Saluant la tenue de cette seconde réunion au Chili, Ricardo Lagos a noté que les travaux de la Commission faisaient partie d’une longue et fière tradition au sein de l’Internationale Socialiste pour la lutte pour des sociétés égales, qui vivent ensemble pacifiquement. Les questions examinées par la Commission étaient pour la première fois de nature véritablement mondiale et ne pouvaient être résolues que globalement ; il était possible que les problèmes commencent au niveau national mais les effets se répandaient rapidement à travers le monde. La perspective que les forces progressistes pouvaient apporter à l’agenda international sur changement climatique comprenait des initiatives pour tous, basées sur le principe de responsabilités communes mais différenciées. Chaque société était différente et il était clair qu’une approche uniforme ne fonctionnerait pas. Faire en sorte que les questions environnementales soient proéminentes sur les agendas politiques et promouvoir des types de développement différents – alliant préoccupations environnementales avec avancées technologiques, croissance et durabilité, et coopération entre le secteur privé et le secteur public –étaient d’une importance vitale.
Reconnaissant les inégalités et injustices considérables que le changement climatique risquait de créer, Elio Di Rupo, ministre d’Etat et leader du Parti Socialiste de Belgique, PS, a affirmé que les façons de penser devaient être fondamentalement changées. Le coût de l’inaction serait encore plus grand que le coût engendré par l’action. Ceux de gauche ne pouvaient pas soutenir un modèle mondial qui marginalisait la majorité ; le défi auquel devait faire face l’Internationale Socialiste était d’assurer que l’agenda international soit basé sur la solidarité et l’éradication de la pauvreté. Tandis que certains considéraient que les progrès réalisés lors de la Conférence des Nations Unies en décembre étaient insuffisants, la Feuille de route de Bali avait fourni un nouveau cadre pour des négociations sur la base ferme de recommandations scientifiques spécifiques. Il a ajouté qu’agir globalement ne signifiait pas sous estimer la contribution du niveau local à cette question.
Prenant la parole lors de la session d’ouverture, Michelle Bachelet a souligné le nouveau sentiment d’urgence ressenti par la communauté internationale pour s’attaquer au changement climatique. Le cas scientifique en matière de réchauffement de la planète avait clairement été affirmé et la reconnaissance de la contribution substantielle de l’activité humaine à la détérioration de l’environnement avait mis un terme au comportement aveugle et inerte de nations qui pendant longtemps avaient compté sur une vision du développement qui considérait comme allant de soi le fait que les ressources naturelles était illimitées. Un nouveau consensus politique était en train de se mettre en place pour générer une nouvelle action politique mondiale, au sein de laquelle le rôle des idées progressistes était fondamental. Le monde requerrait une équité basée sur des politiques environnementales, qui aideraient les secteurs les plus touchés de la société. Le changement climatique n’était pas simplement un concept sophistiqué qui s’appliquait uniquement aux pays développés, a-t-elle conclu, mais il était également une réalité pour les pays du monde les plus vulnérables, qui requerrait une nouvelle capacité mondiale.
Les membres de la Commission et les participants invités ont pris part à des échanges de point de vue francs et animés.
Diriger en montrant l’exemple
Partageant l’expérience de son gouvernement, S.E. Martin Torrijos, président de la République de Panama et leader du Parti révolutionnaire Démocratique, PRD, a présenté un rapport clair et détaillé sur les plans pour élargir le Canal de Panama. Ceci montrait, pensait-il, qu’il n’y avait pas d’incompatibilité entre d’importants projets infrastructurels et la lutte de l’humanité contre les dégâts environnementaux. L’expansion du Canal soulevait en son cœur des questions liées au changement climatique, à la fois en matière de technologie utilisée pour le construire de façon durable et de réduction d’émissions de carbone que le développement assurerait par l’intermédiaire d’une productivité accrue. Ainsi, de nouveaux investissements, des types de développement différents et une croissance écologique étaient tout à fait possibles.
Eduquer les nouvelles générations
Amenant avec elle sa perspective d’Amérique centrale et du Nord, Beatriz Paredes, présidente du Parti Révolutionnaire Institutionnel, PRI, Mexique, a souligné le rôle de l’éducation pour que les nouvelles générations s’engagent en faveur des questions liées au changement climatique. Dans des sociétés, telles qu’au Mexique, où les forces politiques vertes n’avaient pas de forte tradition, les futurs leaders, à la fois du gouvernement et du monde des affaires, devaient prendre conscience des implications des développements environnementaux. Elle a commenté que tandis qu’il y avait de nombreux actes de solidarité vis à vis de pays qui devaient faire face à des désastres naturels, comme c’était souvent le cas des nations vulnérables de sa région, il n’existait pas de procédures systématiques pour aider durant l’étape difficile du rétablissement des infrastructures.
