lundi 5 février 2018

L’ÉQUATEUR ENTRE DANS L’ÈRE POST-CORREA



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LE PRÉSIDENT LENIN MORENO EXPRIME SON VOTE.
PHOTO AFP
L’Équateur est entré dimanche dans l’ère du post-corréisme en votant contre la réélection indéfinie du chef de l’État, lors d’un référendum convoqué par le président Lenin Moreno pour barrer la route à son ancien allié et prédécesseur Rafael Correa.
LE PRÉSIDENT ÉQUATORIEN LENIN MORENO SE FÉLICITE DES 
RÉSULTATS DU RÉFÉRENDUM, LE 4 FÉVRIER 2018 À QUITO 
PHOTO JUAN RUIZ 


Le « oui » à la suppression de cette loi, initiée par l’ex-président Correa en 2015 et qui permet à tous les élus de briguer un nombre de mandats indéterminé, l’a emporté à 64% des voix, selon le décompte préliminaire du Conseil national électoral (CNE).

Le «oui» à la suppression de cette loi, initiée par l’ex-président Correa en 2015 et qui permet à tous les élus de briguer un nombre de mandats indéterminé, l’a emporté à 64% des voix, selon le décompte préliminaire du Conseil national électoral (CNE).

Quelques minutes après l’annonce de ce résultat, Lenin Moreno a salué la «claire et importante victoire qu’a obtenu le +oui+» aux sept questions de ce référendum auquel étaient convoqués 13 millions d’électeurs.

«La confrontation est terminée, l’heure est revenue de nous embrasser», a affirmé le président, aujourd’hui principal ennemi de Rafael Correa.

De son côté, l’ancien chef de l’État, qui perd désormais la possibilité de revenir au pouvoir lors de la présidentielle de 2021, a félicité ses partisans, estimant dans un tweet qu'«aucun mouvement de ne peut atteindre les 36% obtenus en si peu de temps et lors d’une lutte aussi inégale».

- Vers la «décorréisation» de l’État -

Les électeurs ont aussi approuvé à 63% des voix le remaniement de l’organe qu’il avait créé pour nommer les représentants des pouvoirs publics, dont le procureur général, ouvrant la voie à une «décorréisation» totale de l’État.

M. Moreno, qui a été vice-président de M. Correa de 2007 à 2013, est devenu depuis sa prise de fonction son plus sévère critique, l’accusant d’avoir gaspillé la manne pétrolière et d’avoir dirigé un gouvernement corrompu.

Pour le charismatique mais polémique Rafael Correa, Lenin Moreno est un « traître » qui s’est vendu à l’opposition de droite et cherche à à instaurer un «présidentialisme absolu ».

Se disant victime de « persécution et harcèlement », il accuse son successeur de vouloir utiliser ce scrutin pour le marginaliser définitivement, via la question visant à écarter de la vie politique les condamnés pour corruption.

«Ils vont inventer un crime pour me disqualifier. C’est la nouvelle stratégie de la droite pour détruire les dirigeants progressistes comme il l’ont fait avec Dilma (Rousseff, ex-présidente du Brésil), Lula (son prédécesseur) ou Cristina (Kirchner, ex-présidente d’Argentine)», a affirmé Rafael Correa à l’AFP.

- Exclusion de la politique -

Parallèlement, son ancien vice-président et allié Jorge Glas, réélu en binôme avec M. Moreno, a été depuis emprisonné et condamné pour avoir reçu des pots-de-vin du groupe de BTP brésilien Odebrecht, un scandale de corruption qui a éclaboussé d’autres fonctionnaires de l’ancien gouvernement.

Selon le politologue Simon Pachano, si au final «Rafael Correa obtient 30 à 35% des voix, cela peut être considéré comme un triomphe (...) cela va lui donner une présence politique forte dans le pays ».

« Mais la question sur la corruption (...) peut l’exclure totalement de la politique s’il est condamné, ce qui semble pouvoir survenir », a expliqué à l’AFP ce professeur de la Faculté latino-américaine des sciences sociales (Flacso) de Quito.

Avec M. Correa comme allié à l’époque, Lenin Moreno, 64 ans, a remporté la présidentielle d’avril, avec une faible avance sur le banquier de droite Guillermo Lasso.

L’ancien président, qui vit en Belgique, pays de son épouse, est revenu en Equateur en janvier mener campagne pour le « non ». Il a averti qu’en cas de défaite, il militerait pour une Assemblée constituante qui destituerait Lenin Moreno et rédigerait une nouvelle Constitution.

« C’est la stabilité économique, la stabilité politique qui se jouent » avec ce scrutin, a déclaré à l’AFP une électrice Carolina Illescas, employée de 31 ans.

AFP