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LES DOUZE PARTICIPANTS AU DÉBAT TÉLÉVISÉ DE JEUDI SOIR |
France 2 ouvre ce soir le bal des débats télévisés en vue du scrutin du 26 mai, et s’est vu imposer la présence des douze têtes de liste. Ou comment s’impose la démocratie contre la dictature de l’audience.
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Pour la chaîne publique, qui s’est pliée à la décision tout en faisant appel du jugement, avançant une « grave » atteinte à la liberté de la presse, ce n’est pas le bon angle d’attaque, pointe Philippe Moreau-Chevrolet. Le consultant, enseignant à Sciences-po, souligne que « c’est bien le rôle du service public de donner à voir la palette des nuances politiques. Je trouve ainsi plus choquant que ce soit le président de la République qui choisisse qui l’interviewe ». Autrement, c’est laisser carte blanche aux chaînes privées pour un traitement people à la Karine Le Marchand, ou du « clash » en plateau, dénoncé par Christian Salmon. L’auteur de Storytelling, décortiquant en 2007 comment, notamment, la mise en récit avait envahi la sphère politique, a publié en début d’année son prolongement avec l’Ère du clash. À cet « effondrement de la confiance dans le langage », désormais, l’essayiste oppose le besoin de délibération démocratique retrouvée, de souci du commun. Un débat comme celui de ce soir peut-il y répondre ? Douze intervenants, ce n’est pas forcément un problème pour des chaînes de télévision d’abord préoccupées d’audience. Depuis les débats des primaires, relève Philippe Moreau-Chevrolet, « elles ont appris à mettre en scène le débat choral ». L’irruption des chaînes tout info avec leur besoin de débats multipliés en plateau pour occuper l’antenne « a également habitué le téléspectateur à disposer de points de vue variés autour de la table », explique le consultant. Elles n’ont pas forcément à s’en plaindre en terme d’audience ; le 4 avril 2017, le débat à onze candidats à la présidentielle rassemble une audience cumulée entre BFM, CNews et RMC de 6,3 millions de téléspectateurs. Un débat peut tout autant être un déclencheur, comme l’effondrement de Marine Le Pen entre les deux tours de 2017, qu’un révélateur, comme celui d 20 mars 2017 qui confirme une dynamique de campagne.
Certes, l’élection européenne mobilise moins qu’une présidentielle ; à ce jour, abstention et indécision sont les grands gagnants. Alors, ce soir, l’enjeu est véritablement démocratique, s’agissant d’un débat encore loin du scrutin, dans deux mois. Les têtes de liste pourront avancer leurs propositions pour améliorer, réformer, ou sortir de l’UE. Dans une élection à la proportionnelle avec une liste nationale, « toute exposition médiatique est bonne à prendre, surtout quand rien n’est encore solidifié dans l’électorat », souligne Philippe Moreau-Chevrolet. Surtout quand les derniers scrutins, présidentiel et législatifs, montrent « qu’il n’y a aujourd’hui aucune position politique installée. Qui peut prédire ce que sera En marche dans deux ans » ? La présence d’un plus grand nombre de têtes de listes contribue aussi à rebattre les cartes.
Lionel Venturini
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