lundi 9 mai 2011

CHILI: UN MÉGAPROJET HYDROÉLECTRIQUE SE RAPPROCHE EN PATAGONIE

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Les fleuves Baker et Pascua de la région d'Aisen (ou Aysen), à 1.600 km au sud de Santiago, sont objet de convoitise hydroélectrique depuis 50 ans. Ils sont à présent au cœur d'un projet de 3,2 milliards USD d'investissement, qui doit générer 2.750 mégawatts pour un Chili à la croissance avide d'énergie.

Trois ans après le dépôt du projet HidroAysen, après maintes études d'impact et 2.600 observations auxquelles a répondu le consortium chileno-espagnol Endesa-Colbun, un OK administratif se joue cette semaine au Comité d'évaluation environnemental, sorte de conseil des ministres-préfets de la région.

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L'issue du vote, qui pourrait survenir mardi, fait peu de doutes, selon des médias chiliens. Mais un feu vert ne serait pas final : des recours restent possibles sur les mois à venir.

Et le projet ne sera qu'à mi-chemin : restera à définir l'acheminement de l'électricité vers le nord, un réseau monstre de 2.000 km de lignes, câbles, pylônes, qui devra passer par le même long processus d'évaluation.

Entre forêts, steppes, lacs et glaciers, la Patagonie est une zone sauvage emblématique pour les amoureux de la nature du monde entier. Et HidroAysen déchaîne les passions, qui vont bien au-delà du thème de la relocalisation de 40 familles, sur les 5.900 hectares inondés prévus.

Pour Patagonie sans barrages, collectif d'ONGs et de citoyens hostiles au projet, HidroAysen cumule les défauts : il n'est pas indispensable, n'a pas été un modèle de transparence, va défigurer un pan de Patagonie, détourner les efforts d'autres pistes (éolien, solaire) et vise surtout à satisfaire le puissant secteur minier.

HidroAysen assure que l'électricité ira surtout à la métropole de Santiago.

Selon un sondage en avril, 61% des Chiliens étaient opposés aux barrages d'Aisen. Et entre le consortium et ses opposants, la bataille pour l'opinion est engagée, campagnes publicitaires à l'appui.

Propre. Renouvelable. Chilienne. En faveur de l'eau (de l'hydroélectricité), clament de grands panneaux d'HidroAysen à Santiago.

Jamais projet (énergétique) au Chili n'a été autant exposé a l'opinion, autant scruté tant au niveau environnemental que parlementaire, assure à l'AFP Maria Irene Soto, communicante d'Hidroaysen.

Des ministres-préfets d'Aysen ont reçu des menaces par e-mail. Mis en cause, quatre d'entre eux ont été déchargés à titre préventif des débats et du vote, pour que personne ne puisse soupçonner un quelconque conflit d'intérêt, a indiqué le ministre de l'Energie Laurence Golborne.

Un dispositif de police est prévu cette semaine à Coyhaique (50.000 habitanats) en cas de rassemblements hostiles. Patagonie sans barrages a annoncé une marche à Santiago, et une guérilla de procédure sur les mois à venir, devant le gouvernement ou la justice, indique à l'AFP son secrétaire Patricio Rodriguez.

Mais l'heure d'une décision, ou de décisions énergétiques, approche au Chili: le pays est passé près de rationnements d'électricité début 2011, sa forte croissance (+6,5% prévu) est gourmande d'énergie. Or certaines alternatives font désormais grand débat, comme le nucléaire depuis Fukushima: le Chili, lui aussi, est un pays sismique.

Si Hidroaysen est approuvé, c'est qu'il sera conforme à 100% à la législation environnementale, a affirmé le président Sebastian Piñera ce week-end. Avec une mise en garde aux écologistes : S'il n'y a pas d'énergie hydroélectrique, il y aura davantage de centrales (thermiques) à charbon.