dimanche 28 février 2010

Chili: scènes de pillages dans des magasins de Concepcion

La police débordée a réussi difficilement a disperser à l'aide de canons à eau et de gaz lacrymogènes, des grappes de personnes qui retiraient des vivres de l'entrepôt de stockage d'un grand supermarché de la ville.
"Ce n'est pas du vol, c'est du désespoir. Nous n'avons plus rien à manger, ni à boire", criait à la volée une femme d'une trentaine d'année au reporter de la télévision publique TVN.
Les images montraient aussi de nombreuses personnes emportant des produits alimentaires ou de première nécessité, mais aussi des groupes de jeunes s'enfuyant avec des appareils électroménagers.
Selon la télévision, des scènes similaires se sont produites dans la nuit et dimanche matin en au moins un autre point de Concepcion.
La maire de Concepcion Jacqueline van Rysselberghe a mis en garde sur la situation de grave "tension sociale" dans la ville de près de 500.000 habitants, la plus touchée par le séisme qui a fait 300 morts samedi, frappant principalement le littoral au centre du Chili.
"Nous avons besoin de nourriture pour la population. Nous sommes sans approvisionnement, et si nous ne résolvons pas cela, nous allons avoir de graves problèmes de sécurité durant la nuit", a-t-elle déclaré.

Au Chili, les nombreuses répliques perturbent les opérations de secours

Alors que les opérations de secours étaient compromises par les dizaines de répliques qui se succédaient, les premiers bilans humains et matériels donnaient une idée de l'ampleur de la catastrophe. Les autorités chiliennes parlent d'au moins 300 morts, 1,5 million de personnes affectées et près de 500 000 bâtiments touchés. 90 % des victimes ont été tuées pendant leur sommeil, lorsque la secousse a ébranlé le pays, samedi à 03 h 34.
Tout au long du week-end, des répliques ont continué à faire trembler le sol. En moins de 24 heures, pas moins de 90 séismes d'une magnitude d'au moins 5 ont été recensés, dont un qui était presque aussi puissant que le tremblement de terre qui a dévasté Haïti en janvier. Cette activité sismique empêchait les équipes de secours de dégager les personnes encore bloquées sous les décombres et venir en aide aux sinistrés.
BÂTIMENTS EFFONDRÉS, ROUTES ÉVENTRÉES ET PONTS DÉTRUITS
"Il est très difficile de travailler avec ces répliques. Les appartements sont complètement détruits. Nous devons faire très attention en avançant", explique Paulo Klein, qui fait partie d'une équipe de sauveteurs dans la ville de Puerto Montt. Des centaines de milliers de personnes ont dû être évacuées des zones côtières du Pacifique, où les habitations ont été détruites par la secousse et la montée des eaux.
Si l'ensemble du pays a été touché, c'est Concepcion, deuxième ville du pays et une des plus proches de l'épicentre, qui a été la plus affectée. Au moins 100 personnes y sont mortes. Des dizaines de maisons de la ville ont été détruites, des voitures écrasées, des routes éventrées et des ponts détruits. Un bâtiment d'une dizaine d'étages, le plus grand de la ville, s'est effondré sur lui-même, bloquant une centaine de personnes à l'intérieur. L'université a été partiellement détruite après avoir pris feu.
Des scènes de pillage on également été signalées à Concepcion, obligeant la police à faire usage de canons à eau et de gaz lacrymogènes. "Ce n'est pas du vol, c'est du désespoir. Nous n'avons plus rien à manger, ni à boire", justifiait une femme filmée par la télévision publique TVN.
"CATASTROPHE AUX CONSÉQUENCES DÉVASTATRICES"
A l'heure actuelle, il est encore impossible d'évaluer les dégâts matériels au Chili. La présidente Michèle Bachelet, qui a décrété l'état de catastrophe naturelle dans 5 régions, parle d'une "catastrophe aux conséquences dévastatrices". La société américaine EQECAT, spécialisée dans la modélisation du risque, parle d'un coût de 15 à 30 milliards de dollars, soit presque 15 % du PIB chilien.
Le gouvernement chilien peut se consoler en pensant que les dommages auraient pu être bien plus importants si le pays ne respectait pas scrupuleusement les normes de construction antisismique. "L'infrastructure chilienne a résisté", a avancé le ministre des travaux publics Sergio Bitar. Et malgré les dégâts, les autorités ont demandé à la communauté internationale d'attendre avant d'envoyer de l'aide. "Une aide qui arrive sans avoir été définie n'est pas d'un grand secours", a résumé le chef de la diplomatie, Mariano Fernandez.
D'une magnitude de 8,8, le séisme est l'un des plus violents enregistrés dans le monde depuis plus de cent ans. Le tremblement de terre le plus violent de l'histoire a également enregistré au large du Chili. C'était le 22 mai 1960. Un séisme d'une magnitude de 9,5 dévastait le pays andin, tuant près de 1 655 personnes.

Après le séisme, le tsunami arrive au Japon

Un tsunami de 120 cm a atteint dimanche à 15h49 heure locale (7h49 heure française) le port de Kuji, dans la préfecture d’Iwate à environ 500 km de Tokyo, quarante minutes après un premier raz-de-marée de 90 cm, a annoncé l’Agence météorologique japonaise. L’agence n’a dans l’immédiat fait état d’aucune victime, ni de dégâts. Les autorités avaient ordonné ou conseillé que les habitants de 540.000 foyers vivant sur la côte Pacifique quittent les lieux en direction de zones surélevées.

Les premières vagues du tsunami arrivent au Japon, les précisions de Frédéric Charles (0'45")

Sur la petite île de Robinson Crusoe, à 700 km des côtes du Chili, cinq personnes sont mortes et 11 sont portées disparues. La dizaine d’archéologues sous-marins français qui se trouvait sur cette ile sont sains et saufs.

Une frégate de la marine chilienne, arrivée sur l’île il y a quelques heures pour porter secours à ses quelque 600 habitants, doit embarquer l’ensemble des archéologues pour les ramener à Santiago du Chili.

La Russie a levé son alerte pour le Kamtchatka et les Sakhaline. Des vagues mesurant jusqu’à deux mètres de haut ont atteint l’archipel des Kouriles, sur la côte pacifique de la Russie.

Séisme au Chili: le Japon se prépare à un tsunami de 3 mètres de hau

"Un tsunami de jusqu'à trois mètres de haut est attendu sur le littoral Pacifique du Japon", a déclaré lors d'une conférence de presse un responsable de l'Agence, Yasuo Sekita.
L'arrivée de la première vague est attendue dans l'archipel vers 04H00 GMT, a-t-il précisé, ajoutant que l'Agence s'apprêtait à lancer une alerte au tsunami dans toutes les régions concernées.
Le séisme de magnitude 8,8 qui a frappé samedi le Chili est l'un des plus violents depuis un siècle. Le tsunami a déjà atteint la Nouvelle-Zélande, l'Australie, la Polynésie française et Hawaii, ainsi que d'autres îles du Pacifique.

