dimanche 27 avril 2008

GRAMSCI EST MORT EN CATHOLIQUE, SOUTIENT UN ARCHEVÊQUE ITALIEN


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ANTONIO GRAMSCI, 1942
GRAVURE LEOPOLDO MÉNDEZ
Le philosophe italien est décédé dans la nuit du 26 au 27 avril 1937, après avoir passé les dix dernières années de son existence dans les geôles fascistes.
 ANTONIO GRAMSCI
ILLUSTRATION JULIO IBARRA
Les temps sont durs pour les communistes italiens. Privés de toute représentation parlementaire depuis les élections législatives de 2008, revenus à la lumière grâce à la victoire d'un de leurs anciens députés, le travesti Vladimir Luxuria, dans un jeu de télé-réalité, les voilà obligés de disputer à l'Eglise leur figure tutélaire : Antonio Gramsci (1891-1937).

Le fondateur du Parti communiste italien (PCI) est-il mort en catholique dans l'hôpital romain de la Quisana, comme l'a prétendu, mardi 25 novembre, l'archevêque Luigi de Magistris, ancien adjoint de la Pénitencerie apostolique (un tribunal du Vatican chargé des problèmes de conscience) ? Le philosophe italien est décédé dans la nuit du 26 au 27 avril 1937, après avoir passé les dix dernières années de son existence dans les geôles fascistes.

Selon le prélat qui a fait cette annonce, Gramsci "avait dans sa chambre l'image de sainte Thérèse de l'enfant Jésus" et, durant les derniers jours de sa maladie, il demanda aux religieuses "de lui apporter l'image de l'enfant Jésus pour qu'il puisse l'embrasser". "Il est retourné vers la foi de son enfance", se réjouit monseigneur de Magistris, qui tient cette information du témoignage du frère d'une des religieuses qui ont accompagné l'agonie du philosophe...

Déjà en 1977, un autre ecclésiastique, Giuseppe Della Vedova, avait soutenu l'hypothèse d'une conversion in extremis de Gramsci. Il appuyait lui aussi sa thèse sur le témoignage d'une religieuse. Quoi qu'il en soit, les cendres du philosophe sont bel et bien conservées au cimetière des Anglais, à Rome. Ce cimetière a été créé au XIXe siècle pour y recevoir les dépouilles mortelles des étrangers non catholiques morts dans la Ville éternelle, alors gouvernée par les papes.

Mais la théorie d'un "retour à la foi" d'Antonio Gramsci n'est soutenue par aucun document. Cette absence de preuves incite les historiens et les fidèles à la plus grande prudence. La correspondance de la nièce russe du philosophe, Tatiana Schucht, proche de lui durant ses derniers jours, ne comporte aucune mention d'un rapprochement avec la religion catholique. Et les rapports de police dont il était l'objet, pas davantage. "Cette conversion n'est pas avérée, déclare Giuseppe Vacca, président de la Fondation Gramsci. Et si elle devait l'être il n'y aurait pas de quoi se scandaliser ni s'émerveiller. Cela peut arriver à tout le monde."

Le secrétaire de Refondation communiste, dernier avatar du PCI, Paolo Ferrero, soupçonne une opération politique. "Ce sont des déclarations ridicules et invérifiables faites pour démolir les mythes, s'insurge-t-il. Dans quelque temps, on nous expliquera que Gramsci était libéral parce que les communistes ne peuvent être que des assassins ou des repentis !"