mercredi 28 janvier 2015

CUBA : RAUL CASTRO DEMANDE LA FIN DE L'EMBARGO AMÉRICAIN


Barack Obama avait alors annoncé que l'embargo, en vigueur depuis 1962, serait examiné par le Congrès, seul habilité à décider de son éventuelle levée. La Maison Blanche a annoncé souhaiter que cet embargo commercial soit levé avant que le président Barack Obama ne quitte ses fonctions, en 2017.

L'objectif de cet embargo était de précipiter la chute du régime cubain mis en place après la révolution de 1959, les Etats-Unis étant le débouché traditionnel de l'économie cubaine. Mais les décennies ont passé sans que les restrictions économiques et financières produisent de résultats probants. « Les sanctions ont eu relativement peu d'effet, l'isolement n'a pas fonctionné », a d'ailleurs reconnu M. Obama.

mardi 27 janvier 2015

« AU XXÈME SIÈCLE, BERLIN A ÉTÉ LE ROI DE LA DETTE »

RÉPUBLIQUE DE WEIMAR MARK DE 1924  

Que s’est-il passé exactement ?


Entre 1924 et 1929, la république de Weimar a vécu à crédit et a même emprunté auprès des Etats-Unis l’argent dont elle avait besoin pour payer les réparations de la Première Guerre mondiale. Cette pyramide s’est effondrée pendant la crise de 1931. Il n’y avait plus d’argent. Les dégâts ont été considérables aux Etats-Unis et l’effet a été dévastateur sur l’économie mondiale. 

Il s’est produit la même chose après la Seconde Guerre mondiale.

Sauf que les Etats-Unis ont veillé à ce que l’on n’exige plus de l’Allemagne des réparations aussi exorbitantes. A quelques exceptions près, toutes les demandes ont été renvoyées à une future réunification des deux Allemagnes. C’est véritablement ce qui a sauvé l’Allemagne, cela a été le fondement du miracle économique qui a commencé dans les années 1950. Mais les victimes de l’occupation allemande ont dû renoncer aux réparations, y compris les Grecs. 

Quelle a été l’ampleur des défauts de paiement de l’Etat allemand ?

Si l’on prend la puissance économique des Etats-Unis comme point de référence, le défaut allemand des années 1930 a eu autant d’impact que la crise financière de 2008. En comparaison, le problème de la Grèce est minime. Seul le risque de contagion à d’autres pays de la zone euro pose problème. 

La République fédérale passe pour être un modèle de stabilité. Combien de fois l’Allemagne a-t-elle fait faillite, au total ?

Cela dépend du mode de calcul. Rien qu’au cours du siècle dernier, au moins trois fois. Après les premiers défauts de paiement, dans les années 1930, les Etats-Unis ont consenti une remise de dette considérable à la République fédérale, en 1953. A partir de là, l’Allemagne s’est portée comme un charme pendant que le reste de l’Europe se saignait aux quatre veines pour panser les plaies laissées par la guerre et l’occupation allemande. Même en 1990, le pays s’est retrouvé en situation de non-paiement. 

Pardon ? Un défaut ?

Oui, le chancelier d’alors, Helmut Kohl, a refusé d’appliquer l’Accord de Londres de 1953 sur les dettes extérieures de l’Allemagne, qui disposait que les réparations destinées à rembourser les dégâts causés pendant la Seconde Guerre mondiale devaient être versées en cas de réunification. Quelques acomptes ont été versés. Mais il s’agissait de sommes minimes. L’Allemagne n’a pas réglé ses réparations après 1990 – à l’exception des indemnités versées aux travailleurs forcés. Les crédits prélevés de force dans les pays occupés pendant la Seconde Guerre mondiale et les frais liés à l’occupation n’ont pas non plus été remboursés. A la Grèce non plus. 

Contrairement à 1953, il s’agit moins aujourd’hui d’accorder une remise de dette à la Grèce que d’étirer l’échéancier du remboursement. Peut-on dire que le pays est menacé de faillite ?

Absolument. Un pays peut faire faillite même s’il n’est pas complètement fauché. Tout comme en Allemagne dans les années 1950, il serait illusoire de croire que les Grecs pourront s’acquitter seuls de leur dette. Aujourd’hui, il faut fixer le volume des pertes auxquelles doivent consentir les créanciers de la Grèce. Et, surtout, il s’agit de savoir qui va payer. 

Et le premier des payeurs devrait être l’Allemagne…

En résumé, oui. Nous avons été très inconséquents – et nos industries exportatrices s’en sont bien trouvées. Personne en Grèce n’a oublié que la République fédérale devait sa bonne forme économique aux faveurs consenties par d’autres nations. Les Grecs sont parfaitement au courant des articles hostiles à leur égard parus dans les médias allemands. Si le vent tourne dans le pays, de vieilles revendications liées aux réparations de guerre pourraient refaire surface, y compris dans d’autres pays européens. Et si l’Allemagne se trouve contrainte de les honorer, nous y laisserons notre chemise. En comparaison, le renflouement de la Grèce est plutôt une bonne nouvelle. Si nous écoutons les boniments dont on nous abreuve et si nous continuons à jouer les grippe-sous, le cigare aux lèvres, nous sommes condamnés tôt ou tard à voir resurgir de vieilles ardoises. 

Quelle solution serait actuellement préférable pour la Grèce – et l’Allemagne ?

Les faillites qu’a essuyées l’Allemagne au siècle dernier nous enseignent que le plus raisonnable serait de consentir une remise de dette généreuse. Ceux qui ont prêté de l’argent à la Grèce seraient alors contraints de renoncer à une bonne part de leurs créances. Certaines banques n’y survivraient pas, et il faudrait alors mettre sur pied de nouveaux programmes d’aide. Cela pourrait revenir cher à l’Allemagne, mais, d’une manière ou d’une autre, il nous faudra mettre la main à la poche. Et puis la Grèce se verrait ainsi donner une chance de prendre un nouveau départ.


DER SPIEGEL | YASMIN EL-SHARIF

dimanche 25 janvier 2015

ALEXIS TSIPRAS, LE MÉTÉORE

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Alexis Tsipras, dirigeant de la gauche radicale grecque. Alexis Tsipras auréolé de colombes. C’est ainsi qu’est apparu, en Grèce, le chef du parti de la gauche radicale, Syriza, sur Twitter. Ces oiseaux ont une histoire. Le militant laïc, dont les enfants ne sont pas baptisés, participait à la cérémonie de l’Epiphanie, le 6 janvier 2015, au Pirée. Un peu hésitant, ne connaissant pas vraiment les pratiques, il a lâché une colombe au moment où monseigneur Hyeronimos, l’archevêque d’Athènes, évoquait « le Saint-Esprit sous la forme d’une colombe ». Le groupe formait une curieuse Trinité : le chef de l’Église grecque, l’archevêque Seraphim du Pirée − qui n’hésite pas à manifester aux côtés des néonazis d’Aube dorée −, et le président de Syriza, favorable à la séparation de l’Eglise et de l’Etat, sujet encore tabou en Grèce.