Chili / séisme: Google crée un outil

L'outil "Buscador de Personas: Terremoto en Chile", disponible en anglais ou en espagnol, est consultable sur le site chilepersonfinder.appspot.com. Il demande à l'utilisateur: "quelle est votre situation ?" et lui permet d'accéder à des rubriques intitulées "je cherche quelqu'un" ou "j'ai des informations à propos de quelqu'un".
Les utilisateurs peuvent y apporter des informations ou faire des recherches en tapant le nom de la personne dont ils demandent des nouvelles. A 18H15 GMT samedi, l'outil site disposait de 1.400 dossiers.

samedi 27 février 2010

Le Chili, une zone sismique à risques

La surface de la Terre est divisée en plaques tectoniques en mouvement les unes par rapport aux autres. Dans de nombreuses régions côtières, les plaques océaniques glissent sous les plaques continentales: c'est ce qu'on appelle la subduction.
"Les zones de subduction sont les régions du globe les plus exposées aux risques sismiques et aux tsunamis", a souligné samedi M. Armijo, spécialiste de la tectonique à l'Institut de Physique du Globe de Paris (IPGP).
"Le Chili est un laboratoire naturel unique pour étudier les tremblements de terre, la vitesse des mouvements des plaques y est très importante", ajoute ce scientifique d'origine chilienne.
Le terrible souvenir de 1960
Le pourtour du Pacifique est une zone de subductions particulièrement active sur le plan sismique. Les tremblements sont nombreux et violents du Chili à l'Alaska et du Japon à la Nouvelle-Zélande, en passant par l'Indonésie et les Philippines.
"Dans une région comme le Chili, nous savions qu'un tremblement de terre se produirait mais il est très difficile de faire des prédictions à court terme", relève M. Armijo. "Nous allons faire l'autopsie de ce séisme et déterminer s'il y avait des signes avant-coureurs", a-t-il ajouté.
C'est au Chili que s'est produit le plus fort tremblement de terre jamais enregistré en magnitude, le séisme de Valvidia, le 22 mai 1960, de magnitude 9,5. Ce séisme géant avait rompu plus de 1.000 km de contact entre les deux plaques à l'oeuvre au Chili, la plaque océanique appelée plaque Nazca, et la plaque d'Amérique du Sud. Il avait provoqué un tsunami dont les effets destructeurs ont été ressentis dans tout le Pacifique.
L'intense activité sismique du Chili résulte de la convergence très rapide, de 7 à 8 cm par an, de la plaque Nazca et de sa subduction sous la bordure ouest du continent sud-américain, provoquant une déformation marquée par la formation des Andes.
"Le centre du Chili est une zone très sensible", a relevé M. Armijo.
Presque toutes les villes côtières du Chili ont été touchées par un grand séisme au cours du siècle dernier. Le pays a une longue histoire de tsunamis associés à ces séismes, attestée depuis le XVIe siècle.

Violent séisme au Chili

Un puissant séisme de magnitude 8,8 sur l’échelle du moment a été enregistré samedi dans l’océan Pacifique, près des côtes chiliennes, a annoncé l’Institut américain de recherche géologique américaine (US Geological Survey).
Dans la capitale chilienne, Santiago, la secousse a été ressentie pendant une minute et demie et le séisme a provoqué l’effondrement de plusieurs bâtiments. Mais les coupures de téléphone et d’électricité rendent difficiles l’évaluation des dégâts. Le séisme a provoqué la mort d’au moins 47 personnes, a annoncé la présidente chilienne. Michelle Bachelet a par ailleurs appelé la population à rester calme, précisant que plusieurs régions du pays étaient privées d’électricité. Trois répliques, d’une magnitude de 6,9 pour la plus importante, ont été enregistrées au large des côtes chiliennes quelques heures après le séisme.

Au moins 6 morts dans un puissant séisme au Chili

Un puissant séisme de magnitude 8,8 (chiffre revu à la hausse) a été enregistré samedi 27 février dans l'océan Pacifique, près de la côte chilienne, ont annoncé les autorités américaines, qui ont lancé une alerte au tsunami au Chili, au Pérou et en Equateur. Au moins six personnes ont été tuées, a annoncé la président chilienne Michele Bachelet.
L'épicentre de la secousse, enregistrée à 3h34 heure locale (6h34 GMT), a été localisé à 91 km au nord de la ville chilienne de Concepcion et à 110 km au sud-ouest de Talca, également au Chili, à une profondeur de 59,4 km, selon l'observatoire américain US Geological Survey.

"Agir de façon appropriée"

Le Centre d'alerte au tsunami du Pacifique a lancé une alerte pour le Chili et le Pérou et un bulletin de vigilance pour l'Equateur. Le bulletin a été étendu également à la Colombie, au Panama, au Costa Rica et à l'Antarctique. "Un tremblement de terre de cette taille a le potentiel pour générer un tsunami qui peut frapper les côtes proches de l'épicentre en quelques minutes et les côtes plus distantes en quelques heures", souligne l'observatoire. Les autorités locales devront "agir de façon appropriée" pour répondre à ce risque, précise-t-il encore.
Pour sa part, le centre d'alerte pour la côte Ouest des Etats-Unis a estimé peu probable la survenue d'un tsunami sur les côtes des Etats-Unis ou du Canada. Il continue cependant de surveiller la situation.
Enfin, le Japon a aussi émis une alerte pour les côtes de l'océan Pacifique.

vendredi 26 février 2010

Cuba: le président élu du Chili "condamne" les conditions du décès de Zapata

Les partisans du nouveau président désigné Sebastian Piñera du Chili célèbrent, portant un buste de l'ancien criminel Augusto Pinochet, après l'élection présidentielle à Santiago, dimanche, le 17 janvier 2010. Photo AP / Jorge Saenz

