dimanche 19 mars 2017

ENTRE BASTILLE ET RÉPUBLIQUE, MÉLENCHON RÉUSSIT SON PARI


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JEAN-LUC MÉLENCHON PLACE DE LA RÉPUBLIQUE LE 18 MARS 2017.
PHOTO BERTRAND GUAY

« On l’a fait ! » A la tribune, Charlotte Girard, l’une des proches de Jean-Luc Mélenchon, annonce que 130 000 personnes ont répondu à l’appel du candidat de La France insoumise à venir défiler, samedi 18 mars à Paris, pour une VIe République. Dans la foule massée face à elle, un souffle de plaisir traverse les rangs et les applaudissements fusent.
CANDIDAT JEAN-LUC MÉLENCHON LORS DE LA
MARCHE, AU MILIEU DE SES SYMPATHISANTS.
PHOTO AFP
Le leader de la gauche radicale, lui aussi, savoure le moment. A la peine dans les sondages et peu audible ces dernières semaines, Jean-Luc Mélenchon a réussi son pari. Et, à l’heure où Benoît Hamon réunit ses partisans, dimanche 19 mars à Bercy, le député européen a donné à voir une démonstration de force.

Dans le cortège qui le mène de la place de la Bastille à celle de République, il sait déjà que sa marche est un succès, comparable à celle qu’il avait convoquée il y a cinq ans sur le même mot d’ordre et qui avait constitué un tournant dans sa campagne. En 2012, celui qui était alors le candidat du Front de gauche avait revendiqué 120 000 personnes. « Cela témoigne de la permanence d’une force. Tout ça ne sort pas de l’œuf. C’est 5 ans de travail », confie-t-il au Monde.

« Une force propulsive pour la suite »

A ses côtés, plusieurs personnalités : la philosophe belge Chantal Mouffe, l’ancien leader CGT des Continental, Xavier Mathieu, le communiste Pierre Laurent, la porte-parole d’Ensemble Clémentine Autain ou encore le député Europe Ecologie-Les Verts Sergio Coronado. Et bien sûr son premier cercle : Alexis Corbière, son porte-parole, Manuel Bompard, son directeur de campagne ou encore Eric Coquerel, qui lui a succédé à la tête du Parti de gauche.

« Comme en 2012, on va en faire le plus gros rassemblement de la campagne, c’est une force propulsive pour la suite », assure le conseiller régional d’Ile-de-France. « C’est de nature à donner un élan à la candidature. Prendre la rue, c’est quelque chose de positif, de populaire », ajoute Mme Autain.

Le carré VIP est parti en retard, a perdu la tête de cortège et finira par renoncer à rattraper les premiers manifestants. Parmi les dizaines de milliers de personnes présentes, chacun est venu avec sa pancarte où il était inscrit un point du programme du candidat de La France insoumise : « Droit de vote à 16 ans », « suppression du Sénat », « fin du contrôle au faciès », « inéligibilité des corrompus».

Les bonnets phrygiens, rouge et frappés de la cocarde tricolore, ont également refait leur apparition. Et n’en déplaise à l’ex-socialiste qui avait appelé les militants des partis politiques à défiler en queue de cortège, des drapeaux du Parti communiste, du Parti de gauche, d’Ensemble se sont mêlés aux drapeaux français particulièrement nombreux.

Appel à abolir « la monarchie présidentielle »

Quand Jean-Luc Mélenchon parvient enfin à rallier la place de la République, il est déjà largement en retard sur le timing prévu. Le candidat de La France insoumise s’avance sur scène en rendant hommage au lion qui trône au pied de la Marianne et dont « l’auteur a voulu qu’il symbolise le suffrage universel ». Et que dire de cette statue de bronze qui le domine et qui « porte fièrement le bonnet des affranchis, celui de la liberté retrouvée et de la servitude rompue » ? « Nous la faisons nôtre ! », s’exclame le tribun de la gauche radicale.

Pendant plus d’une heure, le député européen a déroulé un discours centré autour de cette VIe République qu’il veut mettre en place, souhaitant abolir « la monarchie présidentielle » et cette Ve République mise en place par l’homme néanmoins « exceptionnel » qu’était le général de Gaulle.

M. Mélenchon a mis en garde les Français contre les « pouvoirs incroyables » de l’actuelle Constitution et les a appelés à ne pas les déléguer à « des apprentis sorciers ». S’il n’a pas cité les noms de Marine Le Pen, François Fillon ou Emmanuel Macron, ses adversaires étaient clairement désignés.

« Ne confiez pas, fut-ce pour une période transitoire de tels pouvoirs à des gens déterminés à en faire l’usage (…) quand ils se prosternent devant l’ethnie ou devant l’argent », a lancé l’ex-socialiste qui propose une « issue positive » avec le bulletin de vote à son nom. « Notre marche prouve que nous sommes capable de diriger le pays », a-t-il assuré.

La Marseillaise, puis L’Internationale

Dans la nouvelle Constitution qu’il appelle de ses vœux, le candidat souhaite voir figurer plusieurs mesures : le droit de révoquer des élus en cours de mandat, le droit à l’avortement et au suicide assisté, la « règle verte » – ne pas prendre plus à la nature qu’elle ne peut reconstituer –, l’interdiction du brevetage du vivant ou encore un référendum obligatoire pour ratifier tout nouveau traité européen.

« Il faut que les bulletins de vote donnent le coup de balai qui efface tout sans exception », clame-t-il avant d’ajouter : « Dégagez ! » Et la foule de reprendre : « Dégagez ! Dégagez ! »

La Marseillaise est entonnée a capella par un chanteur lyrique et quand les derniers couplets ont fini de retentir, M. Mélenchon s’avance de nouveau sur scène pour appeler ses partisans à chanter L’Internationale. Cela fait bien longtemps qu’il ne l’a pas fait mais, en ce jour anniversaire de la Commune de Paris, il y a des symboles qu’on n’efface pas si facilement.