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CURIEUSE TRINITÉ : HYERONIMOS, L’ARCHEVÊQUE D’ATHÈNES,  LE CHEF DE L’ÉGLISE GRECQUE, L’ARCHEVÊQUE SERAPHIM DU PIRÉE  ET LE PRÉSIDENT DE SYRIZA.
Par Alain Salles (Athènes, envoyé spécial) et Adéa Guillot (Athènes, correspondance)

le palais Maximou, le siège du premier ministre grec, vaudrait-il une messe ? Les convictions de Syriza n’ont pas changé, mais une partie de ses nouveaux électeurs sont attachés à la religion et la question de la séparation de l’Eglise et de l’Etat passe désormais au second plan face à l’urgence sociale de la crise. Pour rassembler, il cherche à rassurer, quitte à modérer certains aspects de son programme.

Alexis Tsipras est désormais aux marches du palais. Dimanche 25 janvier, lors des élections législatives anticipées, son parti est arrivé en tête selon les estimations. Le vieux président, Carolos Papoulias, ancien résistant, devrait, lundi, proposer au jeune leader d’essayer de former un gouvernement. La complexe alchimie électorale grecque montrera si c’est possible, mais Alexis Tsipras aura déjà achevé, à 40 ans, un sidérant parcours.

Il est en somme le petit-fils de la dictature et l’enfant de l’austérité. Il n’a pas connu le régime des colonels, de 1967 à 1974, puisqu’il est né quelques jours après sa chute. L’effondrement de ce régime a profondément marqué la gauche, persécutée pendant ces années noires, comme après la guerre civile. L’ombre de cette époque planait encore quand Alexis Tsipras est entré en militantisme à la fin des années 1980, dans les rangs des Jeunesses communistes. La crise grecque et les ravages de l’austérité à partir de 2010 ont transformé un militant gauchiste en leader charismatique connu dans le monde entier, en passe de prendre le pouvoir en Grèce.

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PHOTO EIRINI VOURLOUMIS

« Il a tué le père »

Né dans une famille de petits entrepreneurs, Alexis Tsipras, diplômé en 2000 de l’école polytechnique d’Athènes, a travaillé quelques années comme ingénieur civil dans le bâtiment, mais il a surtout consacré sa vie à la politique. Il a d’abord émergé comme une figure des révoltes étudiantes pour prendre la tête des jeunes du Synaspismos, le parti qui va progressivement former Syriza, en regroupant plusieurs groupuscules de gauche et d’extrême gauche.

En 2006, ce jeune militant crée la surprise en raflant 10 % des voix aux élections municipales d’Athènes, après une campagne séduisante et spontanée. Le style Tsipras fait son apparition et marque le début de sa rapide ascension. En 2008, le chef de Syriza, Alekos Alavanos, prend du champ et désigne le jeune conseiller municipal de la capitale comme successeur. Il est plébiscité par les militants. « À l’époque, on l’avait choisi parce qu’il présentait bien. Qu’il parlait bien. Comme une coquille vide », dit, en riant un peu jaune, une membre du comité directeur de Syriza, critique avec la nouvelle ligne du parti.

Alavanos espère continuer à diriger le parti en sous-main, mais sa créature lui échappe et les deux hommes entrent en conflit en 2009. « Il a tué le père politique », constate le politologue Elias Nikolakopoulos. Syriza obtient un score de 4,6 % et 13 députés, lors des législatives de 2009.

En 2009… C’est-à-dire il y a presque un siècle, tant le visage de la Grèce a changé avec la crise. C’était l’époque où Georges Papandréou, le premier ministre socialiste, raflait 44 % des voix en expliquant qu’« il y avait de l’argent », avant d’annoncer au monde entier que la Grèce était en faillite et d’ouvrir la porte à la troïka des bailleurs de fonds (Fonds monétaire international, Banque centrale européenne et Commission européenne). Le temps s’est alors accéléré en Grèce. Papandréou a ainsi tenu deux ans. Et deux ans et demi après son arrivée au pouvoir, lors des législatives de juin 2012, le conservateur Antonis Samaras est à son tour en passe d’être supplanté par le météore Tsipras. « Il est un produit de la troïka », soupire Dora Bakoyannis, ex-ministre des affaires étrangères (Nouvelle Démocratie, droite).

« Résistance à l’austérité »

Personne ne connaissait vraiment Tsipras hors de Grèce avant la campagne électorale des législatives de 2012. « Il a énormément d’instinct politique. En 2012, il m’a donné une interview dans laquelle il disait qu’il était prêt à s’allier avec n’importe quel parti, car l’important est de gouverner, se souvient son ami le journaliste Stelios Kouloglou, qui a été candidat du parti aux européennes de 2014. Il a été critiqué en interne mais c’est après cela que le parti a décollé et qu’il a obtenu son score aux législatives. » Le journaliste s’enflamme : « Il est comme Maradona : il a pris une équipe plutôt moyenne et l’a portée au sommet. »

Après l’effondrement du parti socialiste (le Pasok), jugé principal responsable de l’impasse dans laquelle se trouve le pays, Syriza devient le deuxième parti grec, avec près de 27 % des voix et 71 députés (sur 300). Alexis Tsipras change de dimension et incarne alors la voix européenne de la résistance à l’austérité imposée par la chancelière allemande, Angela Merkel. Il fascine autant qu’il inquiète. Les journaux du monde entier viennent voir ce « Mélenchon grec », qui supplante rapidement le modèle français. Il parle alors un anglais hésitant − il a depuis pris des cours − et son discours a du mal à dépasser une certaine langue de bois traversée par quelques formules efficaces. Il est souvent tendu dans ses relations avec la presse étrangère. Tellement dans la maîtrise − mais aussi fatigué d’enchaîner les interviews − qu’il en devient parfois raide. Dans cette courte campagne de janvier, il a limité le nombre d’entretiens et préféré envoyer des tribunes aux journaux étrangers.

