Pepe Auth (photo) a été élu en mai dernier pour deux ans, Président du PPD, parti de la « Concertación », coalition au pouvoir depuis 1990. Pour cet homme politique de gauche, débarquer à Paris en 1983, étudiant en sociologie, au début de ce que l’on appelé « Les années Mitterrand » n’a rien eu d’anodin : « j’ai suivi passionnément la politique » raconte t-il, dans un français parfait, à peine coloré d’une pointe d’accent. Difficile de croire qu’il n’y a passé que 4 ans, le temps de son doctorat à l’École des Hautes Études en Sciences Sociales (EHESS), sous la direction d’Alain Touraine. C’est que depuis cette époque : « les meilleures années de ma vie », selon lui, il « garde un œil sur la France ». Comprenez : lectures des hebdos et quotidiens sur Internet, plus 5 à 6 romans en français par an et une impressionnante collection de CD. De Brassens à Arthur H, il est un fin connaisseur de la chanson française. Mais « l’œil » c’est avant tout sur la politique qu’il l’a : « Je vois la gauche française, comme celle du Chili, il y a 30 ans. Nous étions aussi idéologiques avant nos 17 ans de dictature. D’ailleurs, il y a de grandes similitudes : nous aussi nous avons eu un front populaire en 1936 », précise-t-il.
Retour en 1988
Avec son choix de l’allemand au lycée, rien ne le prédestinait à aller en France, si ce n’est la volonté d’Alain Touraine, d’accueillir des étudiants chiliens, en plein dictature. Ils seront ainsi dix à partir, bénéficiant d’une bourse du gouvernement français gérée par l’Église chilienne. Il est d’abord envoyé à Bordeaux en stage de langue. Sa passion du cinéma et sa lecture assidue du Nouvel Obs’ feront le reste. Très vite, c’est l’immersion à Paris. Parti avec sa femme, et un bébé de quelques mois, ils y seront à nouveau parents et complètent leurs bourses par un travail d’animateur en centre aéré (garde municipale d’enfants dans les écoles, en dehors des temps scolaires). « J’ai été père d’une toute autre façon en France qu’au Chili. Là-bas, sans aide à la maison, sans famille proche, j’avais beaucoup plus de vie de famille, j’emmenais mes filles à la crèche, je m’en occupais beaucoup plus », observe t-il, comparant avec ses expériences ultérieures de père de 5 enfants.Car s’il loue l’universalité de la France, qui lui a permis de sortir des « 4 murs chiliens : la cordillère/la mer, pour rencontrer le monde, y compris plus de latinos américains qu’à Santiago », la petite famille est rentrée comme prévu en 1988 : « J’aurai pu rester, l’un de nous l’a fait et y est toujours prof aujourd’hui. Mais il y avait eu le plébiscite au Chili en 1987, c’était le moment de revenir en politique ». déclare t-il. Il reprend alors sa place dans l’équipe d’Eugenio Tironi au sein de l’ONG Sur, qui existe toujours, puis fonde une entreprise de consulting. Il sera nommé Ambassadeur en Suède de 2000 à 2004 par le Président Lagos et depuis se consacre à la politique. Il était au congrès du Parti Socialiste français, amusé des discussions étranges de ces « réformistes qui se définissent comme révolutionnaires ». 2009 année présidentielle s'annonce intense pour lui, avec son lot de rebondissements, la suite au 24 janvier. S. R