A deux semaines de son investiture, le ton de Piñera, qui deviendra le premier président de droite du Chili en 20 ans, a contrasté fortement avec la prudente mesure du gouvernement sortant, de la socialiste Michelle Bachelet.
Celui-ci, par la voix du ministre à la Présidence José Antonio Viera Gallo, a dit "déplorer très profondément" la mort de Zapata à la suite d'une grève de la faim, tout en se refusant à "commencer une analyse la situation intérieure cubaine".
Dans un communiqué diffusé jeudi matin Piñera a exprimé ses condoléances à la famille de Zapata qui "a donné sa vie en défense de la démocratie et de la liberté à Cuba".
Zapata est décédé mardi à 42 ans dans un hôpital de La Havane où il avait été admis à la suite d'une grève de la faim pour protester contre ses conditions de détention.
Le futur président du Chili, issu de la droite modérée, dit "joindre sa voix à ceux qui réclament la libération immédiate des plus de 200 prisonniers politiques cubains et la fin de toute forme d'oppression politique sur l'île".
Il demande aux autorités cubaines d'enclencher "un processus de transition pacifique vers la démocratie, de rétablir l'Etat de droit et de garantir les droits de l'Homme et les libertés individuelles".
M. Piñera deviendra le 11 mars le premier président de droite au Chili après 2O ans de gouvernement de centre-gauche sans interruption depuis la fin de la dictature d'Augusto Pinochet en 1990.
Il affirme que la solidarité avec les luttes pour les droits de l'Homme, sur le continent américain et dans le monde, sera "un aspect prioritaire de la politique extérieure" de son gouvernement.

jeudi 25 février 2010

Le sommet du Groupe de Rio

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Photo José Manuel de la Maza
Plus tôt ce mardi, le groupe a convenu de s'élargir pour inclure les 15 membres de la Communauté des Caraïbes (Caricom).
« Je crois que l'ère de l'Amérique Latine et des Caraïbes ne fait que commence», a déclaré M. Calderon devant cette réunion de chefs d'État et de gouvernement. «C'est un grand privilège pour moi de pouvoir transmettre la présidence au Chili, un pays auquel nous sommes unis par une tradition de respect mutuel », a-t- il ajouté.
Dans son discours d'entrée en fonctions, la présidente chilienne Michelle Bachelet a déclaré à l'assemblée que le Chili endossait cette responsabilité à un moment qui marque un tournant pour l'histoire du monde.
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Photo José Manuel de la Maza
« La communauté internationale a abandonné l'idée du laissez- faire, l'idée que le marché est capable de s'autoréguler totalement », a déclaré Mme Bachelet. «Pour citer le poète mexicain Octavio Paz, le marché n'a ni pitié ni conscience ».
Cette région a été durement frappée par la crise économique qui s'est déclenchée sur le marché américain du prêt avant de se propager à l'ensemble de l'économie des États-Unis puis du reste du monde. Les liens économiques étroits avec les États-Unis et la déréglementation ont permis à ce phénomène de se propager rapidement dans les pays au marché ouvert.

mardi 23 février 2010

Invitation aux conférences de Sergio Grez

La conférence aura lieu : le MARDI 23 FÉVRIER 2010 à 19 heures à l'École des Hautes Études en Sciences Sociales Salle 7 – 2e étage. 105, boulevard Raspail – 75006 Paris. Mo Notre-Dame des Champs ou St-Placide. Entrée libre
La deuxième conférence aura pour thème: “Una mirada histórica a dos siglos de construcción republicana desde el Chile del Bicentenario”,  le MERCREDI 24 FÉVRIER 2010 à 19 heures à l'Auditorium de la Maison d’Amérique Latine. 217, boulevard Saint-Germain - 75007 Paris.  Mº: Solférino – Rue du Bac.  Entrée libre
Terre et Liberté pour Arauco. 2, rue Monge – 94110 Arcueil. Mél  libertadarauco@gmail.com Tél. 09 63 43 49 98
Collectif pour les Droits de l'Homme au Chili (France). Mél ddh_chili_fr@hotmail.com

jeudi 18 février 2010

Chili: Piñera revend pour 37 millions USD ses parts dans une clinique

M. Piñera possédait 10% de l'établissement et cette vente, réalisée mardi à la Bourse de Santiago, s'inscrivait dans le cadre de son processus de liquidation de ses actions avant son investiture le 11 mars, afin de désamorcer toute polémique sur d'éventuels conflits d'intérêts.
Le chef de l'Etat élu, dont la fortune est évaluée à 1,2 milliard de dollars (900 millions d'euros), a déjà engagé il y a deux semaines le processus de vente de ses actions de la compagnie aérienne chilienne LAN, numéro 1 en Amérique latine.
M. Piñera, 60 ans, détient 26% des actions de LAN, à travers les sociétés d'investissements Axxion (19%) et Santa Cecilia (7%). Leur revente pourrait générer de 1,5 milliard à 2 milliards de dollars, selon les estimations.
La vente des actions de LAN était une des promesses du candidat Piñera, issu de la droite modérée, qui s'est vu accuser par la gauche pendant la campagne d'incarner l'amalgame des pouvoirs économique et politique.
A la présentation de sa candidature en 2009, Piñera a délégué nombre de ses investissements à des fonds aveugles de gestion, dans lesquels il n'intervient plus. Mais il a décidé de conserver le contrôle du club de football Colo-Colo, dont il est copropriétaire, et de la chaîne privée Chilevision.

Dictature de Pinochet: l'enquête sur les victimes relancée au Chili


lundi 15 février 2010

Le militaire péruvien accusé d’espionnage pour le compte du Chili sera jugé par un tribunal militaire

Le président de la Cour suprême, Javier Villa Stein Photo EFE
Le président de la Cour suprême, Javier Villa Stein [profil officiel, en espagnol], a estimé que, les délits ayant été commis par un militaire en activité, la compétence de juger ce dernier revenait à un tribunal militaire [article de l’agence EFE], et que la procédure engagée devant la juridiction civile n’était pas effective en l’espèce.
L’affaire Ariza avait agité le Pérou en novembre dernier, lorsqu’il avait été révélé que ce sous-officier de l’armée de l’air péruvienne recevait de l’argent de la part d’officiers chiliens en échange d’informations relevant du secret militaire. Ces derniers, qui n’ont pas été arrêtés, seront quant à eux jugés par une juridiction ordinaire, tandis que Víctor Ariza pourrait encourir de 25 à 35 ans de prison s’il était accusé du délit de haute trahison - le plus grave dont il pourrait être inculpé. Un autre militaire, accusé d’être son complice, sera également jugé par le tribunal militaire.
Ces révélations avaient largement compliqué les relations déjà tendues entre le Chili et le Pérou, au point que le gouvernement péruvien rappelle son ambassadeur à Santiago du Chili. Les deux pays sont engagés dans une procédure devant la Cour internationale de justice (CIJ) [site officiel] de La Haye, suite à une requête du Pérou visant à établir clairement les frontières maritimes [article de Courrier International] dans le Pacifique, et maintiennent des relations diplomatiques tendues depuis la guerre qui les a opposés à la fin du XIXème siècle.