Un fils nommé en hommage au Che

« Pour nous, c’est mieux d’écrire des articles qui sont publiés tels quels, car nous maîtrisons notre message. Avec une interview, le titre peut porter à l’opposé de ce que nous souhaitons dire et il y a des coupes qui peuvent dénaturer le propos », reconnaît candidement le service de presse du Syriza. « Ce n’est pas son caractère de tout contrôler, mais il a appris la méfiance, plaide le journaliste Stelios Kouloglou. C’est un homme calme qui écoute beaucoup, discute, accepte des opinions divergentes, ne monologue jamais. Je trouve qu’il résiste à la pression de manière exemplaire. » En privé, il est décrit comme chaleureux, plutôt jovial, mais il protège soigneusement sa vie de famille. Il a deux fils avec sa compagne rencontrée au lycée : Paul-Fivos et Orphée-Ernesto − en hommage à Che Guevara.

Sa désignation comme chef de file du parti de la gauche européenne aux élections européennes de mai 2014 lui permet d’accroître son aura internationale. Paris, Bruxelles, Rome ou Berlin, il sillonne alors le continent. Une foule compacte se précipite à chaque fois pour toucher « l’ami Alexis », lui glisser trois mots d’encouragement ou l’embrasser. Lors d’un déplacement à Palerme, en avril 2014, ce fan du Panathinaïkos, club omnisports d’Athènes, avouait être « reçu ainsi partout, comme une star du foot ». « Sa candidature à la présidence de la Commission lui a permis de faire tomber des peurs sur Syriza à l’étranger. C’est un pragmatique, quelqu’un qui sait évoluer, en voulant rassembler. Ce qui me frappe chez lui, c’est son sang-froid », analyse Pierre Laurent, président du Parti de la gauche européenne et secrétaire national du Parti communiste français.

« Les seigneurs de Koumoundourou »

« Il a beaucoup changé en deux ans. Il est plus responsable. Son mûrissement a été très rapide. Il a compris la nécessité d’alliances européennes, alors qu’en 2012 il ne s’adressait qu’aux Grecs », explique Elias Nikolakopoulos. Il a surtout mis son parti en ordre de bataille. Comme le souligne un fonctionnaire européen, « il a pris un groupuscule et en a fait un parti de gouvernement ». Il a notamment réussi à museler un courant minoritaire anti-euro qui représente environ 30 % du parti et à imposer une ligne officielle pro-euro. Cet aggiornamento a provoqué beaucoup de tiraillements et passe difficilement chez des cadres anciens. « Aujourd’hui, il place ses gens. Il est entouré d’une équipe qui se prend très au sérieux », regrette un membre du comité directeur. Alexis Tsipras s’appuie sur un groupe de conseillers jeunes quadras comme lui, à l’image de son directeur de cabinet Nikos Pappas. Ils sont devenus les seigneurs de « Koumoundourou », le nom donné au siège du parti situé sur la place du même nom dans un quartier populaire d’Athènes. Une véritable ruche ces dernières semaines.

Après la victoire aux élections européennes, où son parti est arrivé en tête avec 26,57 % des suffrages, il n’a pas voulu écouter les voix qui lui suggéraient «d’organiser un congrès pour nettoyer le parti de cette vieille garde très figée qui résiste même à l’idée de sortir de l’opposition », explique un proche. Pragmatique, il a fait le choix politique et tactique d’essayer de profiter du renouvellement du président de la République pour faire tomber le gouvernement. Il a considéré que « ce n’était pas le moment de montrer [les] divisions internes ». Au final, il a réussi son pari puisque la procédure d’élection d’un nouveau président de la République a échoué le 29 décembre 2014, précipitant la tenue d’élections législatives.

« Il a compris que la gauche radicale doit aujourd’hui mettre en place un programme plus social-démocrate. Celui qui, en Grèce, va réussir à ramasser les cendres du Pasok sera le principal acteur de la vie politique des vingt prochaines années», juge Stélios Kouloglou. Alexis Tsipras essaie de faire passer des messages rassurants auprès des autres capitales européennes et même des milieux d’affaires grecques. Un cauchemar pour les militants historiques! « C’est sûr que c’est avec lui que l’on arrive au pouvoir mais c’est grâce à nous tous. Et surtout, j’ai peur que l’on se coupe de notre base électorale en faisant trop de compromis », s’inquiète un membre du parti. « Moi j’ai peur que cette bombe des divisions internes ne lui explose à la figure une fois au gouvernement », redoute l’un de ses proches.

S’il devient premier ministre, les dissensions au sein de son parti ne seront pas son principal souci. Il devra à nouveau changer de dimension pour s’imposer à la table du Conseil européen où bon nombre de chefs d’Etat et de gouvernement ne semblent pas prêts à succomber au charme décontracté d’Alexis Tsipras.


SYRIZA : CHRONIQUE D'UNE VICTOIRE ANNONCÉE

PHOTO YIORGOS KARAHALIS 
C'est l'objectif de Tsipras s'il arrive au pouvoir. Il appelle pour cela les Grecs à lui donner "une majorité absolue" afin d'avoir "les mains libres pour négocier" avec les créanciers du pays. Alexis Tsipras, 40 ans, a averti qu'il y aurait peut-être "de grands affrontements" sur la "dette onéreuse et insoutenable" de la Grèce (175 % du PIB, plus de 300 milliards d'euros). Des propos que les Grecs, après six ans de récession, et avec un chômage à plus de 25 %, souhaitent vraiment entendre. Les sondages sont unanimes à donner le parti de M. Tsipras gagnant dimanche, devant Nouvelle Démocratie du Premier ministre conservateur Antonis Samaras, au pouvoir depuis 2012.

L'écart va, selon les sondages, de deux points à près de dix points. La victoire annoncée de Syriza donne des ailes aux autres partis de gauche radicale européens. Pablo Iglesias, le leader du parti espagnol qui monte, Podemos, est venu soutenir Alexis Tsipras jeudi. Foule joyeuse, drapeaux flottant au vent, les deux hommes se sont donné l'accolade sur l'estrade, tandis que retentissait le chant partisan "Bella ciao".

Vers un "Printemps européen" des peuples ?

"Un vent de changement démocratique souffle sur la Grèce. En Grèce, ce changement s'appelle Syriza ; en Espagne, il s'appelle Podemos", a lancé en grec Pablo Iglesias. En France, le leader du parti de gauche, Jean-Luc Mélenchon, a prédit "un effet domino", un "Printemps européen" des peuples. Vendredi, Alexis Tsipras achevait son marathon électoral avec un dernier meeting public à Héraklion en Crète. Après la purge imposée au pays par ses créanciers, UE et FMI, en échange de 240 milliards d'euros de prêts, le gouvernement Samaras a réussi à ramener un peu de croissance depuis mi-2014, à obtenir un excédent budgétaire primaire (c'est-à-dire hors charge de la dette) et à faire une incursion réussie sur les marchés obligataires en avril.

