“Nos adversaires se sont trompés : la décision de La Haye a uni l’Amérique centrale.” C’est ce qu’avait dit en 2007 le président du Honduras, Manuel Zelaya, alors bien installé à son poste [il a été renversé par un coup d’Etat le 28 juin dernier] en apprenant que la Cour internationale de justice (CIJ) avait résolu le différend territorial et maritime entre son pays et le Nicaragua. Dans un arrêt digne du roi Salomon, le principal organe judiciaire des Nations unies avait accordé au Honduras la souveraineté qu’il réclamait sur quatre îles des Caraïbes (Bobel Cay, South Cay, Savanna Cay et Port Royal Cay). En traçant par la suite une nouvelle ligne de délimitation à partir du littoral de chacun des pays, les juges avaient donné raison aux deux pays. Une fois abandonnés les tracés des 15e et 17e parallèles – défendus, respectivement, par Tegucigalpa et Managua –, la décision a satisfait les deux capitales. Grâce à la Cour, un grave problème régional venait d’être désamorcé, sans entamer le prestige d’aucune des deux parties.
Actuellement, quatre affaires latino-américaines impliquant sept pays sont en attente de jugement à La Haye : le Nicaragua contre la Colombie, l’Equateur contre la Colombie, l’Argentine contre l’Uruguay et le Pérou contre le Chili. Deux autres différends ont été résolus récemment. La CIJ règle des contentieux depuis plus de soixante ans, alors pourquoi ce regain d’intérêt pour son action sur un continent enclin aux heurts diplomatiques pour des questions de frontières ? Pour le diplomate mexicain Gabriel Rosenzweig, le simple fait de recourir à la cour des Nations unies est une forme de victoire pour les plaignants. “Le plus difficile, explique-t-il, c’est la négociation politique interne qui précède. Une fois épuisée la voie diplomatique bilatérale, les pays doivent convenir de respecter la décision des juges. Et c’est ce mécanisme qui légitime les dirigeants face à l’opinion publique. Ils en sortent renforcés et sauvent la face, même s’ils n’obtiennent pas entièrement gain de cause.”
Des jugements dignes du Roi Salomon
Dans certains contentieux, comme celui qui opposait jusqu’au 13 juillet dernier le Costa Rica au Nicaragua, les bénéfices des jugements de Salomon de la CIJ semblent évidents. En vertu de l’arrêt de la CIJ, le Costa Rica aura le droit de libre navigation sur le fleuve San Juan, qui marque la frontière entre les deux pays. Quant au Nicaragua, il conserve sa souveraineté sur le fleuve et pourra inspecter les navires et les passagers aux postes de contrôle situés le long du San Juan. Managua n’écarte certes pas l’idée de revenir devant les mêmes juges si “l’accord ne fonctionne pas sur le terrain”, mais le contentieux a été réglé de façon satisfaisante.
Le Nicaragua a une autre affaire en suspens : celle qui l’oppose à la Colombie et qui concerne la frontière maritime et territoriale dans la mer des Caraïbes. La CIJ s’est déclarée compétente [le 13 décembre 2007] pour se prononcer sur le litige, et elle a déjà jugé que les îles de San Andrés, Providencia et Santa Catalina [réclamées depuis les années 1980 par le Nicaragua] appartenaient à la Colombie en vertu du traité Bárcenas-Esguerra de 1928. Reste à décider à qui appartiennent les autres formations maritimes de l’archipel de San Andrés.
De plus en plus de conflits à caractère écologique
Les conflits concernant des frontières terrestres sont parfois beaucoup plus épineux. Comme celui qui opposait l’Equateur à la Colombie, au sujet de l’épandage aérien d’herbicides toxiques sur les plantations de coca à la frontière colombienne. Personne ne conteste la lutte contre le narcotrafic et contre les plantations illicites situées dans la zone frontière. Mais l’amabilité s’arrête là. Quito exige “l’arrêt immédiat des fumigations” et demande également que soit établie une frange large de 10 kilomètres [interdite à la fumigation] le long de la frontière. Les autorités équatoriennes cherchent ainsi à éviter que les fumigations atteignent, grâce aux vents, le territoire de l’Equateur (ce que les scientifiques appellent l’“effet de dérive”). Mais ce qui mine réellement les relations diplomatiques de ces deux voisins qui se sont longtemps très bien entendus, c’est ce qu’on pourrait appeler le “facteur guérilla” de l’affaire. Le gouvernement de Bogotá affirme que les plantations illicites sont contrôlées par la guérilla des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC). La situation est devenue encore plus tendue en mars 2008 après le bombardement [par l’armée colombienne] d’un camp clandestin de la guérilla situé en territoire équatorien, au cours duquel Raúl Reyes, le numéro deux des FARC, a trouvé la mort.
Depuis 2006 se multiplient d’autres conflits de caractère écologique. C’est le cas du différend entre l’Uruguay et l’Argentine au sujet de la pollution présumée de deux usines de pâte à papier, connu sous le nom de “guerre des papeteries”. La partie plaignante, Buenos Aires, considère que ces papeteries enfreignent un traité international signé en 1975 au sujet de l’usage du fleuve Uruguay, où sont établies les usines. Montevideo, qui a réalisé le plus important investissement de son histoire en bâtissant ces papeteries, qualifie d’abusifs les blocages des autorités argentines dans cette zone touristique. Les audiences publiques débuteront en septembre.
