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MONUMENT COMMÉMORATIF À L'EMPLACEMENT OÙ ORLANDO LETELIER ET RONNI MOFFITT FURENT ASSASSINÉS EN 1976, SHERIDAN CIRCLE, WASHINGTON. PHOTO DOUG MILLS |
Il n’y a plus aucun doute aujourd’hui que le chef de la police secrète de l’époque de la dictature chilienne, Manuel Contreras, et surtout son patron, Augusto Pinochet avaient commandité cet acte de terrorisme sur le sol américain. L’information a été rendue publique à l’occasion de la visite du secrétaire d’État américain John Kerry à Santiago le 5 octobre dernier où il a été reçu par la présidente Michelle Bachelet. Ce jour-là, le responsable américain a en effet remis à la dirigeante 282 documents liés au Chili rédigés par les services américains et classifiés jusqu’à ce jour.
La bienveillance des États-Unis
L’un d’entre eux révèle que l’exécutif américain savait à quoi s’en tenir quant à cet attentat depuis le 6 octobre 1987 au moins. À cette date, George Shultz, secrétaire d’État de 1982 à 1989, adresse un rapport à destination de son supérieur, le président Reagan. La missive est éloquente à plus d’un titre car elle cible non seulement la responsabilité de Pinochet dans la mort de son opposant politique et de sa collaboratrice mais indique le changement de perception du despote par la diplomatie américaine qui jusqu’ici lorgnait d’un œil bienveillant sur ce conservateur anticommuniste.
George Schultz commence par déplorer l’absence d’élections libres au Chili et l’imminence de la reconduction de Pinochet dans sa fonction à la faveur d’un plébiscite. Il poursuit en mentionnant une note de la CIA qui lui est passée entre les mains et expliquant qu’il existe «une preuve décisive que le président Pinochet a donné l’ordre à son chef des services secrets d’accomplir ces meurtres».
Un crime resté impuni
PHOTO VICTOR RUIZ CABALLERO |
Schultz fait mine d’hésiter à recommander l’inculpation de Pinochet dans cette affaire mais n’en reste cependant pas là: «C’est l’exemple flagrant de l’implication directe d’un chef d’État dans un acte relevant du terrorisme d’État et dérangeant à double titre car il a eu lieu dans notre capitale et est l’œuvre d’un gouvernement normalement ami.»
Newsweek qui relaie la nouvelle rappelle cependant que, Pinochet, mort à 91 ans en 2006, n’a jamais été condamné pour aucun des nombreux crimes qui ont émaillé son règne entre 1973 et 1990.