Le rôle décisif de la politique
Mona Sahlin, présidente du Parti Social-Démocrate Suédois, SAP, a affirmé que la communauté internationale avait maintenant conscience de ce qui devait être fait face au changement climatique et pourquoi, mais que les sociaux-démocrates pouvaient montrer comment, avec l’esprit de solidarité devenant une stratégie de survie mondiale. Le rôle de la politique devait s’accroître, avec des politiques incitant au développement technologique écologique: le marché pouvait être un servant excellent, a-t-elle dit, mais un mauvais maître. Elle a ajouté que tandis que les effets du changement climatique pouvaient apparaître mondiaux, un changement concret avec un impact bien réel pouvait rapidement se produire au niveau local et que ces expériences pouvaient être hautement valables, les pratiques les meilleures pouvant être globalement partagées.
Dilemme du développement
Le dilemme important faisant face aux pays émergeants, selon l’avis de Mohammed Elyazghi, ministre d’Etat du Maroc, était comment développer et industrialiser sans polluer. La solidarité entre les nations développées et celles en développement était vitale. L’accès à de nouvelles technologies devait être universel, alors qu’au contraire elles étaient vendues aux nations non industrialisées à un prix d’or. Avec la diverse flore menacée dans le bassin méditerranéen, par exemple, où les pays n’avaient pas les moyens de protéger de telles zones, la culture sociale-démocrate devait jouer un rôle significatif en aidant les nations en développement.
Solidarité au coeur de l’agenda international du changement climatique
Nkosazana Dlamini Zuma, ministre des Affaires étrangères de l’Afrique du Sud, a réitéré que la réponse au changement climatique devait être traitée au moyen d’une solidarité sans précédent entre nations développées et nations en développement, en particulier en ce qui concernait l’Afrique, le continent qui serait le plus touché par le réchauffement de la planète mais qui avait le moins de capacité de s’adapter. Le changement climatique n’était plus théorique et la région expérimentait déjà la hausse des températures et la diminution des stocks naturels de nourriture. Le défi pour l’Afrique était comment passer de la dépendance vis à vis du charbon sans perdre son élan économique, et pour accomplir ceci, une aide était requise pour progresser finalement vers l’utilisation de technologies plus vertes. Ce transfert constituait un impératif et non pas un choix, et la question du coût demeurait fondamentale.
Solutions énergétiques spécifiques
Marco Aurélio Garcia, PT, Brésil, a présenté un compte-rendu détaillé de l’expérience de son pays en matière de production de biocombustibles, une alternative qui avait été recherchée durant les crises pétrolières des années 1970. Les défis qui existaient toujours aujourd’hui étaient d’assurer cette énergie à partir de ces sources sans causer de dégâts environnementaux ni perdre ou mettre en danger les réserves de nourriture. L’importance de l’expérience était multiple : le Brésil était autosuffisant en termes énergétiques, il n’expérimentait pas de mouvements migratoires vers les villes mais conservait sa population rurale avec des opportunités d’emplois productives ; les biocombustibles eux-mêmes ayant ouvert une série d’autres produits pouvant être produits, par exemple des plastiques et des fertiliseurs biodégradables. Il a demandé comment cette expérience pouvait être étendue à d’autres continents, en particulier à l’Afrique, qui pourrait être bénéfique de la même manière, et également repenser les modèles de développement et réduire les subventions afin de permettre un meilleur accès au biocombustibles.
Feuille de route à suivre
Sergei Mironov, président du Conseil de la Fédération russe a souligné les nombreux domaines d’action qui se présentaient. Des recherches scientifiques d’une plus grande portée étaient nécessaires. L’impacte de l’humanité sur le changement climatique n’avait pas été étudié dans son entier et davantage d’investigations sur les mesures requises pour combattre les dégâts environnementaux seraient requises. Il a souligné que tout nouvel accord international ne pourrait être efficace que s’il était compréhensif : tous les pays devraient être nécessairement partager le fardeau. Des standards d’adéquation étaient nécessaires dans les accords internationaux, ciblant à la fois la croissance économique et prenant en considération l’impact sur l’environnement. Il était clair que de meilleurs instruments d’adaptation étaient vitaux en matière de stratégie pour promouvoir des moyens écologiquement viables.
Apprendre à partir des erreurs passées
Aleksandr Kwasniewski, ancient président de la Pologne, a noté l’engagement encourageant de l’Union européenne en faveur de la réduction dramatique des émissions, en réponse au changement climatique. Il pensait qu’une contribution pratique de la part des nations développées pouvait être de délivrer de nouvelles technologies propres aux nations émergentes, afin qu’elles ne répètent pas les erreurs du passé dans leur processus d’industrialisation. Il a suggéré que les dettes de tels pays pourraient être transférées dans des ‘fonds écologiques’ qui ne seraient utilisés que pour un développement ne nuisant pas à l’environnement. Il a ajouté que de nombreux leaders politiques devaient être éduqués : le changement climatique ne figurait toujours pas au sommet de l’agenda politique de nombreux pays.