Mais tout cela n'a pas changé la vie quotidienne des Grecs exaspérés. D'autant que le pays n'est pas sorti d'affaire, que le programme d'aide de l'UE a dû être allongé de deux mois, jusqu'à fin février, laissant en suspens sept milliards d'euros de prêts espérés à cette date. À l'instar des propos apaisants de Mme Merkel, le chef du gouvernement italien Matteo Renzi a déclaré également vendredi "ne pas être inquiet" de ce qui arrive en Grèce : "Quel que soit le vainqueur, nous travaillerons avec le nouveau Premier ministre dans la tranquillité et le respect du parcours établi."

Outre les dirigeants européens, les milieux financiers font désormais le dos rond en attendant dimanche. La Bourse d'Athènes, qui a perdu jusqu'à près d'un quart de sa valeur depuis décembre, s'est envolée de 6,14 % vendredi, au lendemain de l'annonce par la BCE d'un vaste programme de rachats d'obligations souveraines en Europe. Antonis Samaras tentera pour sa part, lors d'un dernier meeting vendredi soir à Athènes, d'éviter à la Grèce "un Premier ministre nord-coréen", dernière saillie d'une campagne basée sur la peur et l'exagération.

LE PROGRAMME DE THESSALONIQUE

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Ce qui a été dit à Thessalonique, l’engagement de SYRIZA auprès du peuple grec
Vangelis / décembre 29, 2014

Par Manolis Kosadinos* 
Le 13 septembre 2014, à l’occasion de l’exposition commerciale internationale annuelle de Thessalonique, le président de SYRIZA Alexis Tsipras a annoncé les mesures-phares que la Coalition de Gauche Radicale – SYRIZA – entend appliquer dès les premiers jours de son investiture au gouvernement de la Grèce, espérée, annoncée par les sondages d’opinion et rendue nécessaire par le désastre dans lequel, des gouvernements serviles de droite (Nouvelle Démocratie/LaOS) et de centre-gauche (PASOK et ses tristes épigones) coalisées, ont plongé le pays ces quatre dernières années néfastes en application des recettes toxiques de banquiers, technocrates et politiciens néolibéraux européens.
 
Les déclarations d’Alexis Tsipras condensent la politique de SYRIZA pour une sortie de crise de la Grèce, au bénéfice des classes populaires et en prenant appui sur l’économie réelle du pays qui doit être revalorisée. Il s’agit d’un cahier de charges cohérent fondé sur quatre piliers : le traitement de la crise humanitaire, le redémarrage de l’économie réelle, la restauration de l’emploi avec les garanties d’un droit du travail revigoré et consolidé, la refonte citoyenne des pouvoirs de l’Etat.
Compte tenu que SYRIZA prévoit que, au moins pendant la première partie de la gouvernance anti-austéritaire les relations avec les bailleurs risquent d’être tendues, le coût des mesures est calculé tel qu’elles puissent être réalisées à « budget équilibré » c’est-à-dire sans qu’un recours à l’emprunt soit nécessaire.
Ce cahier de charges est encadré de 27 propositions thématiques de programme, le tout constituant un corpus d’environ 600 pages, qui développent et illustrent le concept de « restructuration de la production » vocable utilisé par SYRIZA pour la sortie de crise dans le sens de l’intérêt des classes populaires.
Treize programmes régionaux pour chacune des régions de la Grèce sont actuellement en voie d’élaboration par autant de conférences régionales du parti. Parmi ces régions, deux (dont Attique-Athènes qui représente 37% de la population du pays) sont gouvernées par des listes de SYRIZA alors que dans toutes les autres l’opposition de gauche est bien présente.
Il est clair que même ce vaste projet est loin d’épuiser les visées stratégiques de SYRIZA qui sont « le socialisme dans la démocratie et la liberté », « le monde où l’humain et ses besoins sont au dessus des profits et où le profit ne sera plus la force motrice de l’économie », le monde où « les travailleurs sont en position de planifier, de diriger et de protéger par leurs organes démocratiquement élus la production en l’orientant vers la satisfaction des besoins sociaux » telles qu’elles sont stipulées dans la déclaration de son 1er Congrès fondateur.
Il est toutefois prévisible que l’application des mesures du programme de Thessalonique pour la sortie de crise en faveur des classes populaires vise à rendre au peuple grec, notamment aux plus défavorisés, les moyens de survivre, de travailler, d’espérer, d’inventer, d’accéder à une citoyenneté élargie et de l’investir afin que ce peuple devienne le levier puissant de la transformation profonde populaire et citoyenne de la société.
Il est certain que la mise en place d’un tel programme n’est pas concevable sans le traitement de la question de la dette aussi bien celle de l’Etat que de la dette privée et SYRIZA  – Coalition de Gauche Radicale – propose dans ce sens des voies de sortie pour libérer la société grecque de la férule que lui a imposé le capital usurier et ses représentants institutionnels nationaux et internationaux.
Ce à quoi un projet de reconstruction doit faire face : le funeste héritage de l’austérité néolibérale.
Les politiques d’austérité dictées par la troïka (Commission, BCE, FMI) en échange des dits « plans d’aide » ont plongé le pays dans le plus grand désastre connu de son histoire en temps de paix. L’axe de référence de l’ensemble de ces mesures « l’équilibre budgétaire » a été appliqué de manière autoritaire dans l’indifférence de son impact sur l’économie réelle et sur la société, par des instances supranationales et des gouvernements serviles sous l’hégémonie idéologique et financière de la droite allemande.
Les dits plans d’aide à la Grèce ont servi majoritairement à rembourser les banques européennes, créancières de l’Etat grec, alors que l’économie, la société, le peuple grec n’ont nullement profité. Le prétexte affiché pour l’application de l’austérité, la réduction de la dette grecque s’est vite avéré fallacieux. En fait cette dette est passée de 115% du PIB avant l’application des plans (2009) à plus de 175% aujourd’hui. Il y a autant tromperie par l’usage de l’euphémisme « réformes » pour des mesures se réduisant aux coupes massives des salaires, retraites, prestations sociales dans le public et le privé, au démantèlement du droit du travail, à l’assèchement des ressources pour les politiques sociales, sanitaires, éducatives. Derrière l’application de ces politiques se cachent d’innombrables tragédies humaines. Le bilan est effarant et il figure en chiffres au tableau accolé en annexe à ce texte. Pour en prendre la vraie mesure il faudrait tenir compte du fait que la population de la Grèce est le sixième (1/6) de celle de la France, toute projection devrait donc utiliser un multiplicateur de 6.
Certains chiffres-phares sont toutefois utiles pour planter le décor. Le PIB présente une réduction cumulée depuis 2009 de 25%, le chômage est passé de 9% en 2009 à plus de 25% en 2014 (majoritairement non indemnisé), la moitié de la population accède difficilement ou pas aux soins médicaux. Les inégalités se sont accrues, certains acteurs privilégiés proches du pouvoir ayant continué d’accumuler des profits tout en échappant à la fiscalité. En revanche une majeure partie de la population a fait l’objet d’un pillage fiscal qui paralyse l’économie et menace d’expropriation beaucoup de petits propriétaires.


