lundi 18 mai 2020

ASSASSINAT DE NARUMI KUROSAKI : L’ENQUÊTE RELANCÉE PAR L’EXTRADITION DE ZEPEDA

NICOLAS ZEPEDA, 29 ANS, EST ACCUSÉ PAR LA POLICE FRANÇAISE
D’AVOIR ASSASSINÉ SON EX-COMPAGNE NARUMI KUROSAKI,
PUIS DE S’ÊTRE DÉBARRASSÉ DU CORPS.
PHOTO AFP
Le Chili a validé ce lundi 18 mai 2020 l’extradition de Nicolas Zepeda. Le suspect de l’assassinat de Narumi Kurosaki, dont le corps reste introuvable, va être livré à la justice française, et à nouveau interrogé par une juge d’instruction de Besançon. Après trois ans d’inertie, l’espoir d’élucider cette sombre affaire renaît.
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Va-t-on enfin savoir ? Va-t-on enfin comprendre ? Trois ans et demi après la brutale disparition de Narumi Kurosaki du campus de la Bouloie, à Besançon, l’espoir d’élucider ce que la police française considère comme un assassinat vient de renaître de manière spectaculaire.

Transfert imminent en France

La Cour Suprême de Santiago a rejeté ce lundi 18 mai l’appel de Nicolas Zepeda. La décision d’extrader le suspect chilien vers la France - prononcée en première instance le 2 avril dernier - est désormais définitive. Un tournant majeur pour cette enquête au long cours, écartelée sur trois continents différents.

Malgré un mandat d’arrêt international émis à son encontre fin 2016, Zepeda jouissait jusqu’alors d’une liberté quasi-totale dans son pays natal. Sa vie vient de basculer de la lumière à l’ombre. Ce fils de bonne famille va être transféré par avion jusqu’à Paris, puis conduit sous bonne escorte à Besançon. Il y sera prochainement interrogé par une juge d’instruction, en vue de sa mise en examen.

Un procès à Besançon en sa présence


PHOTO WILLY GRAFF 
Parlera-t-il ? Craquera-t-il ? Jusqu’à présent, Nicolas Zepeda-Contreras a adopté deux stratégies successives. Dès son retour au Chili, l’ex petit-ami de Narumi avait d’abord remis un texte aux autorités sud-américaines, où il détaillait une version jugée peu crédible de son ultime nuit passée avec la victime. Face à une délégation bisontine venue assister à son interrogatoire, en avril 2019 à Santiago, face à la Cour Suprême du Chili, ces dernières semaines, et face aux nombreux médias qui le traquent depuis trois ans, Zepeda a ensuite fait varier son plan, en optant pour le silence.

En l’absence de corps de la victime, l’extradition avait longtemps semblé impossible. La solidité de l’enquête réalisée par la PJ de Besançon, couplée à un contexte social et politique très particulier au Chili, a donc rebattu les cartes. À l’abri de ses frontières, Nicolas Zepeda se savait hors de portée de la justice française. Ce n’est plus le cas : un procès se tiendra à Besançon, probablement en 2021.

Un soulagement pour la famille de Narumi


En cas de renvoi devant la cour d’assise pour assassinat, Zepeda encourrait la réclusion criminelle à perpétuité, une peine maximale qui pourrait l’inciter à retrouver la parole et la mémoire… C’est en tout cas ce qu’espèrent les proches de Narumi, piégés dans un deuil impossible. La famille de Narumi veut connaître la vérité.

Dans une lettre poignante transmise à la Cour Suprême du Chili, Taeko Kurosaki, la mère de l’étudiante disparue, ne cachait pas sa « haine » à l’égard de Nicolas Zepeda, tout en soutenant de tout son cœur la demande d’extradition. « Je prie pour que Nicolas soit jugé en France, je donnerais ma vie pour ça. Nous ne pardonnerons jamais à Nicolas, qui nous a pris la vie de Narumi et celle de toute la famille », écrivait notamment la maman de Narumi, pour qui l’implication du suspect ne fait aucun doute.

"Une avancée majeure" selon le procureur de Besançon


LE PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE, ETIENNE MANTEAUX
PHOTO L'EST RÉPUBLICAIN 
Le procureur de la République, Etienne Manteaux, ne cachait pas sa "profonde satisfaction" ce lundi 18 mai en apprenant la décision en appel de la Cour Suprême. "C'est une très grande nouvelle, un grand soulagement pour la justice avec un grand J. Compte-tenu de l'importance des charges qui pèsent sur Monsieur Zepeda, il était difficile d'imaginer un procès sans sa présence dans le box des accusés", explique le magistrat.

"Mais avant tout, l'instruction va pouvoir se poursuivre. Il sera déféré puis présenté à un juge d'instruction. Je ne sais pas quelle sera sa stratégie de défense, mais s'il admettait être l'auteur des faits, peut-être se décidera-t-il à parler et à révéler l'endroit du corps de Narumi ?", espère Etienne Manteaux. "Cette extradition est en tout cas une avancée majeure", conclut le procureur.