mercredi 11 mai 2011

CHILI: LES BARRAGES VONT DÉFIGURER LA PATAGONIE

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Le huemul ou cerf du sud andin, (Hippocamelus bisulcus), est un mammifère classé comme en danger d'extinction par l'Union internationale pour la conservation de la nature
Au terme de trois ans de procédure, l'organisme a donné son feu vert administratif à ce projet d'un coût de 3,2 milliards de dollars (2,2 milliards d'euros), sur les fleuves Baker et Pascua de la région d'Aisen (ou Aysen), dans deux vallées sauvages du sud du pays sud-américain.

Mais les écologistes prévoient de multiplier les recours devant un conseil ad hoc de ministres ou en justice pour empêcher le début des travaux, prévu en 2014.


Chaque année, des amoureux de nature viennent en Patagonie chilienne admirer ses glaciers spectaculaires, ses montagnes à couper le souffle et ses lacs aux eaux cristallines. L'écotourisme y a rapporté 72 millions de dollars (50 millions d'euros) en 2007, selon le service national du tourisme.


Les dégâts pour la Patagonie chilienne seront irréversibles, car elle va être utilisée pendant 40 à 60 ans et ensuite abandonnée, laissée à l'état de friche écologique, affirme le directeur de Greenpeace Chili, Matias Asun, interrogé par l'AFP.


Le projet Hydroaysen prévoit d'inonder 5.900 hectares à 1.800 km au sud de Santiago, ce qui aura un impact sur le cours des fleuves et l'ensemble de l'écosystème, selon lui.


Les études d'impact sur la flore et la faune réalisées pour ce projet sont sous-estimées au niveau microscopique (insectes, micro-organismes, ndlr) mais aussi des mammifères, comme le cerf chilien et les oiseaux endémiques qui bénéficient du statut d'espèces protégées, ajoute Matias Asun.


Le Pascua et le Baker, qui prennent leur source dans des glaciers millénaires, sont les fleuves à plus haut débit du Chili.


Les défenseurs du projet soulignent que le pays émergent, qui importe déjà l'essentiel de ses hydrocarbures, doit augmenter sa production d'électricité pour nourrir sa forte croissance annuelle, 6% prévu dans les prochaines années. Or le pays est passé près de rationnements d'électricité début 2011.


Par ailleurs, les besoins énergétiques du secteur minier du Chili, premier producteur mondial de cuivre, ne cessent de croître, parallèlement à la forte hausse des prix du métal rouge sur les marchés.


Les écologistes déplorent à ce titre que le sud préservé du pays soit sacrifié pour nourrir cet appétit, estimant que le Chili pourrait recourir à d'autres sources (solaire, éolien), même si elles sont plus chères.


Le projet du consortium hispano-chilien Endesa-Colbun, destiné à produire 2.750 mégawatts pour augmenter de 20% la capacité électrique du Chili (14.000 Mw), prévoit aussi la construction d'un réseau monstre de 2.000 km de lignes, câbles, pylônes, pour acheminer le courant vers le nord.


Le trajet n'est pas encore défini et devra passer par le même long processus d'évaluation.


Selon le directeur exécutif de Hidroaysen, Daniel Fernandez, la ligne sera en partie sous-marine pour contourner des parcs nationaux et des paysages spectaculaires, mais elle traversera quand même des zones forestières protégées et des forêts primaires.


Le président du Parti écologiste, Alejandro San Martin, redoute aussi l'impact de la venue des plus de 5.000 travailleurs nécessaires à la construction de ce chantier d'une durée de plus de dix ans.


La localité la plus proche, Cochrane, va voir sa population (4.000 habitants) doubler et il sera quasiment impossible de limiter l'impact sur le tourisme de la région, a-t-il déclaré à l'AFP.