Pendant cette ère d’austérité (qui se poursuit et se poursuivra tant qu’il n’y aura pas de changement politique) les citoyens protestent inlassablement: 22.000 petits et grands rassemblements selon les chiffres de la police. L’application de mesures rejetées par la majorité du peuple et le maintien au pouvoir d’un gouvernement sans soutien populaire induit l’intensification de la répression policière et la cooptation de l’extrême droite au gouvernement de droite/centre-gauche. L’information est aujourd’hui monopolisée en Grèce par des groupes connectés au capital armatorial et banquier. La fermeture illégale par décret de l’audiovisuel public (ERT) en juin 2013 justifie le déclassement de la Grèce dans  le classement RSF pour la liberté d’expression. Les dénonciations internationales pour des violations des droits humains, notamment des immigrés, sont multiples.


LE PROGRAMME DE THESSALONIQUE

Le programme dit « de Thessalonique » constitue l’engagement de SYRIZA – Coalition de Gauche Radicale – auprès du peuple grec pour le lendemain des urnes, dans le cas probable d’une victoire des forces populaires rassemblées autour de notre parti.
Ce programme est clair et cohérent. Il cible les principaux ravages qui affectent aujourd’hui la société et l’économie de la Grèce. Le coût de l’ensemble de ces mesures est estimé à environ 11,3 milliards d’euros ; il est ainsi prévu qu’il puisse être financé par le budget de l’Etat, indépendamment de la marche des négociations avec les bailleurs et les instances supranationales, négociation que SYRIZA compte engager fermement sur la dette. Le programme comporte quatre faisceaux de mesures, les « quatre piliers » nommément : le traitement de la crise humanitaire, le redémarrage de l’économie réelle, la reconquête de l’emploi et la restauration et élargissement du droit du travail, la refonte citoyenne des mécanismes de l’Etat.

1) Le traitement de la crise humanitaire

1a.  La fourniture de l’électricité nécessaire gratuite à
UNE AFFICHE DE SYRIZA, À ATHÈNES,
LE 17 JANVIER 2015
300.000 foyers sous le seuil de pauvreté (coût estimé 59,4 millions € sur un an)

1b. La subvention alimentaire à 300.000 foyers sous le seuil de pauvreté par une mobilisation synergique de l’Etat et d’acteurs militants et sociaux  (coût estimé 756 millions € sur un an)

1c. Des soins médicaux et pharmaceutiques accessibles à l’ensemble de la population par l’augmentation du remboursement et la gratuité pour les plus défavorisés (coût estimé 350 millions € sur un an)

1d. La garantie du logement pour environ 30.000 familles par la cession/réhabilitation de locaux inoccupés et une subvention substantielle au loyer (coût estimé de la subvention 54 millions € sur un an)

1e. Paiement d’un 13e mois aux retraités et pensionnés dont la retraite ou la pension est inférieure à 700 € (coût estimé 543 millions € sur un an)

1f. Gratuité des transports publics pour les personnes sous le seuil de pauvreté (coût estimé 120 millions € sur un an)

1g. Baisse de la TVA sur le fuel de chauffage au niveau antérieur à l’application du mémorandum qui  ramènerait son prix de 1,2 €/l à 0,9 €/l. Cette mesure, au-delà du bénéfice humanitaire et écologique (diminution du chauffage « sauvage » et du non chauffage) est estimée apporter aussi un bénéfice budgétaire puisque l’augmentation de l’utilisation du fuel augmenterait les recettes même avec un taux de TVA réduit.

Le coût annuel de l’ensemble des mesures du 1er « pilier » s’estime à 1,88 milliards €.

2)      Relance de l’économie réelle

2a.  Nous préconisons des mesures pour faciliter le recouvrement des prélèvements obligatoires auprès des petites et moyennes entreprises, des indépendants aux revenus modestes et  des foyers en difficulté. En conséquence de la crise, le tissu fiscal est épuisé et une partie considérable des contribuables a cumulé des dettes envers le Trésor Public, une situation qui entraine des poursuites pénales et des saisies, la paralysie de la vie économique et fragilise l’être social de nombreux citoyens.

Ces mesures sont :la  mise en place de Commissions de proximité pour règlement par procédure extrajudiciaire des sommes dues, l’échelonnage avec plafonnement à 20% des revenus pour les impôts et à 30% pour les cotisations sociales, arrêt de toutes poursuites, saisies et entraves administratives pour les contribuables soumis au régime proposé, suspension de paiement de 12 mois pour les contribuables dont les revenus sont avérés nuls. Par ailleurs il est préconisé de supprimer le flagrant délit pour dette fiscale, dispositif entaché d’inconstitutionnalité, et de supprimer l’acompte de 50% sur la somme due pour qu’un contribuable puisse agir en justice administrative.

L’objectif de ces mesures est de soulager les citoyens (les forces vives de l’économie)  mais aussi de créer des recettes réelles que le système actuel est incapable de recouvrer.

2b. Suppression de la nouvelle loi d’imposition du patrimoine immobilier (ENFIA) qui cible essentiellement les petits patrimoines, ne tient pas compte de la faiblesse des revenus des contribuables, allège la charge pour les grands propriétaires. Cette loi tend à devenir aujourd’hui confiscatoire pour les salariés, les retraités, les chômeurs.

A la place de cette loi SYRIZA veut instaurer un impôt progressif sur la fortune immobilière qui, tout en protégeant la première résidence, va créer des recettes pour l’Etat en puisant l’argent là où il se trouve, c’est-à-dire chez les riches, après avoir recensé et évalué la valeur des grandes fortunes.

Le coût estimé de cette mesure s’élève à 2 milliards€.

2c. Affranchissement fiscal pour les revenus des personnes physiques à hauteur de 12.000 €

Le coût estimé de cette mesure s’élève à 1,5 milliar €.

2d. Règlement global de la dette privée – sisachtheia selon le terme consacré de la Démocratie athénienne – envers les banques, la sécurité sociale, le Trésor Public. Cette mesure consiste à plafonner les versements des mensualités de l’ensemble des dettes à un  tiers (1/3) des revenus de l’endetté, avec la prévision d’effacement de dette pour les débiteurs au dessous du seuil de pauvreté. Nous interdirons le transfert de portefeuilles de dettes vers des sociétés d’intérêt lucratif, notamment les fonds-vautours. Suspension à durée indéterminée des saisies pour toute résidence principale dont la valeur ne dépasse pas les 300.000 €.

