lundi 19 novembre 2018

ASSASSINAT DE NARUMI : PREUVES ACCABLANTES ET CAP SUR LE CHILI POUR LE JUGE


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LA JEUNE JAPONAISE DISPARUE
En l’absence du corps de l’étudiante japonaise, présumée assassinée par son ex-petit ami en décembre 2016, les suites de ce crime hors normes s’écriront au Chili, a expliqué ce lundi le parquet de Besançon. Des détails sur les preuves à l’encontre du suspect ont été révélées.
Willy GRAFF
NICOLAS ZEPEDA CONTRERAS 
LE PRINCIPAL SUSPECT  
L’annonce de la conférence de presse du procureur de la République, Etienne Manteaux, ce lundi à Besançon, pouvait faire naître une lueur d’espoir. Bientôt deux ans après les faits, le corps de Narumi Kurosaki - présumée assassinée par son ex-petit ami Nicolas Zepeda-Contreras - aurait-il été enfin retrouvé ? La réponse est non.

« On a cherché, cherché, cherché... Des moyens considérables ont été engagés pour cela. Nous ne voyons pas ce qui peut encore être fait pour retrouver le corps de Narumi. L’antenne de police judiciaire de Besançon est en train de clôturer son enquête. Tout ce qui pouvait être fait a été diligenté », analyse le procureur. Pour Étienne Manteaux, qui a listé les preuves accablantes accumulées contre l’ex-amant jaloux de l’étudiante (lire encadré ci-dessous), la chose est entendue : « La thèse de l’assassinat est plus que jamais retenue par le magistrat instructeur, et Nicolas Zepeda-Contreras apparaît plus que jamais comme le suspect numéro 1 ».

Face à des dizaines de journalistes du Japon, où l’affaire Kurosaki avait déclenché un tsunami d’émotions, le procureur a précisé, ce lundi, les suites judiciaires de ce dossier de crime sans corps, qui concerne trois pays, sur trois continents différents.

Aller plaider le dossier au Chili, en vue d’une éventuelle extradition

« Nicolas-Zepeda est au Chili, il va donc falloir solliciter ce pays via la coopération pénale internationale. Dans les semaines à venir, la juge d’instruction de Besançon va demander pouvoir se rendre sur place pour aller l’interroger », annonce le parquet. L’interroger pour le mettre face à ses contradictions, et elles sont nombreuses. Insister aussi directement auprès des autorités policières et judiciaires sud-américaines sur la gravité des charges pesant à son encontre… Une stratégie à ces échanges directs et oraux se dessine : celle de déverrouiller la porte d’une éventuelle extradition vers la France, compromise par l’absence de corps.

Étienne Manteaux a livré énormément de détails sur l’enquête, ce lundi face aux médias français et japonais. Un coup de poker qui, en creux, laisse entrevoir à quel point la gestion de ce dossier est délicate. Fournir publiquement tant d’informations permet au mis en cause d’adapter sa version. Par le passé, Zepeda-Contreras, qui nie toute culpabilité, a déjà prouvé qu’il n’hésitait pas à faire varier son discours, en fonction des éléments révélés dans la presse. Le procureur veut malgré tout envoyer un signal fort au Chili. Toujours dans l'optique de faire pencher la balance, le moment venu, en faveur d'une possible extradition.

Le procureur de Besançon a détaillé ce lundi les charges qui accablent Nicolas Zepeda-Contreras.

Contrairement à ce que lui-même prétendait initialement, sa présence sur les lieux du crime, à Besançon, ne fait aucun doute. Ce 4 décembre 2016, vidéos de caméras de surveillance à l’appui, le Chilien a été vu sortant d’un restaurant d’Ornans en compagnie de Narumi à 21 h 57, puis à 22 h 58 à leur arrivée à la résidence universitaire. C’est l’ultime image de la Japonaise vivante. Dans la nuit, à 3 h 20, une dizaine d’étudiants ont entendu un cri d’angoisse, puis un bruit sourd. L’empreinte digitale de Zepeda-Contreras a été retrouvée sur une tasse de la chambre de Narumi, où rien ne manquait. Excepté une valise et une couverture.

Pour le parquet, la préméditation de l’homicide laisse peu de doute. On le savait jaloux et possessif. Il n’aurait pas supporté la rupture initiée par Narumi courant septembre, ni son rapprochement avec un autre étudiant bisontin. Des échanges menaçants ont été découverts par les enquêteurs. Ce jeune enseignant-chercheur a réservé dès le 17 novembre une voiture de location, qu’il a récupérée le 30 novembre à Genève, puis restituée pleine de boue le 7 décembre. Entre-temps, avant et après la nuit du 4-5 décembre, ce véhicule a été localisé dans des endroits reculés et forestiers, notamment la forêt de Chaux, où la police imagine qu’il s’est débarrassé du corps de sa victime. Dès le 1er décembre, le Chilien avait également acheté dans un magasin de bricolage dijonnais des boîtes d’allumettes, des produits inflammables et pulvérisateur de détergent.