dimanche 14 février 2010

La crise favorise l'alternance politique en Amérique latine

Les Costaricains ont innové néanmoins en accordant une large victoire à la sociale-démocrate Laura Chinchilla, qui rejoint ainsi le petit club des femmes présidentes. Mais à l'échelle régionale, l'alternance qui s'est produite au Chili, avec la victoire, le 17 janvier, deSebastian Piñera, le candidat de la droite, marque plus les esprits que le Costa Rica.
Le gouverneur social-démocrate de l'Etat de Sao Paulo, José Serra, a dû analyser les résultats de la présidentielle au Chili avec des sentiments mélangés. Comme beaucoup de Brésiliens de gauche, il a passé une partie de ses années d'exil à Santiago, jusqu'au coup d'Etat du général Pinochet et il penchait probablement pour le candidat de centre gauche, Eduardo Frei. En même temps, il y aura vu le signe que l'alternance chilienne est de bon augure pour l'opposition au Brésil.
Candidat du Parti de la social-démocratie brésilienne (PSDB, opposition), M. Serra figure en tête des sondages en vue de l'élection présidentielle d'octobre, avec un net avantage sur la ministre Dilma Rousseff, que le président Luiz Inacio Lula da Silva a choisie pour lui succéder. Président de gauche, Lula mise sur la féminisation, qui a réussi à la Chilienne Michelle Bachelet, à l'Argentine Cristina Kirchner et à la Costaricaine Laura Chinchilla.
Il n'y a aucune "contamination" entre les électorats des différents pays d'Amérique latine. Chaque nation évolue au gré de ses propres circonstances. Mais l'impact de la victoire de M. Piñera sera sensible dans les scrutins prévus dans la région. D'autant que les succès économiques et sociaux du Chili, qui vient d'entrer à l'Organisation de coopération et développement économiques (OCDE), en font une référence plus forte que le Costa Rica.
L'alternance chilienne stimule les opposants qui se présenteront aux élections en Colombie (30 mai), au Venezuela (26 septembre) et au Brésil (3 octobre). Entre 2009 et 2012, la région connaîtra dix-huit scrutins présidentiels, outre des législatives décisives. Lors de la vague électorale des années 2005-2006, les urnes avaient conforté un virage à gauche ou favorisé le centre gauche. Les scrutins à venir pourraient, cette fois, leur être défavorables. La carte politique de l'Amérique latine devrait en sortir modifiée.
La crise économique mondiale de 2008 a eu des répercussions inégales en Amérique latine, mais elle a d'ores et déjà favorisé l'alternance au Salvador, au Panama, au Honduras et au Chili. Elle a privé de majorité parlementaire les présidents du Mexique et de l'Argentine. Et elle a provoqué la mise en ballottage du candidat de la coalition gouvernementale en Uruguay. Les présidents de l'Equateur et de la Bolivie ont été réélus, mais la tendance prédominante est bien celle d'un changement des équipes au pouvoir.
En 2009, la gauche a enregistré quatre victoires. Au Salvador, l'ancienne guérilla, le Front Farabundo-Marti de libération nationale (FMLN), a accédé à la présidence avec Mauricio Funes, tandis qu'en Uruguay, José Mujica, ancien guérillero tupamaro, prend ses fonctions de chef de l'Etat le 1er mars. Les présidents de l'Equateur, Rafael Correa, et de la Bolivie, Evo Morales, ont été confortablement réélus.
En revanche, au Panama, au Honduras et au Chili, l'alternance a été favorable à la droite. Et au Mexique, le Parti de la révolution démocratique (PRD, gauche) s'est effondré, surpassé par la formation dont il est issu, le Parti révolutionnaire institutionnel (PRI, centre), l'ancien parti hégémonique, qui effectue un retour en force.
Le Chili montre que la popularité du chef de l'Etat sortant - 80 % pour la Chilienne Michelle Bachelet comme pour le président brésilien - ne se transmet pas au candidat qu'il soutient. Autre leçon chilienne, les élections se jouent au centre de l'échiquier politique. M. Piñera l'a emporté, car il a convaincu une majorité d'électeurs qu'il gouvernerait au centre droit, sans ramener au pouvoir la droite conservatrice des années 1950, et encore moins les années de plomb de la dictature du général Pinochet. Au lieu de remettre en cause l'héritage laissé par le centre gauche, il a critiqué l'usure de la coalition qui gouvernait depuis vingt ans. Il s'est engagé à faire mieux, sans remettre en cause les acquis de la transition démocratique.
Selon les sondages réalisés dans 18 pays d'Amérique latine, par l'Institut Latinobarometro, basé à Santiago, les électeurs centristes sont plus nombreux (42 %) que le total des électeurs de gauche (17 %) et de droite (22%). L'électorat attend des réponses pragmatiques à ses préoccupations en matière de sécurité publique, d'emploi, de niveau de vie, de santé et d'éducation.
S'il n'y a pas de virage à droite à l'échelle de l'Amérique latine, l'alternance au Chili est une mauvaise nouvelle pour les partisans de Lula ou ceux d'Hugo Chavez. Le président vénézuélien va affronter son opposition aux législatives en septembre. Il en est de même pour le "couple présidentiel" argentin, Cristina et Nestor Kirchner, au plus bas dans les sondages.

Courriel : paranagua@lemonde.fr.

Paulo Antonio Paranagua (Service International)

