mercredi 8 février 2012

EX-JOURNALISTE VEDETTE DE TVN COMPLICE DE DISSIMULATION DE CRIMES SOUS LA DICTATURE

Carlos Araya Silva, ancien animateur d’une radio locale et propriétaire d’un journal à San Antonio, délateur des opposants à la dictature militaire suite au coup d’état, est devenu ami personnel du général Manuel Contreras, chef de la répression sous Pinochet. Grâce à ce puissant appui il a participé lui-même à des tortures à la caserne Tejas Verdes, et il a été promu « journaliste », alors qu’il n’a pas conclu ses études secondaires.
JULIO LOPEZ BLANCO, LE VISAGE DE TVN SOUS PINOCHET
Introduit par Contreras à TVN, la chaîne de télévision nationale, il y a fait équipe avec Julio López Blanco, alors journaliste vedette de la chaîne et conducteur du Journal télévisé de 20 heures, diffusé chaque jour dans tout le pays. Ils ont joué un rôle central dans la communication de la dictature, notamment aux tâches de désinformation, lorsqu’il s’agissait de maquiller des crimes d'opposants.

Les faits remontent au 17 novembre 1975, quand à la rue Bío Bío de la capitale sont morts un militaire et un militant du MIR, Roberto Gallardo Moreno. Le lendemain, les autres membres de la famille Gallardo ont été arrêtés à leurs domiciles et conduits au quartier d’investigations de rue Général Mackenna, où ils ont été interrogés et torturés.
A l'aube du 19 novembre, quelques membres de la famille ont été libérés, à l'exception des victimes, qui ont été emmenées à Villa Grimaldi, centre de tortures de la DINA.
MANUEL CONTRERAS SEPÚLVEDA, MARCELO MORÉN BRITO ET FRANCISCO FERRER LIMA. DES OFFICIERS DE L’ARMÉE CHILIENNE, MEMBRES DES BRIGADES D’EXTERMINATION DE LA POLICE POLITIQUE DE PINOCHET.
MIGUEL KRASSNOFF MARTCHENKO, BASCLAY ZAPATA, ET ROLF WENDEROTH POZO. D’UNE CRUAUTÉ MALADIVE ENVERS DES PRISONNIERS SANS DÉFENSE, ILS ONT TORTURÉ  À  MORT DES FEMMES ENCEINTE ET DES MINEURS.
Le matin du 19 novembre, madame Ester Torres a été arrêtée avec trois de ses enfants, Renato, Mauricio et Francisco Javier Ganga, par les agents de la DINA qui cherchaient son fils aîné, Luis Andrés Ganga. Ils ont été aussi conduits à la Villa Grimaldi.
Suite aux interrogatoires sous tourments, les agents ont obtenu l'endroit où se trouvait Luis Andrés Ganga, qui a été appréhendé des moments plus tard et conduit à cette enceinte, où il a été à son tour cruellement torturé.

Des témoins qui se trouvaient alors arrêtés à la Villa Grimaldi ont déclaré que ce fut la pire de toutes les nuits. Ils ont décrit un grand mouvement de voitures, et ils ont entendu les agents exigeant de l'eau bouillante et de l’huile chaude, et les cris de lamentation des victimes, hommes et femmes, torturés jusqu’à la mort par les sbires.
Le lendemain, les témoins ont vu dans la cour de Villa Grimaldi quelques cadavres sur le sol, et dans une pièce deux femmes dans un état critique suite aux atroces supplices. Catalina Gallardo avait eu les yeux arrachés, et Mónica Pacheco avait perdu son fœtus de trois mois. 

Dans l'après-midi du 19 novembre, un communiqué de presse officiel du gouvernement a rendu compte d’un « affrontement » dans les hauteurs de Rinconada de Maipú, durant lequel seraient morts Alberto Recaredo Gallardo Pacheco, Catalina Ester Gallardo Moreno, Mónica del Carmen Pacheco Sanchez, Luis Andrés Ganga, en plus de Pedro Cortés et Manuel Reyes.
JULIO LOPEZ BLANCO, JOURNALISTE VEDETTE DE LA CHAÎNE DE TV NATIONALE ET PUIS DE MEGAVISION. CONNU COMME DÉLATEUR D’OPPOSANTS  À  LA DICTATURE, IL A ÉTÉ UN TRÈS PROCHE COLLABORATEUR DE LA DINA ET PARTICIPÉ À PLUSIEURS MISES EN SCÈNE MÉDIATIQUES ARRANGÉES PAR LES APPAREILS DE SECURITÉ. IL A FAIT L’OBJET D’UNE SUSPENSION PAR L’ORDRE DES JOURNALISTES.
Ce communiqué faisait partie du montage orchestré par la DINA avec quelques journalistes et destiné à cacher les faits : un groupe d’opposants désarmés capturés et cruellement achevés par les atroces tortures infligées à Villa Grimaldi.

Le journaliste Julio López Blanco, en duo avec Carlos Roberto Araya Silva, ont été « sur le terrain », et ont filmé pour le journal télévisé les lieux de « l’affrontement » entre les agents de sécurité et les « terroristes ». Ils ont montré des douilles sur le sol, et une caisse de munitions. 

Ils ont parlé d’un violent affrontement dans les coteaux de Rinconada de Maipú, et d’une fusillade de plus de trente minutes entre les forces de la DINA, d’Investigations, et un groupe de subversifs fortement armé barricadé dans ces hauteurs. Six « extrémistes » sont morts dans l’opération, et l'un d'eux a pris la fuite.
MANFREDO MAYOL DURÁN, JOURNALISTE, EX DIRECTEUR DE LA TÉLÉVISION NATIONALE SOUS PINOCHET, ÉTROIT COLLABORATEUR DE L’APPAREIL DE COMMUNICATIONS DE LA DICTATURE. TRÈS LIÉ À LA DROITE AU POUVOIR, IL EXERCE COMME PROFESSEUR DANS UNE UNIVERSITÉ PRIVÉE. IL A ÉTÉ AUSSI SANCTIONNÉ PAR UNE MESURE DISCIPLINAIRE DE L’ORDRE NATIONAL DES JOURNALISTES.
Des années après, suite aux plaintes des familles et des témoins qui ont peu à peu osé déclarer lors des longues enquêtes, la vérité est venue s’imposer : le meurtre multiple s'est produit le 19 novembre, le même jour de la diffusion du montage dans la presse et la télévision, les corps ont été transportés par la DINA depuis Villa Grimaldi, tout comme la scénographie de « l’affrontement » et les journalistes pour le couvrir.

En février 2006, ont été inculpés pour ces crimes Manuel Contreras Sepúlveda, le chef de la DINA, et ses lieutenants Marcelo Morén Brito, Miguel Krassnoff Martchenko, Basclay Zapata, Francisco Ferrer Lima et Rolf Wenderoth Pozo, tous de l'armée, en qualité de meurtriers.

Dans une procédure extrêmement rare, le Tribunal d'éthique et discipline des journalistes du Chili a pris en 2006 et 2007 des sanctions contre plusieurs journalistes impliqués dans des opérations de manipulation et désinformation au profit de la dictature. Des mesures qui vont de la suspension temporelle et la censure pour les journalistes Claudio Sanchez et Julio López Blanco, Vicente Pérez Zurita et Manfredo Mayol Durán, jusqu’à la radiation de l’ordre pour Roberto Araya Silva, agent de la Dina et faux journaliste. Des excuses publiques aux familles des assassinés ont été aussi prononcées lors d’une cérémonie publique.