Un sondage de l'institut Mori, diffusé le 8 janvier, attribue 36 % des intentions de vote au premier, contre 11 % au second. A la question de savoir qui sera leur prochain président, 50 % des Chiliens répondent Sebastian Piñera. "C'est la première fois, depuis la fin de la dictature, que la droite est en tête des sondages", souligne Marta Lagos, directrice de Mori.
La coalition Concertation démocratique regroupe la démocratie-chrétienne, le Parti socialiste (PS), le Parti pour la démocratie (PPD, gauche) et le petit Parti radical social-démocrate. Eduardo Frei, ancien président du Chili (1994-2000), bénéficie du désistement des deux poids lourds du PS, l'ex-président Ricardo Lagos et l'ancien ministre José Miguel Insulza, actuellement secrétaire général de l'Organisation des Etats américains (OEA).
"Nous sommes devant un défi", a admis M. Insulza, le 5 janvier, lorsqu'il a annoncé sa décision. A son avis, M. Frei "est la personne la mieux placée pour le relever". La députée socialiste Isabel Allende, fille de l'ancien président Salvador Allende, a regretté ce désistement et exprimé sa préférence pour des primaires au sein de la coalition. "Les disputes internes et le manque de cohésion de la Concertation pourraient provoquer sa défaite", plaide M. Insulza, qui souhaite éviter les primaires.
LE "VOTE JEUNE"
Provenant d'une famille démocrate-chrétienne, Sebastian Piñera est parvenu à moderniser et à rassembler la droite. Comme le centre gauche, il a voté "non" au plébiscite de 1988, qui a poussé les militaires à quitter le pouvoir. Avec une fortune évaluée par la revue Forbes à 1,2 milliard de dollars, M. Piñera contrôle la compagnie aérienne Lan Chile, le populaire club de football Colo Colo et une chaîne de télévision. "Si nous voulons un pays qui renoue avec la croissance et la création d'emplois, gagner la bataille contre la délinquance et la corruption, améliorer la qualité de la santé et de l'éducation, nous ne pouvons pas continuer sur la même voie", dit le milliardaire, qui prétend incarner le changement.
"La Concertation reste très forte, le scrutin sera serré, comme toujours", confie Ernesto Ottone, politologue proche de M. Lagos. "Les partis de la coalition n'ont pas su renouveler leur leadership, et souffrent de l'usure du pouvoir, admet-il. Mais la Concertation garde une capacité d'entraînement bien supérieure à la somme de ses partis." La crise mondiale favorise le centre gauche, qui a soigné les fondamentaux de l'économie et accumulé des réserves appréciables grâce à l'envol des prix du cuivre, estime M. Ottone. A en croire des sondages, la gestion de la crise a suscité une augmentation des indices d'approbation de Mme Bachelet.
L'inconnue provient de l'éventuelle inscription automatique des jeunes sur les listes électorales, une réforme en cours d'adoption au Congrès. Jusqu'ici, la jeunesse s'est massivement abstenue aux scrutins. L'incidence d'un "vote jeune" sur les rapports de force entre le centre gauche et la droite est imprévisible. Paulo A. Paranagua