Une Contribution Paranaguateuse

Elle a de (très) bon, notamment, qu’elle «favorise l’alternance politique en Amérique latine», et par exemple au Chili, où «la victoire, le 17 janvier» dernier, de Sebastian Piñera (qui s’est enrichi sous Pinochet et qui juge (dès lors) qu’avoir travaillé pour la dictature n’est «pas un crime»), «marque les esprits» et «stimule», parmi d’autres véritables démocrates, «les opposants qui se présenteront aux élections au (…) Venezuela en septembre» 2010.
Telle est du moins l’«analyse» de Paulo A. Paranagua, idéologue au «service international» duMonde, que ronge de longue date une détestation quelque peu hallucinée de tout ce qui, sous Mexico, se positionne à gauche, en général, et du président vénézuélien Hugo Chavez (à droite, sur la photo), en particulier - et qui par conséquent souligne avec insistance que «l’alternance au Chili est une mauvaise nouvelle pour les partisans (...)d’Hugo Chavez», le gros salaud, le caudillo.
Pour Paulo A. Paranagua, donc : la crise née de l’obscène voracité du capitalisme financier a pour appréciable effet qu’elle a permis l’élection, au Chili, d’un candidat qui précisément incarne ce qu’il y a de plus dégueulasse dans le capitalisme financier, puisque, répétons-le, il a fait son magot sous la dictature, s’engraissant durant que les chiens de Pinochet garrottaient l’opposant(e).
Déjà, ce n’est pas rien - mais ce n’est pas tout non plus, puisque, emporté par son enthousiasme, le propagandiste du Mondejuge que la crise a également «favorisé l’alternance au Salvador, au Panama, au Honduras».
Tu lis ça, tu ne percutes pas forcément tout de suite, hein ?
Mais, rappelle-toi, ce n’est pas (si) vieux : l’alternance, que Paulo A. Paranagua présente comme une espèce de preuve de vie démocratique (genre, c’est bien d’alterner, hein mâme Dupont, un coup à gauche, un coup à droite, et si possible, juste après, encore un ou deux coups à droite), a pris, au Honduras, la forme très particulière, le 28 juin dernier, d’un coup d’État militaire- que la communauté internationale a, bien sûr, vitement entériné, ravie du renversement de l’impertinent José Manuel Zelaya Rosales (à gauche, sur la photo), dont elle redoutait qu’il sombre dans un hugochavisme débridé, et de son remplacement par un obéissant libéral.
Et donc, Paulo A. Paranagua est si peu ému que la droite hondurienne ait putsché, que, s’oubliant, il présente son coup de force comme un épisode banal, et normal (et pas moins normal en tout cas que les élections au Salvador ou au Panama), et pour tout dire assez vivifiant de l’essor de la démocratie latino-américaine.
C’est un peu, si tu veux, comme s’il s’était réjoui, à l’automne 1973, de ce qu’une démocratique alternance ait permis à Augusto José Ramón Pinochet Ugarte de succéder (un peu vite) à Salvador Allende, alors quoi, c’est pas drôle, si ce sont toujours les mêmes qui s’accrochent au pouvoir.
Lorsqu’il évoque «l’alternance au Salvador, au Panama, au Honduras», sans plus de précision(s), comme si elle relevait dans ces trois pays d’un même sain processus, Paulo A. Paranagua efface, tranquillement, la mémoire du putsch du 28 juin 2009.
Et c’est une forme assez raffinée de désinformation - mais, curieusement, elle ne semble pas (du tout) choquer l’encoléré big boss du Monde, Éric Fottorino.

samedi 13 février 2010

LA TEXTURE DU TEMPS



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Couverture du roman De fils à fils



Un homme parle à son fils. Mais celui-ci ne l'entend pas. L'enfant vient de monter dans le bus qui doit le ramener chez sa mère. De samedi en samedi, l'histoire se répète. L'enfant s'ennuie avec cet homme qui se sent coupable de la lassitude qu'il provoque. Pourquoi ?

Un homme parle à son fils et s'interroge.

A la succession de samedis à venir, s'ajoute le souvenir des après-midi d'autrefois, les rares fois où son père venait les voir. C'est lui, se disait-il en le voyant approcher, incapable de dire : C'est mon père.

Un père parle à son fils et la narration se dédouble. Deux pères, deux fils, deux histoires, mais un seul temps : deux heures de l'après-midi. Le moment où le narrateur va chercher son fils à l'école et celui où son père surgit au milieu de l'Alameda.

L'originalité du livre réside dans sa manière de conjuguer passé et présent. Le narrateur raconte des faits qui se passent à trente ans d'intervalle, en les fondant dans un récit unique qui va toujours de l'avant. Les rôles s'inversent mais les mécanismes se reproduisent. C'est toujours le fils qu'on voit dans le père et le père qu'on voit dans le fils, comme si nous pouvions embrasser d'un seul regard l'adulte et l'enfant.

Peu de livres parviennent à faire résonner en même temps passé et présent, sans nous pousser au vertige, mais en nous faisant sentir, entre deux phrases, la texture du temps.


Bernardo Toro

Editions Stock, 2010
Collection La Bleue

mercredi 10 février 2010

Chili: Piñera dévoile son gouvernement

Un ingénieur de formation de 53 ans, homme d'affaires à succès et co-directeur d'une chaîne de grands magasins, Alfredo Moreno, a ainsi été nommé ministre des Affaires étrangères, malgré son absence d'expérience diplomatique, signe de l'impulsion commerciale internationale souhaitée par M. Piñera.
Le chef de la diplomatie a annoncé "un accent sur l'Amérique latine et les pays voisins du Chili". Felipe Larrain, un économiste de 50 ans diplômé de l'université d'Harvard, ancien consultant auprès de la Banque mondiale, du Fonds monétaire internationale, de la Banque interaméricaine de développement, a hérité du ministère de l'Economie.
Larrain a souligné "les défis très importants de retrouver la capacité de croissance et de création d'emplois". Après une quasi-décennie de solide croissance, le Chili a connu en 2009 une récession et vu son chômage grimper de 2 points à 9,7%, même si les perspectives 2010 évoquent une croissance de 5%.
Conformémement aux prévisions, l'équipe Piñera comprend aussi Joaquin Lavin, un économiste-ingénieur de formation et ex-journaliste, mais surtout chef de file de la droite ultra-conservatrice Union démocrate indépendante (UDI) et ex-conseiller du régime d'Augusto Pinochet (1973-90).
Lavin, 56 ans, était alors conseiller économique néo-libéral du dernier ministre de l'Economie de Pinochet. Il fut candidat à la présidence de la République en 1999 et 2005. Ce membre de l'influente organisation catholique conservatrice Opus Dei sera ministre de l'Education.
Parallèlement Sebastian Piñera débauche comme il l'avait laissé entendre au sein de la future opposition: Jaime Ravinet, un ex-ministre de gouvernements de centre-gauche, notamment sous Ricardo Lagos (2000-2006), devient à 63 ans ministre de la Défense.
Ravinet, issu du Parti democrate-chrétien, a annoncé quitter "avec peine" ce parti, qui avait mis un veto sur la participation au gouvernement Piñera.
Piñera, un homme d'affaires milliardaire de 60 ans, a été élu le 17 janvier au second tour de l'élection présidentielle, marquant le retour de la droite au pouvoir après 20 ans de gouvernement de centre-gauche depuis la fin de la dictature en 1990. Il a promis un gouvernement d'unité.
L'équipe de 22 ministres présentée mardi compte 13 indépendants, quatre représentants des deux partis de l'alliance de droite, et un de l'opposition.Il compte six femmes, quand la présidente socialiste sortante Michelle Bachelet avait débuté son mandat en 2006 avec une parité hommes-femmes.
Piñera, qui sera investi le 11 mars, a salué une équipe de "talents et de formations universitaires et professionnelles réelles". Le président élu, qui a récemment promis de "ne pas laisser une minute tranquille" à ses ministres, les a convoqués pour une réunion de travail mercredi "très tôt".

samedi 6 février 2010

Alain Rouquié : "Le passage de la dictature à la démocratie est long"

Il est l'auteur de nombreux essais, dont Amérique latine, introduction à l'Extrême-Occident (Points), et A l'ombre des dictatures. La démocratie en Amérique latine (Albin Michel, 380 p., 23 euros)

Quelle est votre analyse de la récente élection présidentielle au Chili, qui a ramené la droite au pouvoir ?