Après le 5 décembre, les messages prétendument envoyés par Narumi sont en réalité imputés à son assassin présumé, qui aurait utilisé le téléphone et l’ordinateur de la jeune Japonaise pour semer le doute, gagner du temps et fuir au Chili. La carte bancaire de l’étudiante a également été utilisée pour acheter un billet de train Besançon-Lyon. Les policiers ont réentendu tous les passagers du wagon, ce 6 décembre : le siège de Narumi était resté désespérément vide.

Les preuves qui incriminent Nicolas Zepeda-Contreras
NICOLAS ZEPEDA-CONTRERAS 
Le procureur de Besançon a détaillé ce lundi les charges qui accablent Nicolas Zepeda-Contreras.
Contrairement à ce que lui-même prétendait initialement, sa présence sur les lieux du crime, à Besançon, ne fait aucun doute. Ce 4 décembre 2016, vidéos de caméras de surveillance à l’appui, le Chilien a été vu sortant d’un restaurant d’Ornans en compagnie de Narumi à 21 h 57, puis à 22 h 58 à leur arrivée à la résidence universitaire. C’est l’ultime image de la Japonaise vivante. Dans la nuit, à 3 h 20, une dizaine d’étudiants ont entendu un cri d’angoisse, puis un bruit sourd. L’empreinte digitale de Zepeda-Contreras a été retrouvée sur une tasse de la chambre de Narumi, où rien ne manquait. Excepté une valise et une couverture.
Pour le parquet, la préméditation de l’homicide laisse peu de doute. On le savait jaloux et possessif. Il n’aurait pas supporté la rupture initiée par Narumi courant septembre, ni son rapprochement avec un autre étudiant bisontin. Des échanges menaçants ont été découverts par les enquêteurs. Ce jeune enseignant-chercheur a réservé dès le 17 novembre une voiture de location, qu’il a récupérée le 30 novembre à Genève, puis restituée pleine de boue le 7 décembre. Entre-temps, avant et après la nuit du 4-5 décembre, ce véhicule a été localisé dans des endroits reculés et forestiers, notamment la forêt de Chaux, où la police imagine qu’il s’est débarrassé du corps de sa victime. Dès le 1er décembre, le Chilien avait également acheté dans un magasin de bricolage dijonnais des boîtes d’allumettes, des produits inflammables et pulvérisateur de détergent.
Après le 5 décembre, les messages prétendument envoyés par Narumi sont en réalité imputés à son assassin présumé, qui aurait utilisé le téléphone et l’ordinateur de la jeune Japonaise pour semer le doute, gagner du temps et fuir au Chili. La carte bancaire de l’étudiante a également été utilisée pour acheter un billet de train Besançon-Lyon. Les policiers ont réentendu tous les passagers du wagon, ce 6 décembre : le siège de Narumi était resté désespérément vide.
Entre « semi-échec » et « semi-succès », selon le procureur

Les efforts considérables menés pour élucider la disparition de cette jeune Japonaise, si brillante, souriante et séduisante, laissent un sentiment mitigé. « Est-ce un échec ? », ose un journaliste japonais. Le procureur de la République, Étienne Manteaux, se refuse à un tel constat : « Un semi-échec car le suspect est réfugié au Chili et que le corps n’a pas été retrouvé, mais un semi-succès car les investigations techniques ont permis de faire un pas de géant vers ce suspect. »

Les principaux contours du macabre puzzle sont connus, mais quelques pièces font tristement défaut. Vers 3h20, sur le campus de la Bouloie, un cri d’angoisse a déchiré la nuit… Deux ans plus tard, la chambre 106 occupée par Narumi n’a pas révélé tous ses secrets. Seront-ils un jour dévoilés ? Outre Nicolas Zepeda-Contreras, qui est le dernier à avoir côtoyé l'étudiante vivante, c’est désormais le Chili qui a les cartes en main.

Si procès il y a, où se tiendra-t-il ? Trois options apparaissent. La moins probable serait que la France fasse une "dénonciation officielle" au profit de la justice chilienne, libre ensuite de traiter ce dossier à sa guise. La plus probable serait qu'un procès se tienne à Besançon, en l'absence de l'accusé. L'alternative parfaite serait qu'en dépit de l'absence de corps, le Chili accepte la demande d'extradition que formulera la France dans les mois venir, et que Zepeda-Contreras répondent de ces accusations en personne, devant des jurés bisontins.