mardi 30 janvier 2018

LE PAPE ENVOIE MGR SCICLUNA AU CHILI POUR ÉCOUTER LES VICTIMES D’ABUS SEXUELS

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MGR CHARLES JUDE SCICLUNA, ARCHEVÊQUE DE MALTE. 
 PHOTO ALESSIA GIULIANI 
Connaisseur chevronné de l’épineuse question des abus sexuels dans l’Eglise, Mgr Charles Scicluna, archevêque de Malte, est envoyé à Santiago « pour écouter ceux qui ont exprimé la volonté de soumettre des éléments en leur possession » concernant le cas de Mgr Barros.
« POUR CROIRE EN NOUS IL FAUT AVOIR LA FOI, 
MAIS POUR QUE JE CROIE EN VOUS 
IL FAUT M'APPORTER DES PREUVES. »
Le pape François a demandé à l’archevêque de Malte, Mgr Charles J. Scicluna, par ailleurs président du collège pour l’examen des recours en matière de délits graves au sien de la Congrégation pour la doctrine de la foi, de se rendre à Santiago du Chili, a annoncé mardi 30 janvier le Saint-Siège.

La tâche de celui qui, sous le pontificat de Benoît XVI, était considéré comme l’homme de la « tolérance zéro » en matière de pédophilie, sera d’« écouter ceux qui ont exprimé la volonté de soumettre des éléments en leur possession » concernant l’évêque d’Osorno, Mgr Juan Barros Madrid. Lors de son voyage au Chili, mi-janvier, le pape François a, à deux reprises, pris la défense de cet évêque, provoquant une polémique.

L’évêque d’Osorno est en effet impliqué dans le scandale Karadima, du nom de cet ancien curé d’une paroisse d’un quartier huppé de Santiago à l’origine de nombreuses vocations, mais qui s’est révélé un redoutable prédateur sexuel et qui, dénoncé en 2004, n’a été renvoyé de l’état clérical qu’en 2011.

Jeune homme, Juan Barros avait fait partie du groupe de jeunes dont la vocation avait été éveillée par Karadima. Un autre jeune de ce groupe l’accuse d’avoir été présent dans une pièce contiguë à celle où il était aux prises avec le prêtre abuseur. Et d’être donc, de ce fait, complice, la porte étant restée ouverte. Juan Barros affirme, lui, n’avoir rien su.

« J’ai le cœur ouvert à recevoir les victimes »

« Le cas de Barros a été étudié et réétudié, mais aucun élément n’est arrivé. Et moi, je ne peux pas le condamner si je n’ai pas d’éléments. Si je le condamnais sans élément ou sans certitude morale, je commettrais, moi, un déni de justice », avait affirmé le pape François dans l’avion qui le ramenait de Lima, se disant « convaincu » que Mgr Barros est « innocent ».

Les victimes « ne sont pas venues apporter d’éléments pour un jugement. Tout cela est trop léger pour être pris en compte : quelqu’un qui accuse sans élément, avec opiniâtreté, c’est de la calomnie», avait-il martelé, se disant néanmoins prêt à entendre tout élément à charge contre Mgr Barros : « J’ai le cœur ouvert à recevoir les victimes. ».

Pas de rencontre avec les victimes de Karadima

« Autour de Karadima, cela fonctionnait comme une secte », se souvient José Andrés Murillo, lui aussi ancien du groupe, abusé à l’époque par le prêtre et aujourd’hui directeur de la fondation « Pour la confiance », qui lutte contre les abus sexuels. « Ce contexte est une preuve suffisante contre Barros », affirme-t-il.

Lors du voyage du pape, il expliquait par ailleurs à La Croix que la fondation « Pour la confiance » a demandé à rencontrer le pape pendant son voyage, mais que la nonciature apostolique lui a répondu que l’agenda était trop chargé.

Durant son séjour à Santiago, le pape a néanmoins rencontré des victimes d’abus sexuels, sans qu’il soit précisé s’il s’agissait de victimes de Karadima. Il ne s’agissait en tout cas pas de personnes en lien avec la fondation « Pour la confiance ».

Contactée de nouveau par La Croix, la fondation n’a pas souhaité réagir à cette annonce pour le moment, dans l’attente d’en savoir plus.