Michelle Bachelet, qui part avec 80 % d'opinions favorables, n'étant pas rééligible, la droite a trouvé un excellent champion en la personne de Sebastian Piñera, qui avait voté pour le non au général Pinochet lors du référendum de 1988. Cette alternance n'a rien d'inquiétant.

Vous estimez qu'au Chili "la consolidation antilibérale de la société est à l'origine de la stabilité institutionnelle". Or un libéral arrive au pouvoir...

Sebastian Piñera est un libéral en matière économique, mais la Concertation - la coalition entre le Parti socialiste et le Parti démocrate-chrétien - a poursuivi, depuis 1990, la politique économique du régime militaire. Car l'important était alors de pouvoir gouverner, et pour cela, il fallait neutraliser les milieux d'affaires qui étaient majoritairement pinochetistes.

Pinochet, au référendum, avait tout de même obtenu 44 % de oui, et le rappelait. Il avait imposé une Constitution faite sur mesure par lui et pour lui, avec une limitation des pouvoirs du président de la République, qui ne pouvait pas nommer librement les chefs de l'armée, par exemple, et avec un système électoral qui favorisait la droite. Toute une série d'"enclaves autoritaires" prolongeaient la dictature sous la démocratie. Tout cela, il a fallu le démonter. On a mis vingt ans. Maintenant, c'est à peu près fait. Alors la droite peut revenir au pouvoir sans mettre en danger la démocratie. On le voit bien à la manière dont le candidat de centre-gauche a accepté sa défaite. C'est une victoire de la Concertation que d'avoir établi une démocratie détendue, dépolarisée, consensuelle.

Que vous inspire le propos "le Chili a élu son Berlusconi" ?

Ce qui rapproche Piñera de Berlusconi, outre le fait qu'il soit multimillionnaire, c'est qu'il possède la plus grosse chaîne de télévision du pays. C'est un nouveau riche. Or, le Chili est un pays de "vieux riches", où la concentration de la richesse est très ancienne. Il a la chance de ne pas avoir d'antécédents pinochetistes, même si son frère a été ministre et s'il a beaucoup d'amis dans ce camp-là.

D'une manière plus générale, ce concept d'Amérique latine, que vous utilisez, est considéré par certains comme inopérant, liant un pays d'Amérique du Nord, le Mexique, une Amérique centrale et une Amérique du Sud...

Ce concept a des racines culturelles, linguistiques, religieuses, historiques. Mais il est vrai qu'il y a aujourd'hui deux Amériques latines. Au nord, le Mexique, l'Amérique centrale, les Caraïbes, font partie de la mouvance des Etats-Unis. L'Amérique du Sud s'éloigne de plus en plus de cet ensemble. Dans A l'ombre des dictatures, j'ai pris l'Amérique latine comme un tout pour me permettre des comparaisons.

Cela ne signifie pas que je me rallie à ce concept global. Lucien Febvre disait "L'Amérique latine est un laboratoire." L'approche régionale offre la possibilité d'analyser dans leur diversité des pays qui ont, sous certains aspects, beaucoup de points communs.

Pouvez-vous préciser ce que vous mettez dans votre terme d'"Extrême - Occident" ?

Dans le cadre de ce qu'on a appelé autrefois le tiers-monde, il y a un continent qui a été en contact, pénétré, dominé, transculturé par l'Occident, pendant plus de cinq siècles. Quand vous plantez une plante dans un terreau différent, elle peut produire des fruits différents, mais c'est toujours la même plante. C'est cela mon idée d'Extrême-Occident.

Les pays d'Amérique latine ont deux cents ans d'institutions et de normes démocratiques derrière eux. Ce n'est pas le cas de la Chine, de la plupart des pays asiatiques, des pays africains. Lorsqu'ils sont devenus indépendants, les pays d'Amérique ont adopté ce qui était la modernité occidentale, c'est-à-dire des constitutions représentatives. Certes, ils ne pouvaient pas les appliquer, mais c'était un objectif lointain et ils n'avaient pas d'autre source de légitimité.

En parlant du Venezuela et d'Hugo Chavez, vous récusez le terme de populisme...

Raymond Aron disait : "Vous, vous avez une idéologie, moi j'ai des idées." C'est un peu ce qu'on fait avec ce mot de populisme. Etre populaire, c'est bien, être populiste, c'est mal. Utiliser le mot populiste, sauf si cela correspond à une époque, à un moment codifié par l'histoire, équivaut seulement à dire "je n'aime pas ce régime". J'essaie plutôt de comprendre la situation à partir de sa genèse.

Dans l'apparition de Chavez, par exemple, il y a une histoire et une logique. Parce qu'il est militaire, parce que le système des partis, né en 1958, s'est effondré et parce que le Venezuela est un pays de rente pétrolière. Ces variables-là ont donné un type de régime. Et si on le compare aux gouvernements vénézuéliens antérieurs, dans les périodes de prospérité pétrolière, on s'aperçoit qu'ils étaient peut-être un peu plus tolérants et respectueux des institutions. Mais, dans leur rhétorique et leurs politiques sociales, le pays ressemblait beaucoup au Venezuela bolivarien.

L'Amérique latine suscite des clichés et l'exotisme politique est toujours attractif. Mais je préfère, dans un premier temps, essayer d'expliquer plutôt que de juger.

Vous citez Tocqueville : "L'Amérique du Sud ne peut supporter la démocratie"...

Les pays situés au sud du Rio Bravo, dont il parle, ont embrassé la démocratie et ne peuvent pas la faire fonctionner. C'est ce que j'ai tenté de montrer. Il y a deux grandes références dans mon livre, Tocqueville et Bolivar. Bolivar, qui est non seulement un héros mythique, mais un considérable constitutionnaliste, se demandait comment on pouvait avoir la démocratie, la stabilité politique et sociale, et un minimum de justice. Le paradoxe fondamental des débuts des Amériques indépendantes est là : il n'y a pas de citoyens, alors que le pouvoir procède de la seule souveraineté du peuple.

Selon vous, les démocraties actuelles sont "prisonnières de la dictature"...

On a beaucoup écrit sur le passage des dictatures aux démocraties dans les années 1980. Or le plus souvent, même si on se débarrasse du dictateur, on ne peut se débarrasser ni de l'armée, ni de la Constitution héritée, ni parfois du traumatisme qu'a créé la dictature, avec ses morts, ses disparus... La transition n'est pas simplement le moment où la dictature laisse la place à un régime démocratique, c'est un processus long et complexe.