Les buts de cette mesure sont : la consolidation des portefeuilles des banques, la restauration de la liquidité du marché, la protection de la propriété des citoyens, la relance de l’économie réelle.

Le coût estimé de la mesure 2d s’élève à 2 milliards €.

2e. Nous envisageons la fondation d’une banque de développement, la revalorisation des banques coopératives, l’institution de banques spécifiques pour le financement des petites et moyennes entreprises et des agriculteurs.

Le coût estimé de cette mesure s’élève à 1 milliard €.

2f. Rétablissement du salaire minimum au niveau d’avant les memoranda sans critère d’âge, c’est à dire l’augmentation du minimum actuel des 586 € (même 427 € pour des jeunes) vers les 751 € pour tout salarié.

Il est estimé que cette mesure apportera automatiquement une croissance de 0,5% du PIB par la relance de la consommation des ménages, se traduisant par des recettes budgétaires.

Le coût de l’ensemble des mesures du 2e  « pilier » s’estime à 6,5 milliards €.

3)      La reconquête de l’emploi et la restauration du droit du travail

Pour les promoteurs du néolibéralisme, la création de postes d’emploi ne serait possible que par la compression du dit « coût du travail », c’est à dire par la suppression des droits légaux et sociaux des travailleurs, par l’application de contre-réformes antisociales ou par la facilitation du contournement des lois par les patrons. Ce sophisme a été prouvé faux par l’application de l’austérité en nombreux pays, dont la Grèce, où on constate que la suppression des garanties du droit du travail va de pair avec un chômage galopant. En réalité, pour les néolibéraux, l’emploi n’est pas du tout le moyen pour améliorer la vie des travailleurs et des chômeurs mais essentiellement le moyen pour faciliter l’augmentation des profits du capital. A contre-pied de cette logique, SYRIZA conçoit son projet pour la reconquête du travail en étroit rapport avec la restauration, la consolidation et l’élargissement des droits des travailleurs et des chômeurs. Pour réaliser cela nous proposons un faisceau de mesures.

3a. Nous annonçons notre volonté de rétablir la législation du travail (abrogée par les memoranda), la prorogation de la durée d’application des conventions collectives, leur priorisation par rapport aux accords partiels ou de gré à gré. Par ailleurs, nous allons restaurer les procédures d’arbitrage social, interdire les licenciements collectifs, interdire la « location » de salariés entre les entreprises.

3b. Nous annonçons un grand projet pour la création de 300.000 emplois dans le pays, dans les secteurs public, privé et dans l’économie solidaire. Dans le cadre de ce projet nous allons instaurer des dispositifs spécifiques favorables à l’embauche des chômeurs, applicables par les collectivités locales et par tous  les sous-traitants privés du secteur public, ainsi que pour la création d’entreprises par les chômeurs. Nous ciblerons les groupes de chômeurs les plus fragiles, notamment les jeunes, les seniors, les chefs de familles monoparentales. Les postes créés et les types de contrat pourraient être à géométrie variable, mais dans tous les cas les droits à la retraite à l’assurance-chômage et à l’assurance-maladie doivent être garantis pour tous.

Le coût estimé de la mesure 3b (création de 300.000 postes) s’élève à 5 milliards € dont 3 milliards € pendant la première année.

3c. Nous envisageons d’étendre le nombre de bénéficiaires de l’allocation chômage, ainsi que la durée du droit à celle-ci. Aujourd’hui en Grèce, seulement environ 10% des chômeurs bénéficient de l’allocation-chômage. La sortie escomptée vers l’emploi, par l’application de notre programme de créations d’emploi, de 300.000 chômeurs permettra dans un premier temps d’obtenir les moyens pour mieux indemniser les nombreux chômeurs restants que les politiques de la troïka ont créés en Grèce.

4)      La refonte citoyenne de l’Etat et des institutions

Le terme « réforme de l’Etat » est utilisé de manière fallacieuse par la troïka, et par les concepteurs nationaux et internationaux des politiques d’austérité, pour légitimer une politique qui se résume à l’assèchement des ressources des services publics, le licenciement ou la mise en disponibilité obligatoire de milliers de fonctionnaires, le démantèlement des services, pour légitimer l’application de telles mesures par des actes administratifs ou législatifs à la marge de la légitimité ou en contradiction avec celle-ci. Tout ceci doit changer et changera en Grèce par l’entrée des forces populaires au devant de la scène politique.

A l’opposée de l’orientation néolibérale, SYRIZA – Coalition de Gauche Radicale – entend refonder véritablement l’Etat pour le mettre au service des citoyens (dont nous faisons valoir la double qualité de décideurs et d’usagers) selon sa vocation originale et de l’y rapprocher, tout en l’éloignant de l’influence d’acteurs puissants motivés par le profit ou le pouvoir personnel. La mise en place donc de services publics sous contrôle des citoyens, services de qualité, efficaces et transparents, est une de nos priorités.  Ceci sera un processus de longue haleine, cependant dès le lendemain de l’accès au gouvernement des mesures seront appliquées dans cette direction. Ainsi :

4a. Nous allons réformer la structure de la gouvernance locale en élargissant l’autonomie administrative et financière des collectivités locales, en soutenant leur efficacité dans l’action et en renforçant la démocratie participative.

Nous utiliserons une banque spécialisée en développement local (prévue par notre programme) pour financer des projets locaux par des prêts à bas taux d’intérêt et des par la création par cette banque d’obligations bancaires pour travaux publics.

Nous allons légiférer (au terme de la mandature locale actuelle) sur le découpage territorial et l’organigramme de la gouvernance locale en remplaçant la loi actuelle dite « de Kallikratis » par une nouvelle loi-cadre, à l’issue d’une concertation très large qui démarrera le lendemain même d’urnes législatives favorables.

4b. Nous renforcerons à la fois les institutions de la démocratie représentative-parlementaire et nous introduirons de nouvelles institutions de démocratie directe.

En ce qui concerne la démocratie représentative, nous renforcerons le rôle législatif et de contrôle du Parlement et nous allons réduire l’immunité parlementaire et ministérielle au stricte nécessaire sans laisser de marge à la tolérance des privilèges ou de la corruption. Pour faire cela nous remplacerons la loi actuelle sur l’immunité par une autre loi qui tiendra compte des principes et exigences d’une société réellement démocratique et égalitaire.

En ce qui concerne la démocratie directe nous instituerons l’initiative populaire de légiférer directement, d’opposer veto aux lois et aux décisions administratives et d’appeler à référendum.

4c. Nous allons retracer la carte des médias d’information en Grèce.