Quant au différend entre le Pérou et le Chili, il concerne la délimitation de la frontière entre les zones maritimes des deux pays dans l’océan Pacifique. Le Pérou réclame qu’une ligne équidistante de chacune des frontières remplace le parallèle qui délimite actuellement les eaux territoriales et la zone économique exclusive de chacun. Le Chili estime pour sa part qu’il n’y a pas de différend frontalier à régler.
Actuellement, quatre affaires latino-américaines impliquant sept pays sont en attente de jugement à La Haye : le Nicaragua contre la Colombie, l’Equateur contre la Colombie, l’Argentine contre l’Uruguay et le Pérou contre le Chili. Deux autres différends ont été résolus récemment. La CIJ règle des contentieux depuis plus de soixante ans, alors pourquoi ce regain d’intérêt pour son action sur un continent enclin aux heurts diplomatiques pour des questions de frontières ? Pour le diplomate mexicain Gabriel Rosenzweig, le simple fait de recourir à la cour des Nations unies est une forme de victoire pour les plaignants. “Le plus difficile, explique-t-il, c’est la négociation politique interne qui précède. Une fois épuisée la voie diplomatique bilatérale, les pays doivent convenir de respecter la décision des juges. Et c’est ce mécanisme qui légitime les dirigeants face à l’opinion publique. Ils en sortent renforcés et sauvent la face, même s’ils n’obtiennent pas entièrement gain de cause.”
Des jugements dignes du Roi Salomon
Dans certains contentieux, comme celui qui opposait jusqu’au 13 juillet dernier le Costa Rica au Nicaragua, les bénéfices des jugements de Salomon de la CIJ semblent évidents. En vertu de l’arrêt de la CIJ, le Costa Rica aura le droit de libre navigation sur le fleuve San Juan, qui marque la frontière entre les deux pays. Quant au Nicaragua, il conserve sa souveraineté sur le fleuve et pourra inspecter les navires et les passagers aux postes de contrôle situés le long du San Juan. Managua n’écarte certes pas l’idée de revenir devant les mêmes juges si “l’accord ne fonctionne pas sur le terrain”, mais le contentieux a été réglé de façon satisfaisante.
Le Nicaragua a une autre affaire en suspens : celle qui l’oppose à la Colombie et qui concerne la frontière maritime et territoriale dans la mer des Caraïbes. La CIJ s’est déclarée compétente [le 13 décembre 2007] pour se prononcer sur le litige, et elle a déjà jugé que les îles de San Andrés, Providencia et Santa Catalina [réclamées depuis les années 1980 par le Nicaragua] appartenaient à la Colombie en vertu du traité Bárcenas-Esguerra de 1928. Reste à décider à qui appartiennent les autres formations maritimes de l’archipel de San Andrés.
De plus en plus de conflits à caractère écologique
Les conflits concernant des frontières terrestres sont parfois beaucoup plus épineux. Comme celui qui opposait l’Equateur à la Colombie, au sujet de l’épandage aérien d’herbicides toxiques sur les plantations de coca à la frontière colombienne. Personne ne conteste la lutte contre le narcotrafic et contre les plantations illicites situées dans la zone frontière. Mais l’amabilité s’arrête là. Quito exige “l’arrêt immédiat des fumigations” et demande également que soit établie une frange large de 10 kilomètres [interdite à la fumigation] le long de la frontière. Les autorités équatoriennes cherchent ainsi à éviter que les fumigations atteignent, grâce aux vents, le territoire de l’Equateur (ce que les scientifiques appellent l’“effet de dérive”). Mais ce qui mine réellement les relations diplomatiques de ces deux voisins qui se sont longtemps très bien entendus, c’est ce qu’on pourrait appeler le “facteur guérilla” de l’affaire. Le gouvernement de Bogotá affirme que les plantations illicites sont contrôlées par la guérilla des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC). La situation est devenue encore plus tendue en mars 2008 après le bombardement [par l’armée colombienne] d’un camp clandestin de la guérilla situé en territoire équatorien, au cours duquel Raúl Reyes, le numéro deux des FARC, a trouvé la mort.
Depuis 2006 se multiplient d’autres conflits de caractère écologique. C’est le cas du différend entre l’Uruguay et l’Argentine au sujet de la pollution présumée de deux usines de pâte à papier, connu sous le nom de “guerre des papeteries”. La partie plaignante, Buenos Aires, considère que ces papeteries enfreignent un traité international signé en 1975 au sujet de l’usage du fleuve Uruguay, où sont établies les usines. Montevideo, qui a réalisé le plus important investissement de son histoire en bâtissant ces papeteries, qualifie d’abusifs les blocages des autorités argentines dans cette zone touristique. Les audiences publiques débuteront en septembre.
Quant au différend entre le Pérou et le Chili, il concerne la délimitation de la frontière entre les zones maritimes des deux pays dans l’océan Pacifique. Le Pérou réclame qu’une ligne équidistante de chacune des frontières remplace le parallèle qui délimite actuellement les eaux territoriales et la zone économique exclusive de chacun. Le Chili estime pour sa part qu’il n’y a pas de différend frontalier à régler.
Isabel Ferrer El País