Au Chili, par exemple, l'histoire officielle de l'Unité populaire et de Salvador Allende est restée pendant longtemps, sous la démocratie, celle que la dictature en avait donnée.

Dans le cas du Brésil, que vous examinez, vous dites que la Constitution de 1988, toujours en vigueur, est tournée vers le passé pour le conjurer...

Elle est inspirée par le passé parce qu'elle prend le contre-pied de ce qu'avaient fait les militaires. Elle décentralise, elle transfère des compétences aux instances fédérées, elle instaure un pouvoir judiciaire sans contrôle externe. Certains excès ont été peu à peu corrigés à partir de 1995.

Aujourd'hui le Brésil s'est inscrit dans la carte des grands pays du monde, et il est plus que jamais tourné vers l'avenir. Sa Constitution est respectée. Ainsi le président Lula, au sommet de sa popularité, s'est refusé à la modifier pour être éligible une troisième fois consécutive.

Propos recueillis par Josyane Savigneau

Chili: le président élu Piñera vend ses actions de LAN

Sa société Axxion, qui gère la plupart de ses investissements, a décidé en assemblée extraordinaire de ses actionnaires de «vendre ou céder jusqu'à la totalité des actions de LAN Airlines», a indiqué la société dans un communiqué.

M. Piñera, 60 ans, élu le 17 janvier au second tour de l'élection présidentielle, détient 26% des actions de LAN, une des plus importantes compagnies aériennes d'Amérique latine, à travers les sociétés d'investissements Axxion (19%) et Santa Cecilia (7%).

La vente des actions de Piñera dans LAN pourrait générer environ 1,5 milliard de dollars selon Fernando Barros, un conseiller juridique de Pinera, voire jusqu'à deux milliards, selon des estimations indépendantes, qui doutent que la vente puisse être réalisée dans les temps pour l'investiture.

«On parle d'une transaction de deux milliards de dollars pour les 26% (de LAN), a déclaré Luis Eduardo Escobar, un économiste chilien réputé, sur la radio Cooperativa.

«Ces chiffres sont spectaculaires, et il ne sera pas impossible, mais très difficile d'arriver à boucler l'opération d'ici au 11 mars», date de la prise de fonctions du président élu, a ajouté l'économiste.

Aux termes d'un pacte d'actionnaires, la famille Cueto, qui détient 23% de LAN à travers la société Costa Verde, a une option préférentielle pour l'achat des actions d'Axxion, avec une fenêtre de 20 jours pour se décider.

La vente des actions de LAN était une des promesses du candidat Piñera, issu de la droite modérée, qui s'est vu accuser par la gauche pendant la campagne d'incarner l'amalgame des pouvoirs économique et politique.

À la présentation de sa candidature en 2009, Piñera a délégué nombre de ses investissements à des fonds aveugles de gestion, dans lesquels il n'intervient plus. Mais le club de football Colo-Colo, dont il est copropriétaire, la chaîne privée Chilevision et les actions de LAN étaient restées sous son contrôle.

mercredi 3 février 2010

Parution du roman De fils à fils

Un homme parle à son fils et s'interroge.

A la succession de samedis à venir, s'ajoute le souvenir des après-midi d'autrefois, les rares fois où son père venait les voir. C'est lui, se disait-il en le voyant approcher, incapable de dire : C'est mon père.

Un père parle à son fils et la narration se dédouble. Deux pères, deux fils, deux histoires, mais un seul temps : deux heures de l'après-midi. Le moment où le narrateur va chercher son fils à l'école et celui où son père surgit au milieu de l'Alameda.

L'originalité du livre réside dans sa manière de conjuguer passé et présent. Le narrateur raconte des faits qui se passent à trente ans d'intervalle, en les fondant dans un récit unique qui va toujours de l'avant. Les rôles s'inversent mais les mécanismes se reproduisent. C'est toujours le fils qu'on voit dans le père et le père qu'on voit dans le fils, comme si nous pouvions embrasser d'un seul regard l'adulte et l'enfant.

Peu de livres parviennent à faire résonner en même temps passé et présent, sans nous pousser au vertige, mais en nous faisant sentir, entre deux phrases, la texture du temps.

De fils à fils roman de Bernardo Toro

Code EAN / ISBN : 9782234062665
Code HACHETTE : 5462668
Prix TTC : 18,50 €
Date de parution : 02/2010
Dimensions : 215 x 135 mm
Nombre de pages : 256
Copyright © Editions Stock, 2010

Collection : La Bleue

mardi 2 février 2010

Rencontre des Progressistes d'Amérique latine et d'Europe

a réuni une cinquantaine de délégués de partis, de fondations ou d'organisations sociales représentatives d'un ensemble très large de courants politiques en lutte sur les deux continents pour des alternatives anti-libérales, contre les règles du capitalisme, pour des transformations profondes dans tous les domaines, face à la crise systémique du capitalisme mondialisé. La solidarité avec les processus progressistes engagés en Amérique latine, ainsi qu'avec le peuple de Cuba victime d'un blocus intolérable, s'est exprimée avec force.

Une discussion collective très approfondie a porté sur plusieurs questions au centre des préoccupations des participants: mode de développement, convergences et solidarités pour de nouvelles avancées sociales et de nouveaux droits; monnaie et finance au service des peuples; alternatives au dollar et au FMI; Banque du Sud; dette et nouveaux financements pour le développement; changements climatiques et crise systémique; respect des droit des migrants contre leur criminalisation; Europe des solidarités; lutte contre la spéculation sur les terres et dans l'agriculture; coopération d'intérêt mutuel et conquête de la souveraineté alimentaire.

L'année 2010 sera marquée par le sommet des chefs d' Etat et de gouvernement Union européenne/Amérique latine et Caraïbes à Madrid. Ce sommet sera un moment politique déterminant pour le rapport Amérique latine/Europe, notamment à travers les négociations difficiles des accords d' Association. L' Union européenne, en effet, n'offre à l'Amérique latine qu'une relation structurée par le néo-libéralisme, l'ouverture des marchés, la libre circulation des capitaux, la mise en concurrence des travailleurs et des économies alors que les différences de productivité et de compétitivité sont considérables. La mise en œuvre de cette politique avec le Traité de Lisbonne en accentue encore les conséquences néfastes.

En Europe, c'est dans le cadre de ce même Traité que va s'inscrire l'énorme pression pour faire payer par les travailleurs et les peuples l'augmentation considérable des déficits et de la dette publique avec une nouvelle baisse drastique de la dépense publique et sociale.