Nous allons refonder l’audiovisuel public grec – sous le label ERT supprimé par le gouvernement actuel et qui sera rétabli – en défendant le pluralisme et la qualité, le service des citoyens, l’esprit d’équité et de probité, en nous inspirant des expériences du journalisme militant des dernières années. Nous renforcerons aussi  les médias d’information locaux.

En ce qui concerne les médias d’information privés ils seront soumis aux obligations prévues par la loi auxquelles ils ont longtemps échappé grâce aux passe-droits accordés. Il en sera ainsi des licences, des cotisations sociales, de la fiscalité.

Le financement du programme des « quatre piliers » de Thessalonique

SYRIZA estime aujourd’hui que :

Le plan pour le recouvrement des prélèvements obligatoires et globalement le plan pour la relance de l’économie réelle apporteront 3 milliards € de recettes supplémentaires au budget de l’Etat.

Un plan d’action à déploiement semestriel contre les pratiques d’évasion fiscale actuelles, notamment l’évasion fiscale par transactions intra-trust, les externalisations des recettes et les transferts illégaux de capitaux, les contrebandes de toutes sortes dont celle de carburants, doit apporter 3 milliards € de recettes supplémentaires au budget de l’Etat.

La réaffectation de ressources issue des programmes européens par le biais du Cadre de Référence Stratégique National (ΕΣΠΑ) doit apporter 3 milliards €.
La réaffectation de ressources issues du FSF (Fond de Stabilité Financière) doit apporter 3 milliards €.
L’ensemble de ces ressources constituerait une manne de 12 milliards €, suffisante pour couvrir les besoins du programme de Thessalonique.

Pour libérer l’économie et la société de nos pays européens et pour rendre possible un avenir porteur d’espoir il est impératif que la question de la dette souveraine soit traitée de manière pérenne et dans l’intérêt des peuples.

Dès son ascension au pouvoir SYRIZA a la ferme intention de placer la question globale de la dette souveraine grecque sur la table des négociations et d’en rechercher avec des partenaires des solutions dans la direction des thèses exposées ci-dessous :

a) La dette souveraine grecque, aujourd’hui à hauteur de plus de 175% du PIB, est insoutenable. Pour sortir le pays de l’impasse actuelle (qui est secondairement impasse pour les bailleurs) il est nécessaire de procéder à l’effacement de la majeure partie du montant nominal de la dette, à l’instar de ce qui c’est décidé lors de la conférence de Londres de 1953 pour la dette allemande.
b) Le remboursement de la partie restante de la dette doit se faire avec la mise en place d’une « clause de croissance », les remboursements doivent être indexés sur la croissance du pays et non pas financés par un excédent primaire artificiel, obtenu par la saignée de l’économie réelle et du peuple.
c) Un moratoire sur les intérêts, voire sur les remboursements de la dette, est nécessaire pour le redémarrage de l’économie grecque.
d) Il est nécessaire d’œuvrer pour un « New Deal Européen » où la croissance serait stimulée par des investissements publics financés par la Banque Européenne de Développement.

e) La Banque Centrale Européenne doit créer une détente par le rachat direct d’obligations des Etats-membres.

f) Il est enfin exigé que la question de la dette extorquée à la Grèce par l’Allemagne lors de l’occupation nazie (1941-1944) soit réglée. Cette dette n’a jamais été prescrite par aucun traité bilatéral ou international alors bien même que d’autres états ayants agi comme occupants pendant cette même période ont honoré leurs dettes. Cette dette est estimée, par des personnalités ayant étudié la question, être à hauteur (avec les intérêts) de 160 milliards € environ, donc une très importante proportion de la dette souveraine grecque actuelle.

Epilogue

En ayant exposé dans ce texte les grands enjeux économiques et sociaux de la vie politique grecque actuelle ainsi que la manière dont SYRIZA – Coalition de Gauche Radicale – compte les traiter au bénéfice du peuple grec, j’espère avoir rendu évidentes certaines parmi les causes pour lesquelles la politique grecque suscite à l’extérieur du pays, notamment en France et en Europe l’espoir, l’intérêt, l’inquiétude, respectivement selon le bord politique d’où ça parle.

D’après les enseignements de la psychanalyse, l’affect traduit cette part de jouissance flottante et non arrimée aux discours qui déborde le sujet et se retourne contre lui pour le frapper de l’extérieur, l’affecter voire l’affliger. Depuis la crise de 2008 les discours établis, surtout ceux se prévalant d’une approche technique des questions politiques, économiques ou sociales, se sont avérés inopérants pour traiter du réel, en Europe et dans le monde. Il n’est pas sans signification que le quotidien « Le Monde » titre aujourd’hui que, face à « l’envolée de la Gauche Radicale » en Grèce (et en Espagne) « l’Europe s’affole ». Ce titre indique le terrain sur lequel les grands intérêts politico-financiers, représentés aujourd’hui par les discours en échec, ont l’intention de livrer bataille. Ce sera sur le terrain de l’affect, dont celui par excellence (selon cette même psychanalyse) de l’angoisse, autrement dit de la peur.

Toutefois l’existence d’un nouveau projet politique, dont l’expression est en Grèce SYRIZA, permet l’engagement des citoyens en anticipation d’une perspective articulée, autrement dit ça permet l’espoir. Ceci est rendu possible par un discours qui ne se réduise pas à un simple énoncé mais qui ait avant tout un effet d’engagement individuel et collectif. Engageons-nous, européens solidaires, contre l’affolement d’un establishment européen en perte de terrain pour une alternative politique et sociale en Europe, dont on voit poindre aujourd’hui en Grèce les premières prémices.

Ce texte traduit, résume et contextualise les axes du projet politique de terme immédiat de SYRIZA,  énoncés par Alexis Tsipras en septembre 2014 pour une alternative en Grèce. Aujourd’hui  cette alternative est rendue plus que probable à très brève échéance ; ainsi ce plan d’action constitue un contrat de SYRIZA avec le peuple grec. L’opinion publique française devrait se donner les moyens pour porter un regard éclairé sur ce qui c’est passé, se passe et ce qui va de se passer en Grèce et en Europe aujourd’hui et j’espère avoir contribué à cette tâche.

Paris, le vendredi 26 décembre 2014

Manolis K, militant alternatif et solidaire, membre de SYRIZA France

GRÈCE: L’AUSTÉRITÉ NE SERT QU’À FAIRE PROGRESSER L’EXTRÊME DROITE

Nous avons le devoir de négocier ouvertement, honnêtement et sur un pied d’égalité avec nos partenaires européens. Il serait absurde que chaque camp brandisse ses armes.

Permettez-moi de clarifier une perception erronée : équilibrer les comptes publics ne passe pas nécessairement par l’austérité. Un gouvernement Syriza respectera l’obligation de la Grèce, en tant que membre de la zone euro, de maintenir un budget équilibré, et se fixera des objectifs chiffrés. Qu’un gouvernement nouvellement élu décide de lui-même de la façon d’atteindre ces objectifs est toutefois un principe démocratique fondamental.

