dimanche 4 octobre 2015

CHILI : LE MERLU MENACÉ, LES PÊCHEURS RENTRENT BREDOUILLES

Le secrétaire d'Etat américain John Kerry, à l'origine de la première édition de ce congrès, en 2014 à Washington, sera présent, ainsi que le prince Albert de Monaco.

A Valparaiso, le groupe de pêcheurs a fait fi du mauvais temps - vent fort et pluies torrentielles - pour partir en recherche de merlu, au large de ce port pittoresque mondialement connu, après un mois de moratoire interdisant la capture de cette espèce, placée en état de "conservation critique".

Mais au bout de quelques heures, la déception est de mise.

"Les grands bateaux, avec plus de filets, les bateaux industriels, ils prennent ce qu'il y a de meilleur, et à nous il ne reste que le pire de la mer", raconte Pablo Leon.

"Chaque année il y a moins de merlu", soupire-t-il. "Nous sortons à cinq heures (du matin) et nous revenons avec rien".

Le long des 4.000 kilomètres de côtes chiliennes, les pêcheurs témoignent régulièrement d'un poisson moins abondant.

"La quantité de pêche qu'il y avait avant, cela n'avait rien à voir par rapport à maintenant. Avant il y avait beaucoup de choses, du chinchard par exemple, il y avait de tout", se souvient Freddy Parana, pêcheur depuis plus de quarante ans.

"Maintenant, tout ce qu'on a, c'est du merlu et de la seiche, c'est tout ce qui reste", raconte Freddy, qui est aussi trésorier du syndicat de pêcheurs de la crique El Membrillo, à Valparaiso.

- 'Il n'y a pas d'avenir' -

Ce phénomène ne survient pas qu'au Chili. Plusieurs études récentes ont montré que les populations d'animaux marins (mammifères, oiseaux, reptiles et poissons) ont été réduites de moitié depuis les années 1970 en raison d'une pêche excessive, de la pollution et du changement climatique.

La conférence de Valparaiso vise justement à obtenir des engagements en défense de la biodiversité marine, en se penchant sur la pêche durable, la pollution des eaux par les déchets en plastique, l'acidification des océans et la création de zones marines protégées.

"La situation est très critique au Chili, toute les ressources sont en diminution", s'inquiète Sebastian L. Klarian, du centre d'études pour la durabilité de l'université Andrés Bello, à Santiago.

"Au rythme actuel d'extraction (des espèces marines, ndlr), il n'y a pas d'avenir", affirme-t-il, affirmant que le nombre de merlus a déjà chuté de 40% ces dernières décennies au Chili.

En guise de protection, les autorités avaient établi, pour tout le mois de septembre, un moratoire interdisant la pêche de cette espèce, à une époque où elle est en pleine reproduction. Mais dès jeudi la pêche a repris.

Les experts préconisent un moratoire plus étendu, mais cela mettrait en péril la pêche artisanale. D'ores et déjà, une limite annuelle a été fixée à 23.000 tonnes.

"Nous devons réussir à réduire les taux de capture, savoir faire l'équilibre entre les personnes qui vivent de cette ressource et aussi l'écosystème", plaide Valesca Montes, coordinatrice de la pêche au sein de l'organisation de défense de l'environnement WWF Chili.

La pêche à outrance du merlu a aussi provoqué une maturation sexuelle plus précoce chez cette espèce, modifiant sa génétique et réduisant la taille moyenne du poisson, entre autres effets néfastes, raconte Mme Montes.

Et même si les autorités tentent d'agir, la pêche illégale est un autre fléau, atteignant au Chili quatre fois le volume de l'activité légale en ce qui concerne le merlu.

Au niveau mondial, on estime que 11 à 26 millions de tonnes de poissons sont pêchées illégalement chaque année.

AFP