lundi 20 octobre 2014

ELLE FUT TORTURÉE SOUS PINOCHET


En 1968, elle entre en politique

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ROSA GUTIÉRREZ SILVA QUAND ELLE
PRÉSIDAIT LE CONSEIL DES ÉLÈVES.
À partir de ce moment, alors qu’elle n’a pas 10 ans, elle se met à lire beaucoup d’articles sur la politique. À 13 ans, elle entre chez les Jeunesses communistes. « Nous habitions à côté du siège du Parti socialiste et du Parti communiste… » Rosa Gutiérrez Silva, avec le recul, se décrit plus comme allendiste que communiste. En 1970, Salvador Allende arrive au pouvoir. Son gouvernement se nomme l’Unité populaire. « C’était l’unique moment où des Chiliens de la base ont participé au gouvernement d’un pays. On pouvait être fils d’ouvrier et aller à l’université », raconte Rosa Gutiérrez Silva. Pendant sa semaine, la Chilienne étudie au lycée de Valparaiso. Et le week-end : « On participait à des chantiers volontaires. On allait construire des maisons pour aider les gens. On était convaincu qu’on faisait le bien. On soutenait le gouvernement. » À cette période, Rosa Gutiérrez Silva devient une dirigeante des Jeunesses communistes et préside le conseil des élèves de son lycée de filles. Pour 1974, le Parti communiste chilien lui prévoit une année en URSS et en RDA (ex-Allemagne de l’Est). « J’allais étudier le marxisme-léninisme et le matérialisme dialectique », souligne la Chilienne. Et pour 1975, les communistes veulent qu’elle étudie le droit et la médecine.

Torturée deux fois
          
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COUVERTURE  DU LIVRE TÉMOIGNAGE
Mais le 11 septembre 1973. Tout s’effondre. Les premiers jours suivant le coup d’État, les militaires l’interrogent. Mais sans violence. Fin septembre : « Dans la nuit, mon père est venu me réveiller, il m’a dit : “Rosita, on te cherche”. » Sur le pas de la porte, des hommes ont le visage grimé de noir. Ils emmènent la jeune militante à l’Académie de guerre. Là-bas, on la torture à coups de bâton, en lui appliquant la “gégène” (torture par l’électricité). Les conditions de détention sont épouvantables. On lui demande des renseignements sur le nombre de communistes, qui et où ils sont. Mais elle ne parle pas. Elle reste à l’Académie de guerre pendant dix jours. En décembre 1973, rebelote. « Ils nous ont rassemblés dans la cour et nous ont demandé de tourner en rond. Puis ils nous ont jeté des armes, ceux qui savaient les réceptionner étaient battus », explique Rosa Gutiérrez Silva.

Fuite en Argentine

En août 1974, des militaires viennent la menacer, soit elle donne des informations sur la position de ses camarades en fuite, soit elle repasse à la torture. La militante part pour l’Argentine avec son premier mari, le 5 septembre 1974.

Dans ce pays, elle devient infirmière et épidémiologiste. Alors qu’une junte militaire d’extrême droite est au pouvoir de 1976 à 1983, elle parvient à s’en sortir. Elle reste en Argentine jusqu’en 2002, date à laquelle elle rejoint son nouveau compagnon en France, à Sassangy.

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MICHELLE BACHELET, PRÉSIDENTE DU CHILI,
A ACHETÉ LE LIVRE LORS DE SA SORTIE. PHOTO T. A.
Au début des années 2010, Rosa Gutiérrez Silva et plusieurs de ses camarades de lutte ont écrit le livre Nous étions lycéennes en septembre 1973 , (Éramos liceanas en septiembre del 73) , en espagnol. Ce livre d’entretiens et de témoignages revient sur les premiers mois de la dictature chilienne : à savoir la répression d’adolescentes et de mineures. Cet ouvrage a obtenu le Prix de la mémoire 2012 du ministère de la Culture du Chili. En septembre 2013, Rosa Gutiérrez Silva a témoigné à la télévision chilienne pour les 40 ans de l’arrivée au pouvoir d’Augusto Pinochet.


Toujours militante

Même si cette époque peut sembler loin, Rosa Gutiérrez Silva n’a pas abandonné le militantisme. Elle participe à la Croix du Sud, une association qui mène des actions humanitaires en faveur des Indiens d’Amérique du Sud. Elle suit toujours le mouvement des mères de la place de Mai, en Argentine, mouvement de femmes qui recherchent la progéniture de leurs enfants, militants de gauche pour la plupart, tués sous la junte militaire.