mercredi 9 août 2017

DEUX PSYCHOLOGUES JUGÉS POUR LES MÉTHODES DE TORTURE DE LA CIA APRÈS LE 11 SEPTEMBRE 2001


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LES DEUX PSYCHOLOGUES, JAMES MITCHELL ET BRUCE JESSEN, 
 FURENT RECRUTÉS PAR LA CIA EN 2002 POUR CONCEVOIR ET 
AIDER À MENER DES INTERROGATOIRES DE 
SUSPECTS CAPTURÉS EN AFGHANISTAN ET AILLEURS. 
ILLUSTRATION PHOTO DE  THE NEW YORK TIMES
James Mitchell et Bruce Jessen avaient encouragé l’utilisation de la simulation de noyade, de la faim ou le fait d’attacher des détenus dans des positions douloureuses.
PHOTO CAROLYN KASTER
Deux psychologues qui ont aidé à concevoir les interrogatoires de la CIA après le 11 septembre 2001 seront jugés en septembre pour avoir encouragé l’utilisation de méthodes de torture comme la simulation de noyade (waterboarding), la faim ou le fait d’attacher les détenus dans des positions douloureuses. Un tribunal fédéral de l’État de Washington a autorisé lundi 7 août la tenue d’un procès au nom de trois anciens prisonniers, dont l’un est mort dans une prison de la CIA à la suite d’interrogatoires particulièrement violents.
ILLUSTRATION
AMERICAN CIVIL LIBERTIES UNION
Mené par l’American Civil Liberties Union (ACLU), la grande organisation américaine de défense des libertés, ce procès sera le premier des méthodes de torture utilisées par les autorités américaines dans leur « guerre contre la terreur ». Le tribunal a rejeté les tentatives du gouvernement américain d’obtenir un règlement négocié pour empêcher un procès public, arguant de la nécessité de protéger des renseignements classifiés.

80 millions de dollars

Les deux psychologues, James Mitchell et Bruce Jessen, furent recrutés par la CIA en 2002 pour concevoir et aider à mener des interrogatoires de suspects capturés en Afghanistan et ailleurs. Les deux hommes ont reçu un montant de 80 millions de dollars (68 millions d’euros) pour leur travail, notamment pour les interrogatoires de Khalid Cheikh Mohammed, le cerveau des attentats du 11 septembre 2001, et d’Abou Zoubaydah, un autre haut responsable d’Al-Qaida.

L’ACLU considère que MM. Jessen et Mitchell sont responsables et qu’ils ont profité financièrement de tortures illégales à l’encontre des trois plaignants : le Tanzanien Suleiman Abdullah Salim, le Libyen Mohamed Ahmed Ben Soud et l’Afghan Gul Rahman. Les deux premiers ont été libérés après plusieurs années de détention, le troisième est mort d’hypothermie dans une cellule de la CIA en novembre 2002, après ce que l’ACLU a décrit comme deux semaines de « tortures brutales ».

ILLUSTRATION
AMERICAN CIVIL LIBERTIES UNION
« C’est un jour historique pour nos clients et pour tous ceux qui demandent que les responsables de la torture répondent de leurs actes », a déclaré l’avocat de l’ACLU Dror Ladin dans un communiqué.
« La décision du tribunal signifie que pour la première fois les personnes responsables du programme brutal et illégal de torture de la CIA seront confrontées aux conséquences judiciaires de leurs actes. Nos clients attendent justice depuis longtemps. »

Le précédent du Zyklon B

Le tribunal a rejeté les arguments des psychologues selon lesquels ils n’étaient pas responsables de tous les interrogatoires de la CIA et n’avaient rien à voir avec les interrogatoires de deux des plaignants. Ils ont également affirmé ne pas être responsables de décisions spécifiques d’utiliser des « techniques d’interrogatoire renforcées » contre les plaignants, et s’être contentés de fournir à la CIA une liste de méthodes parmi lesquelles l’agence de renseignement américaine pouvait choisir.

Les deux psychologues ont appuyé leur argumentation sur le procès d’un technicien, après la seconde guerre mondiale, qui avait fourni du gaz Zyklon B pour les camps d’extermination, mais qui ne fut pas tenu pour responsable des crimes de masse nazis. Ils ont également souligné que la décision d’utiliser ces méthodes de torture avait été prise par la CIA et approuvée par le ministère de la justice et qu’ils ne pouvaient donc pas en être tenus pour responsables.