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Ronald Reagan président républicain de 1981 à 1989 a AGRÉE le règne de « l’ultralibéralisme » des chicago boys au Chili, puis il a négocié une transition politique, avec l’opposition modérée |
Après la Tunisie et l'Égypte, la leçon risque de servir ailleurs dans le monde arabe. M. Obama, qui se voit lui-même «du bon côté de l'Histoire», a appelé mardi ses alliés dans la région à s'inspirer de l'exemple égyptien en engageant des réformes politiques sans attendre de se les voir arracher par la rue.
Le renversement du dictateur indonésien Suharto en 1998 est particulièrement examiné à Washington, parce que l'Indonésie est un pays musulman comme l'Égypte et que son évolution démocratique pourrait servir d'exemple au Caire.
Barack Obama, qui a passé une partie de son enfance en Indonésie, a salué lors d'un déplacement à Jakarta en novembre dernier l'équilibre des pouvoirs entre la présidence et le parlement ainsi que l'émergence de la société civile dans ce pays.
Le parallèle est utile «tant qu'on garde à l'esprit que l'Égypte n'est pas l'Indonésie ni l'Iran», tempère le politologue Thomas Carothers, de l'institut Carnegie Endowment for International Peace.
Un haut responsable de l'administration précise d'ailleurs que les exemples les plus utiles à ses yeux sont ceux des bouleversements politiques intervenus à la fin des années 1980 aux Philippines, en Corée du Sud et au Chili, trois pays qui ont maintenu leur alliance avec les États-Unis.
Aux Philippines, comme en Égypte, une alliance entre civils et militaires a mis fin à la dictature corrompue de Ferdinand Marcos, remplacée depuis par un système démocratique.
Au Chili, la pression populaire a forcé Augusto Pinochet à organiser en 1988 un référendum qui a été le début d'un processus électoral démocratique réussi dans un pays qui était considéré comme la pire dictature d'Amérique latine.
Et en Corée du Sud, des manifestations ont renversé la dictature militaire qui a dû se résoudre à organiser des élections.
Washington se penche également sur la transition post-communiste intervenue en Europe centrale, notamment en Pologne sous l'influence du syndicat Solidarité, et en Tchécoslovaquie sous la houlette de Vaclav Havel.
Les experts américains savent qu'une transition politique est souvent semée d'embûches. Elle a d'autant plus de chances de réussir qu'elle associe le plus grand nombre possible de tendances politiques.
En Égypte, cela signifie que le mouvement islamiste des Frères musulmans doit participer à la transition, même si son arrivée éventuelle au pouvoir fait partie des cauchemars de Washington.
«L'important, c'est d'empêcher qu'une tendance politique ne se sente exclue du processus. Autrement, on risque de se retrouver confronté à une opposition radicale», avertit un haut fonctionnaire américain.
L'Histoire montre aussi qu'il est préférable dans un premier temps de «limiter l'ampleur des changements», ajoute ce responsable, qui dit redouter que l'unité nationale ne se brise sur une évolution trop rapide de la société.
Il manque à l'Égypte un ingrédient présent dans certaines révolutions réussies: un dirigeant charismatique, comme Corazon Aquino aux Philippines. Mais pour M. Carothers, même si une telle personnalité peut servir «de colle socio-politique», son absence n'est pas rédhibitoire, comme le montre l'exemple du Chili.