samedi 31 décembre 2016

ETUDIANTE JAPONAISE DISPARUE À BESANÇON : LA DERNIÈRE SOIRÉE DE NARUMI

NARUMI KUROSAKI 
Le dimanche 4 décembre 2016, Narumi arrive à Ornans. Un bourg plus connu pour ses maisons suspendues au bord de l'eau que pour ses faits divers. On vient de loin pour admirer les paysages dont s'est inspiré l'enfant du pays, Gustave Courbet, peintre tourmenté de « l'Enterrement à Ornans » et de « l'Origine du monde ». Le musée qui lui est consacré attire son lot de visiteurs, d'où un choix d'une quinzaine de restaurants pour tous budgets.

Il a loué une voiture le temps du dîner

Personne ne semble se souvenir de la discrète Asiatique. Mais Narumi manque à chacun tant son visage est devenu familier depuis la médiatisation internationale de l'affaire. Une restauratrice s'en veut d'avoir fermé si tôt après l'entraînement de l'équipe de foot, la faute à une panne d'appareil en cuisine : « Je l'aurais peut-être croisée, dit-elle. J'aurais peut-être pu faire quelque chose... » Qui a remarqué sa silhouette, sinon ces petites caméras de vidéosurveillance, dans la rue principale, devant de l'office de tourisme et face à la poste ? Les enquêteurs de la PJ de Besançon en ont extrait les images, trouvant confirmation de leur intuition : l'étudiante n'était pas seule. Un jeune homme l'accompagnait. Un Chilien de son âge, habitué lui aussi du campus. De loin, on peut penser qu'ils forment un couple. Ils l'ont été avant de se séparer dans des conditions qui restent à éclaircir. Leur relation pourrait s'être nouée au Japon. En tout cas, en ce début décembre, la jeune femme a accepté de revoir cet ancien flirt auquel elle téléphone après son cours de danse à Besançon.

« UN ENTERREMENT À ORNANS » GUSTAVE COURBET (1819 - 1877)  
PHOTO H. LEWANDOWSKI RMN-GRAND PALAIS

À Ornans, c'est lui qui invite. Il aurait payé par carte bancaire, ce qui a permis aux policiers d'être certains de sa présence. Les enquêteurs auraient aussi déterminé que le Chilien avait loué une voiture lors de son séjour à Besançon.

Dans la soirée, Narumi et l'homme redescendent en ville, à une trentaine de kilomètres, et là encore des caméras enregistrent leur entrée dans la cité universitaire. Ensuite, il y a ces cris glaçants rapportés par des témoins. Et puis rien. Le silence et bientôt ces premières investigations de la police criminelle. L'étudiant chilien aurait été averti par des amis que les questions des enquêteurs se concentraient sur lui. Il nettoie ses ordinateurs et quitte la France à la mi-décembre, via la Suisse, l'Espagne ensuite, pour gagner le Chili.

Le témoignage d'un restaurateur de Verdun (Meuse) qui affirmait avoir vu Narumi Kurosaki le 19 décembre dans son établissement a été écarté. C'est un corps que recherchent désormais les enquêteurs de la PJ dans ces bois noirs. Il faut faire vite : la neige, attendue bientôt, risque de faire disparaître toute trace jusqu'au printemps.

Casse-tête diplomatique

L'affaire Narumi implique directement trois pays : la France, le Japon et le Chili. Ce n'est donc plus seulement une énigme policière, c'est un casse-tête diplomatique. A la demande des autorités françaises, Interpol pourrait diffuser prochainement à ses 190 pays membres une « notice rouge » (un message d'alerte) visant le suspect. Cette organisation policière internationale, dont le secrétariat général est à Lyon, ne dispose pas de pouvoir d'enquête. C'est une structure facilitant l'échange de données entre polices du monde. La suite dépendra des accords judiciaires entre la France et le Chili. Aucune convention d'extradition n'aurait encore été signée. Il semble que le Chili n'extrade pas ses ressortissants. Si la justice française ne parvenait pas à mettre la main sur le suspect, elle pourrait dénoncer les faits à Santiago en espérant être autorisée à envoyer des enquêteurs sur place. Interrogée hier sur ces hypothèses, l'ambassade du Chili en France n'a pas donné suite.