ruinée et sans expérience de la démocratie. La facture de la réunification prend des proportions énormes, 100 milliards d'euros au total, selon une étude de l'université libre de Berlin de 2009. Les difficultés économiques joueront un rôle non négligeable dans sa défaite électorale en 1998 face au social-démocrate Gerhard Schröder.

LES GROS TITRES DE LA PRESSE
QUOTIDIENNE ALLEMANDE HONORENT
LE CHANCELIER DE L'UNITÉ
« Retarder l'unification aurait eu un coût politique et économique beaucoup plus lourd que le fardeau financier que nous avons accepté de porter avec la réunification accélérée », martelait-il néanmoins en 1996. « L'unité de l'Allemagne et celle de l'Europe ne sont que les deux faces d'une (même) médaille », plaidait-il.

Fervent partisan de l'extension à l'est du projet européen, il est aussi avec son ami le président français François Mitterrand l'architecte du nouveau visage de l'Union européenne avec le Traité de Maastricht (1992) et l'introduction de l'euro, actée en 1999.

En 1984, l'image des deux hommes se tenant par la main sur l'ancien champ de bataille de Verdun pour le 70e anniversaire du déclenchement de la Première guerre mondiale était devenue un symbole d'une Europe pacifiée. La construction européenne et le moteur franco-allemand comptaient d'autant plus pour Helmut Kohl qu'il était né dans une Rhénanie meurtrie par les combats entre les deux pays. La fin de sa carrière a cependant été ternie par le scandale des caisses noires de son parti. Il finira par reconnaîtra avoir recueilli pour la CDU des dons occultes. Angela Merkel, qui avait appris la politique dans son ombre, profita de l'épisode pour l'évincer.

Selon une biographie non-autorisée, il n'a guère pardonné à la chancelière, disant qu'avant de le rencontrer elle « ne savait même pas manger avec un couteau et une fourchette ». Plus récemment, en avril 2016, Kohl a dénoncé la politique d'accueil de Mme Merkel qui permit l'arrivée de 1,1 million de migrants en 2015. Il reçut aussi Viktor Orban, Premier ministre hongrois et farouche détracteur de la chancelière.

Retiré de la vie publique depuis 2002, l'ancien chancelier est néanmoins resté assez discret notamment en raison de lourds problèmes de santé : en 2009, alors qu'il était déjà cloué dans un fauteuil roulant depuis une fracture de la hanche, un accident vasculaire cérébral lui avait paralysé le bas du visage et rendu l'élocution difficile. Les soubresauts de sa vie privée, étalés dans divers livres et journaux allemands - brouilles avec ses enfants, polémique sur le rôle de sa nouvelle femme, la manière dont il a traité sa première épouse malade, Hannelore, qui s'est suicidée en 2001 - ont achevé d'assombrir ses dernières années.