mercredi 8 juillet 2020

FRANCE : DES FÉMINISTES MANIFESTENT CONTRE LES NOMINATIONS DE GÉRALD DARMANIN ET ERIC DUPOND-MORETTI

[ Cliquez sur l'image pour l'agrandir ]  
PHOTO  UNE DE LIBÉRATION
Au lendemain de la nomination de Gérald Darmanin comme ministre de l’Intérieur et d’Eric Dupond-Moretti en tant que garde des Sceaux, le collectif #NousToutes a organisé un rassemblement pour "enterrer la Grande Cause du quinquennat" qu'était censée être l'égalité entre les femmes et les hommes.
LES FEMEN ONT MANIFESTÉ DEVANT L'ELYSÉE
«Remaniement de la honte ! », répètent à tue-tête les manifestantes réunies ce mardi 7 juillet, devant l'église de la Madeleine, à Paris. Elles ont été une centaine à répondre à l'appel du collectif #Noustoutes, qui souhaitait ainsi dénoncer les nominations de Gérald Darmanin, visé par une enquête pour viol, comme ministre de l'Intérieur et celle d'Eric Dupond-Moretti, nouveau ministre de la Justice, très critique du mouvement #MeToo.


CAPTURE D'ÉCRAN
La place de la Madeleine a rapidement été couverte d'une marée noire en raison du dress code choisi par les manifestantes. Ces dernières ont décidé de mettre en scène un enterrement, celui de la "grande cause du quinquennat", qu'était censée être, selon les promesses d'Emmanuel Macron, l'égalité femmes-hommes. Pour cette cérémonie d'adieu, deux hommes, cercueil en carton en main barré de l'inscription "Grande cause du quinquennat", montent les escaliers de l'église de la Madeleine. Sur leurs pancartes, on peut lire "Darmanin, accusé de viol" et "Eric Dupond-Moretti, antiféministe". Puis, dix jeunes femmes en deuil déposent des roses blanches.

« C'est cracher à la figure des victimes »


Quand elle a appris que ces deux hommes étaient nommés à de tels postes, Emma a "pleuré toute la soirée" parce qu'elle a été "victime de viol et que voir ça, ce n’est pas possible", confie-t-elle aux Inrockuptibles. Pour elle,"c'est juste cracher à la figure des victimes". La jeune femme est loin d'être la seule à estimer que ce remaniement est une insulte aux femmes victimes de violences sexuelles. Comme elle, Léna, militante de 24 ans, a "pleuré de rage", avant de "préparer les slogans".


PHOTO IRÈNE AHMADI
« La France, au moment de #Metoo avait déjà un wagon de retard et là on voit qu’en fait, elle a tout le train de retard... On est en train de banaliser les violences sexuelles et sexistes et c’est ça qui produit la culture du viol», déplore de son côté Laura qui estime que « lutter contre les violences sexistes et sexuelles, ce n'est pas juste porter un petit badge qu'on met le 8 mars [Journée internationale des droits des femmes, ndlr] et le 25 novembre [Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes, ndlr] - pour faire joli ». Si elle a participé à l'organisation de ce rassemblement, c'est avant tout « une façon de réagir et de dire que le gouvernement ne peut pas banaliser les violences sans qu'il y ait de réactions en face. À chaque fois que le gouvernement bafouera le droit des femmes, nous serons là », assure la jeune femme, mégaphone en main.

« On continuera à se battre autant qu'il le faudra »


Plus tôt dans la journée, d'autres militantes avaient manifesté devant le Ministère de l’Intérieur. Si l'appel pour l'enterrement symbolique a été lancé par #Noustoutes, plusieurs collectifs étaient présents sur les pavés de la place de la Madeleine. Parmi eux : Osez le féminisme, On Arrête Toutes, ou encore des "colleuses". Susie, 67 ans, est membre d'On Arrête Toutes. Cette femme, qui milite depuis cinquante ans est venue aujourd'hui "parce qu'[elle] se met à la place des victimes" et craint, comme d'autres, que porter plainte en cas d'agression sexuelle ou de viol ne soit encore plus compliqué que ça ne l'était déjà. « La France à l’ère de #Metoo a réussi un doublé fantastique en nommant ces deux ministres », ironise-t-elle, amère.

Si la colère et l'inquiétude sont palpables, les manifestantes ne veulent pas se laisser abattre. Comme Léna, pour qui « la nomination de Darmanin et de Dupond-Moretti s'inscrit dans la continuité de tout ce que l’on craint », mais qui assure qu'elle « continuera à se battre autant qu’il le faudra. » Pour elle, l'histoire n'est pas finie. « D'autres rassemblements auront lieu. »