L’austérité ne fait pas partie des traités européens ; la démocratie et le principe de la souveraineté populaire, eux, y sont inscrits. Si le peuple grec nous accorde sa confiance, mettre en œuvre notre programme économique ne sera pas un acte « unilatéral », mais une obligation démocratique.

Crise humanitaire

Faut-il s’entêter à appliquer un traitement qui aide le mal à se répandre ? L’austérité a échoué en Grèce. Elle a mis l’économie à genoux et laissé sans emploi une grande partie de la population active. Nous sommes confrontés à une crise humanitaire. Le gouvernement a promis aux créanciers du pays qu’en 2015 il réduirait un peu plus les pensions et les salaires et augmenterait les impôts. Mais ces promesses n’engagent que le gouvernement d’Antonis Samaras – qui, pour cette raison, sera désavoué par les électeurs le 25 janvier [2015].

Nous voulons faire de la Grèce un pays européen viable et démocratique. Notre manifeste, connu sous le terme de « programme de Thessalonique », contient une série de mesures à court terme, qui ne compromettent pas l’équilibre des comptes et sont destinées à atténuer la crise humanitaire dont souffre notre pays, relancer l’économie et remettre nos concitoyens au travail.

A la différence des gouvernements précédents, nous nous attaquerons à certains aspects de la société grecque qui ont contribué à perpétuer la crise. Nous tiendrons tête à l’oligarchie économique adepte de l’évasion fiscale. Nous ferons en sorte d’assurer la justice sociale et une croissance durable dans le contexte d’une économie sociale de marché.

La dette publique a atteint le chiffre astronomique de 177 % du PIB. C’est une situation non soutenable ; il est très difficile de rembourser une telle dette. Sur les prêts existants, nous demandons des conditions de remboursement qui ne provoquent pas de récession et ne précipitent pas la population dans une plus grande misère et un plus grand désespoir. Nous ne sollicitons pas de nouveaux prêts ; nous ne pouvons pas faire grandir encore la montagne de la dette.

Devoir moral

La conférence de Londres de 1953 a aidé l’Allemagne à réaliser son miracle économique d’après-guerre en déchargeant le pays du fardeau de ses erreurs passées (la Grèce figurait parmi les créanciers internationaux qui y ont contribué). L’austérité a bien entraîné un surendettement dans toute l’Europe, nous appelons donc à la tenue d’une conférence européenne sur la dette qui devra donner, de la même façon, un puissant coup d’accélérateur à la croissance. Il ne s’agit pas d’une opération visant à créer un risque moral. Il s’agit d’un devoir moral.

Nous attendons de la Banque centrale européenne elle-même qu’elle lance un vigoureux programme d’assouplissement quantitatif. Elle aurait dû le faire il y a longtemps. Ce programme devrait être d’une ampleur suffisante pour guérir la zone euro et donner tout son sens à l’expression « faire tout ce qu’il faut » pour sauver la monnaie unique.

Syriza aura besoin de temps pour transformer la Grèce. Nous sommes les seuls à pouvoir rompre avec les pratiques clientélistes et kleptomanes des élites politiques et économiques. Nous n’avons jamais été au gouvernement ; nous sommes une force neuve qui ne doit aucune allégeance au passé. Nous réaliserons les réformes dont la Grèce a réellement besoin (traduit de l’anglais par Gilles Berton).

AU CHILI, TOTAL OUVRE UNE DES PLUS GRANDES CENTRALES SOLAIRES DU MONDE

"Faisant partie des plus grandes centrales solaires marchandes du monde en exploitation, PV Salvador représente une étape importante pour l'industrie de la production d'électricité", assure Bernard Clément, directeur de l'activité et des opérations de Total Energies Nouvelles, cité dans un communiqué.

Selon lui, ce projet "apporte la preuve que le solaire peut fournir de l'énergie en grande quantité à des prix compétitifs dans des marchés entièrement non subventionnés".

70.000 foyers alimentés par la centrale

Avec ses 160.000 modules photovoltaïques à haut rendement, la centrale produira 200 GW/h et alimentera environ 70.000 foyers en électricité, détaille la société.

"PV Salvador met en valeur la technologie de pointe SunPower qui fournira une énergie solaire maximisée à prix compétitif au cours des 25 prochaines années ou plus", indique Jorg Heinemann, vice-président exécutif de SunPower.

Un projet à 200 millions de dollars

Les travaux, effectués à environ 1.300 mètres d'altitude sur un terrain de 138 hectares, ont été réalisés par la filiale solaire de Total, SunPower.

Le groupe suisse Etrion et Total possèdent respectivement 70% et 20% de la centrale, les 10% restants revenant à l'espagnol Solventus Energias Renovables, rappelle la société.

Le projet de 200 millions de dollars (175 millions d'euros) a été financé à hauteur de 70% par l'OPIC, organisme d'aide au développement du gouvernement américain, le solde étant à la charge des trois entreprises, au prorata de leur participation.

PV Salvador opérera d'abord sur une base marchande, l'électricité produite étant vendue au comptant sur le marché spot et livrée à l'un des quatre grands réseaux électriques chiliens.

En ayant recours à des robots nettoyeurs, censés être plus rapides que l'homme, les concepteurs du projet espèrent augmenter de 15% la production annuelle d'électricité tout en réduisant de 75% la consommation d'eau.

(Avec AFP)

mercredi 21 janvier 2015

LE CHILI MET FIN AU SYSTÈME ÉLECTORAL HÉRITÉ DE LA DICTATURE

PHOTO CLAUDIO BUENO,

Le texte stipule également qu'au moins 40% des candidats doivent être des femmes.

«Un des piliers fondamentaux de la dictature militaire et de ses idéologues est tombé aujourd'hui», a déclaré le député social-démocrate, Pepe Auth, à l'issue du vote.

Le nouveau système électoral entrera en vigueur à compter des élections générales de 2017 et remplacera la règlementation complexe mise en place en 1980 par le général Pinochet (1973-1990) pour asseoir la présence des partis conservateurs au Congrès, face au centre-gauche historiquement majoritaire au Chili.

L'ancien système a permis pendant des années à la droite chilienne d'être surreprésentée au Parlement, verrouillant le passage de réformes démocratiques, et encourageant la formation de deux grands groupes politiques, excluant les représentations des minorités.

La semaine dernière, lors de l'approbation de la loi par le Sénat, la présidente socialiste Michelle Bachelet a affirmé que le nouveau système électoral «permettra une meilleure représentation et l'échange de davantage d'idées au Parlement».