2010 sera l'année du bicentenaire des indépendances et des luttes qui les ont permises. Les pays d'Amérique latine, qui ont engagé des politiques de changement et enregistré des avancées considérables, ont besoin d'une «deuxième indépendance». Les transformations qui sont entreprises s'inscrivent dans cette perspective et dans l'exigence d'une réponse aux attentes populaires.

Sur tous ces sujets abordés durant cette Rencontre, est apparu avec force le besoin de propositions alternatives et d'actions convergentes. L'idée d'un agenda d'action commun ou d'un cadre d'idées et d'objectifs a traduit une aspiration de tous les participants à l'unité dans l'action sur des options et des contenus politiques qui puissent contribuer réellement à des processus de transformation sociale progressiste.

Il a été souligné, en particulier, l'importance d'une ambition mondiale commune face aux défis planétaires multiples de notre période. Il n'y a pas d'alternatives nationales sans dimension et propositions de portée mondiale, zonale, régionale et locale.

La question des moyens politiques pour avancer dans cette voie a été posée à partir des conditions particulières et inédites de l'action collective dans le contexte de la mondialisation capitaliste: montrer les enjeux et les issues possibles pour combattre les sentiments d'impuissance; partir des luttes populaires réelles; travailler à des réponses et des propositions concrètes; faire converger les actions et les initiatives; élargir et diversifier le front mondial des luttes et des rassemblements populaires; transformer le rapport des forces, notamment en Europe où les luttes sociales se développent; faire de l'exigence démocratique un axe essentiel des batailles sociales et politiques; intégrer les migrants et les exclus du système capitaliste et des modes de gestion néo-libéraux comme des acteurs du mouvement social...


Les participant(e)s ont retenu quelques objectifs communs.


Un système de sécurité multilatéral pour le désarmement, fondé notamment sur la démilitarisation, l'élimination des armes de destruction massive, la recherche de la sécurité par la résolution politique des conflits, dans le respect de la Charte des Nations Unies. Le Conseil sud-américain de défense, créé au sein de l' UNASUR, constitue, dans cet esprit, un mécanisme de concertation politique et de prévention des conflits qui a déjà permis le règlement de plusieurs crises.

L'année 2010, qui verra un sommet de l'OTAN à Lisbonne contribuer à la définition d'un nouveau concept stratégique de l' Alliance, devrait être particulièrement importante pour un effort convergent des progressistes d'Amérique latine, d'Europe et du monde, en faveur d'une conception préventive et pacifique de la sécurité. Une telle conception doit exclure les politiques de force et les logiques de guerre qui caractérisent la stratégie actuelle des Etats-Unis et de l' Alliance atlantique, et rejeter en particulier l'accroissement dangereux de la présence militaire des Etats -Unis en Amérique latine, notamment dans sept bases militaires de Colombie. La Colombie, ce pays militarisé où règne l'impunité des criminels, des paramilitaires et des trafiquants, le mépris des libertés et de l' Etat de droit, constitue aujourd'hui une menace pour les processus progressistes en Amérique latine.

Une monnaie commune mondiale. La question de l'utilisation de l'argent, des finances publiques et du crédit, est au cœur des batailles politiques, économiques et sociales contre les choix néo-libéraux et le dumping social; pour de nouveaux droits, pour de véritables alternatives, pour un véritable co-développement pour les peuples, dans le combat contre la faim et la pauvreté, pour répondre à l'exigence qui monte, partout, de services publics efficaces, de politiques alternatives en termes d'emploi, de qualification, de salaires, de formation, de recherche... Et aujourd'hui, d'urgence, pour la reconstruction d'Haïti dans le respect de sa souveraineté et non dans l'occupation militaire.

La création d'une monnaie commune mondiale émancipée du dollar à partir des Droits de tirages spéciaux (DTS) du FMI, ainsi que les constructions monétaires régionales voire locales, sont au centre du projet d'une architecture financière et monétaire mondiale nouvelle avec un FMI et des institutions internationales refondées garantissant notamment de nouvelles formes de financement pour le développement au service des peuples.

L'annulation des dettes illégitimes des pays d'Amérique latine est indispensable. Une généralisation des audits sur la légalité et la légitimité de ces dettes est nécessaire. Celles des pays les plus pauvres, notamment celle d'Haïti, doivent être supprimées d'urgence.

Une politique de réforme agraire de portée internationale, pour relever le défi alimentaire du 21ème siècle. Ce nouvel ordre alimentaire mondial, basé sur l'agriculture paysanne et la pêche artisanale, sur des productions alternatives et non spéculatives, répond à l'exigence de souveraineté alimentaire des peuples.

A travers une clause de sauvegarde internationale des terres, l'interdiction de la spéculation sur les matières agricoles, la taxation des importations abusives, nous engageons des batailles concrètes dans l'objectif de politiques publiques alternatives au capitalisme.

Une citoyenneté, des droits pour les migrants. Les participants ont affirmé la nécessité de gagner, pour les migrants, les régularisations, la garantie de la dignité et des droits qui s'attachent à un statut citoyen. Les migrants doivent bénéficier de l'accès à la santé, à l'éducation, aux services sociaux et aux même droits que tous les citoyens et tous les salariés. Les politiques d'asile doivent être renforcées et les Conventions de Genève qui les protègent doivent être respectées.

Les participants ont confirmé un rejet catégorique de la honteuse directive européenne dite «directive retour». Ils ont demandé le retrait de cette directive qui s'inscrit dans la volonté de criminalisation des migrants et de refoulement des réfugiés.

Des mécanismes doivent être créés pour faciliter le transfert d'argent des migrants vers leurs familles en bannissant les commissions scandaleuses qui enrichissent des banques, et à travers des coopératives et des structures financières populaires..

Une transformation radicale des accords d'association UE / Amérique latine (et autres accords Europe / Amérique latine) s'impose d'autant plus que ces accords reproduisent et renforcent les modes de gestion néo-libéraux et les politiques d'exploitation qui sont à l'origine des causes de la pauvreté et du chômage qui poussent les populations à l' exode. Les migrants, trop souvent, se heurtent dans les pays d'accueil, aux discriminations, au racisme, à l' islamophobie...

La réduction des émissions de gaz à effet de serre et l'action contre le réchauffement climatique sont d'une importance décisive pour l'avenir en particulier devant les risques de catastrophes qui peuvent se traduire par des migrations nouvelles massives, par des exodes et des abandons de territoires.

Communiqué du PCF

Rencontre des Progressistes d'Amérique latine et d'Europe. Paris, les 29, 30 et 31 janvier 2010. Siège du Parti communiste français, Espace Niemeyer.