jeudi 10 décembre 2009

Un milliardaire de droite donné favori à l'élection au Chili

Photo Reuters / Ivan Alvarado
Portraits de deux candidats à la présidentielle chilienne Eduardo Frei, 67 ans, ancien président de centre gauche du pays, et Sebastian Pinera (à gauche), 60 ans, un richissime homme d'affaires de droite. Ce dernier est donné favori dimanche et sa probable victoire irait à contre-courant de la domination de la gauche en Amérique du Sud.
Sa victoire mettrait aussi un terme à vingt ans de pouvoir du centre gauche au Chili, qui peut se prévaloir de l'économie la plus stable de la région.
Toutefois, l'arrivée au pouvoir de cet homme de 60 ans, diplômé de Harvard, ne devrait pas se traduire par une inflexion notable de la politique dans ce pays, premier producteur mondial de cuivre et modèle de prudence en matière de gouvernance économique.
Sebastian Pinera, finaliste lors de la dernière présidentielle, devrait arriver en tête sur ses quatre concurrents dimanche soir, probablement devant l'ancien président de centre gauche Eduardo Frei.
Personne ne s'attend à ce qu'un candidat réussisse à franchir la barre des 50%, et le second tour, le 17 janvier, sera vraisemblablement serré, même si Sebastian Pinera est donné vainqueur par les sondages.
Le candidat de la droite a promis de créer un million d'emplois et d'obtenir un taux de croissance de six pour cent par an par le biais d'avantages fiscaux et d'une réforme du droit du travail.
Il s'est aussi engagé à augmenter l'efficacité du géant minier Codelco, qui appartient à l'Etat, alors que l'économie chilienne émerge de sa première récession en une décennie.
"Si nous faisons les mêmes choses que nous faisons ces vingt dernières années, nous aboutirons au même résultat", fait valoir Sebastian Pinera dans les derniers jours de campagne. "Donnez-nous l'occasion d'améliorer les choses".
JOUER LES TRUBLIONS
Ses détracteurs l'accusent de vouloir gérer le Chili comme un homme d'affaires motivé par l'appât du gain. Ils anticipent aussi un possible conflit d'intérêts pour cet homme à l'immense fortune, qui possède des parts dans des sociétés comme la compagnie aérienne LAN, l'une des plus grandes d'Amérique latine.
Eduardo Frei, qui est âgé de 67 ans, a dirigé le Chili de 1994 à 2000. Il s'est engagé à maintenir les programmes sociaux lancés par la présidente sortante Michelle Bachelet, très populaire mais qui ne peut pas briguer un nouveau mandat consécutif.
Il a tenté, mais sans succès, de surfer sur le taux popularité de 77% de l'actuel chef de l'Etat en raison des querelles intestines et des défections qui ont affaibli la coalition de centre gauche au pouvoir formée dans les années 1980 pour combattre la dictature (1973-90) du général Augusto Pinochet.
"Je continuerai sur la voie ouverte par Michelle Bachelet", affirme l'ancien chef de l'Etat dont le mandat a été terni par un chômage en flèche. "Nous incarnons la continuité".
La droite n'a pas remporté d'élections depuis un demi-siècle au Chili, un pays de 16 millions d'habitants qui compte l'un des niveaux de vie les plus élevés d'Amérique latine si l'on s'en tient à l'indice de l'Onu du développement humain.
Marco Enriquez-Ominami, qui se présente sans étiquette, figure en troisième position d'après les sondages et risque de jouer les trublions en mordant sur l'électorat de gauche d'Eduardo Frei et en attirant les déçus des partis traditionnels.
Cet homme de 36 ans, ancien producteur de cinéma, n'hésite pas à traiter ses concurrents de "dinosaures (...) qui ont opéré un kidnapping sur la démocratie". Il a repoussé des offres d'accord avec la gauche pour battre Sebastian Pinera. Le report des voix de ses électeurs dimanche risque d'être déterminant.
Aux législatives, qui se tiendront aussi dimanche, la gauche devrait en revanche conserver une petite majorité aux deux chambres du Congrès. Cela signifie que le candidat de la droite devra composer avec ses adversaires pour faire adopter sa politique en cas de victoire à la présidentielle.