lundi 6 juillet 2020

VÉNÉZUÉLA. L’OPPOSANT JUAN GUAIDO ORGANISE LE CASSE DU SIÈCLE

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GUAIDONALD JUANTRUMP.
DESSIN ENEKO LAS HERAS
La justice britannique a autorisé le président [fantoche] autoproclamé du Vénézuéla à disposer des réserves d’or du pays détenues par la Banque d’Angleterre. L’institution avait refusé le transfert de 930 millions d’euros pour lutter contre le Covid-19.
Main basse sur l’or vénézuélien. Le 2 juillet, la justice britannique a autorisé l’accès aux réserves du Venezuela, déposées à la Banque d’Angleterre, à l’opposant vénézuélien Juan Guaido, autoproclamé président en 2019. Ce dernier, reconnu par le tribunal « président constitutionnel intérimaire » « sans équivoque », espère de longue date contrôler la Banque centrale vénézuélienne (BCV) et empêcher ainsi le gouvernement d’avoir accès aux actifs à l’étranger. Le juge Nigel Teare a indiqué qu’il n’était pas de « (s) on ressort » d’estimer si les nominations faites par Guaido au conseil d’administration de la BCV étaient illégales, comme l’indique la Cour suprême de Caracas. Cette décision constitue un nouveau coup de force pour paralyser Nicolas Maduro depuis l’extérieur. Faute d’y être parvenu par un coup d’État, la violence, le blocus, la pénurie et l’inflation, le durcissement des sanctions, l’envoi de barbouzes ou le déploiement de l’armada américaine en mer des Caraïbes. Au moment où Donald Trump se dit prêt à discuter avec le président Maduro, Londres, dont la banque retient 15 % des réserves d’or vénézuélien, choisit de donner les clés du coffre à l’opposition. Le Royaume-Uni n’est pas à un paradoxe prêt. S’il permet à Juan Guaido de disposer des fonds, il reconnaît toujours officiellement l’ambassadeur du Vénézuéla nommé par les autorités chavistes.

Cet arrêté intervient suite au contentieux qui oppose la Banque d’Angleterre à l’administration vénézuélienne, qui souffre déjà des mesures de rétorsion américaines qui entravent presque complètement l’accès aux marchés financiers. En janvier, le président de la BCV, Calixto Ortega, et le ministre de l’Économie, Simon Zerpa, s’étaient rendus à Londres pour demander la restitution de l’or. Refus catégorique. Pourtant, pour faire face au Covid-19, et suite aux refus de prêts du Fonds monétaire international, Caracas avait tenté la triangulation en formulant une demande de transfert de 930 millions d’euros des réserves d’or vers un fonds des Nations unies. Il entendait ainsi parer aux accusations de pillage des ressources. Après une nouvelle fin de non-recevoir, Caracas intente une action en justice.

Éviter de voir l’or national détourné par la droite


La décision britannique, susceptible de faire jurisprudence, pourrait également servir à solder le litige qui oppose la Deutsche Bank et Citibank au gouvernement vénézuélien. En 2019, les banques allemande et américaine avaient pris le contrôle d’environ 1,2 milliard d’euros suite au non-remboursement des fonds empruntés via un « swap or », une opération financière où le précieux métal sert de garantie à un prêt. Le conseil d’administration de la Banque centrale du Venezuela, nommé par le gouvernement légal, a déclaré qu’il ferait appel de la décision britannique afin d’éviter de voir l’or national détourné par la droite.

L’accès aux actifs à l’étranger est une bataille de longue date. En janvier 2019, Juan Guaido annonçait prendre le contrôle des titres dont dispose la République hors de ses frontières avec le soutien d’une quarantaine de pays afin, disait-il, d’«empêcher qu’au moment de sa sortie (…) l’usurpateur et sa bande (le pouvoir légal – NDLR) cherchent à “gratter les fonds de tiroir” ». Dans la foulée, Washington annonçait de nouvelles sanctions contre la compagnie pétrolière nationale PDVSA, accusée par le Trésor américain d’être un « véhicule de corruption ». Si la transparence fait défaut, le camp Guaido n’est pas exempt de critiques, alors que des soupçons de corruption pèsent sur neuf députés proches de Juan Guaido. Ces derniers seraient intervenus en faveur d’un chef d’entreprise colombien lié à une affaire de blanchiment d’argent dans le programme « Clap », créé par le gouvernement de Nicolas Maduro pour fournir de la nourriture à bas prix aux plus pauvres. Un scandale qui avait prouvé, s’il en était encore besoin, que les préoccupations de l’opposition étaient tout sauf humanitaires. Juan Guaido, lui-même, est mis en cause dans ses déclarations de patrimoine et pour 91 voyages hors des frontières vénézuéliennes réalisés grâce à des fonds étrangers.