Les actions de la Chine face au changement climatique
Zhijuan Zhang, vice-ministre de la Chine, a décrit la situation dans son pays, qui a déjà souffert des effets négatifs du changement climatique : 180 millions de personnes avaient récemment été touchées par trois semaines de pluie glacée qui avait paralysé les infrastructures électriques dans plusieurs provinces. La Chine, a-t-il dit, avait adopté une approche constructive recherchant un modèle de développement équilibré, avec un développement économique et social et la protection de l’environnement. Le parlement avait récemment promu l’Agence de protection de l’environnement au rang de ministère et le budget pour la protection de l’environnement avait été augmenté de façon significative. Tandis que l’allègement de la pauvreté demeurait un défi inquiétant en Chine, le pays s’était engagé à maintenir le principe de responsabilités partagées et différenciées en ce qui concernait le changement climatique. Il était important, a-t-il ajouté de ne pas exclure la coopération bilatérale et régionale et d’étudier avec attention les expériences nationales.
Accroître la contribution de la politique
Ricardo Lagos a abordé plusieurs domaines où la politique pourrait prendre l’initiative pour augmenter la croissance, lutter contre la pauvreté et accroître l’efficacité en matière de consommation énergétique. La coopération publique-privée était une question clé, car le financement et le transfert des technologies requerraient des investissements importants de la part du secteur privé et la question des incitations était bien réelle. Le besoin d’une formule qui comprenait les différences entre pays, signifiait que des engagements nationaux particuliers pouvaient se traduire dans des accords de la communauté internationale. Et, a-t-il suggéré, une approche sectorielle possible où des standards d’émissions similaires pourraient s’appliquer à travers les pays ayant des standards de production également similaires.
Les participants ont convenu que l’importance du rôle de la politique était de faire en sorte que les investissements soient possibles et viables, avant que les marches ne comprennent les possibilités économiques des technologies écologiques. Des partenariats publics privés étaient vitaux en ce qui concerne les nouveaux modèles de développement. Cependant il était préoccupant que l’environnement ne soit pas toujours une priorité des gouvernements et l’importance donnée aux ministères de l’environnement – qui devaient fonctionner à travers le spectre gouvernemental dans son entier – dans différentes nations, a été signalé.
Signalisation le long du chemin
Luis Ayala, secrétaire général de l’Internationale Socialiste, a introduit la déclaration qui allait être émise pas la Commission. Faisant suite à la réunion de Londres, où la Commission avait abordé les thèmes qui devaient être examinés, les priorités de ses travaux et défini le chemin à suivre, la réunion de Santiago avait donné l’opportunité de fournir d’autres indications le long de ce chemin, en soulignant les domaines de préoccupation cruciale aujourd’hui pour les sociaux-démocrates. Mettant en avant l’interdépendance du monde, dans lequel les crises avaient des impacts partout, comme c’était le cas du désarroi financier, a-t-il dit, la gouvernance mondiale n’était plus un concept mais un besoin urgent. Bali avait fourni une fenêtre d’opportunités mais le système multilatéral nécessitait un leadership et une compréhension des implications et des conséquences mondiales dans un monde en changement. Le développement devait aller de paire avec la durabilité, sans être dicté par les marchés, et une meilleure éducation était nécessaire. La réunion a adopté la Déclaration à l’unanimité.
Futures activités
La Commission a convenu que lors de sa prochaine réunion plénière en Suède en septembre, elle devrait considérer plus en profondeur les idées et propositions sur le financement, les transferts technologiques et les mesures d’atténuation, avant la prochaine conférence des Nations Unies sur le changement climatique à Poznan en Pologne en décembre 2008. Il a été suggéré que des ministres et représentants ayant des affinités similaires attendant de telles réunions pourraient se rassembler de façon informelle la veille pour continuer de bâtir un consensus.
Les questions qui seraient traitées par la Commission serait au sommet de l’ordre du jour du prochain XXIIIème Congrès de l’Internationale se tenant à Athènes, en Grèce, du 30 juin au 2 juillet. De plus, le changement climatique serait un domaine clé des discussions lors de la future réunion des maires socialistes de l’IS.
En ce qui concerne les réunions régionales, en raison des changements qui allaient être mis en place en ce qui concerne le nouveau Ministère de l’Environnement en Chine, le séminaire qui y avait été prévu allait devoir être reporté à une date ultérieure, mais les membres ont convenu d’évaluer la possibilité d’avancer la réunion proposée en Russie. Une école d’été, avec des jeunes et des leaders de l’opinion serait également considérée.