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LE SIÈGE DE LA BANQUE FRANÇAISE SOCIÉTÉ GÉNÉRALE À LA DÉFENSE PHOTO REUTERS |
La banque versera la somme pour mettre fin aux poursuites engagées contre elle aux États-Unis
Les Français rêvent sans doute de temps meilleurs, où l’hégémonie du dollar pourra être contestée. Pour l’heure, ils sont pieds et poings liés par la devise américaine. Quatre ans après BNP Paribas, qui avait dû payer 9 milliards de dollars (7,9 milliards d’euros au cours actuel) à la justice américaine pour avoir utilisé le billet vert afin de commercer avec des pays sous embargo des Etats-Unis, c’est au tour de la Société générale de passer à la caisse.
PHOTO BERTRAND LANGLOIS |
« Aujourd’hui, la Société générale a admis qu’elle avait volontairement violé les lois de sanctions américaines et caché durablement ces violations, ce qui a conduit à des milliards de flux de capitaux illégaux via le système financer américain », a déclaré lundi le procureur de New York, Geoffrey Berman, dans un communiqué. « Les autres banques devraient en prendre de la graine. La mise en œuvre des lois américaines imposant des sanctions est et continuera d’être l’une des priorités de ce tribunal et des agences américaines. »
Le représentant de l’Internal Revenue Service (le fisc américain), James Robnett, a ajouté que « la mise en œuvre des sanctions [était] d’une importance vitale pour notre sécurité nationale et l’intégrité de notre système financier ». Cet avertissement laisse entendre que l’attitude américaine sur les sanctions décidées ou à venir sur l’Iran sera des plus dures.
2 500 transactions pour 13 milliards de dollars
Les Américains ont détaillé les griefs émis à l’encontre de la Société générale. Entre 2004 et 2010, la banque française a octroyé des facilités de paiement à des banques et institutions cubaines. Au total, près de 2 500 transactions ont eu lieu pour un montant de 13 milliards de dollars par le truchement du système américain. La plupart visaient à financer des achats et ventes de pétrole entre une entreprise de trading néerlandaise et l’entreprise d’État cubaine ayant le monopole de la production et du raffinage de brut.
La justice américaine reproche à la Société générale d’avoir cherché à masquer ces transactions. Par exemple, 500 paiements libellés en dollars ont été dissimulés en transitant par une banque espagnole, tandis que les employés de la banque étaient invités à omettre toute référence à Cuba dans les messages accompagnant les transferts de fonds.
À partir de 2004, la direction des risques de la Société générale a commencé à tirer le signal d’alarme, notant dans un courriel que « toute découverte ou fuite » concernant Cuba entraînerait « la peine la plus rude » et que la justice pénale américaine se concentrait sur les paiements effectués en dollars envers les pays sous embargo. Il a alors été décidé de réduire la voilure.
En 2006, des mémos internes ont mis au jour les craintes des employés du groupe Société générale, lesquels ont vu que les Américains enquêtaient sur la violation de l’embargo iranien et avaient sanctionné ABN Amro. « En enquêtant sur un pays comme l’Iran, les autorités américaines peuvent mettre le doigt sur des mouvements de fonds dans d’autres pays – tel Cuba. Du moins, c’est ce que nous avons compris. Bien sûr, nous n’avons pas parlé du cas Cuba avec le département conformité de la Société générale à New York. Mais nous avons compris que l’Iran était, dans une certaine mesure, un “moindre mal” d’où le “pire” pourrait émerger », s’inquiétait, dans un courriel daté du 7 février 2006, un salarié de la Société générale, cité par l’accusation américaine.
L’essentiel des transactions a été stoppé en 2007, ce qui n’a pas empêché « la Société générale de poursuivre de telles transactions (…) jusqu’en octobre 2010 », accuse la justice américaine. A cette date, la facilité financière accordée à Cuba a été faite sans dollar. La banque n’a jamais rien déclaré aux autorités américaines, mais s’est fait prendre sur un autre dossier : le Soudan.
« Nous reconnaissons et regrettons les manquements identifiés »
Deux transactions avec Khartoum ont été bloquées par des agences américaines en 2012, conduisant la banque à révéler 22,8 millions de dollars de transactions avec ce pays et d’autres entités sous embargo. Il a fallu attendre 2014 pour que la Société générale, sous la pression d’une enquête générale des autorités américaines, révèle l’existence de la facilité de crédit cubaine, coopère avec la justice américaine et s’engage à renforcer ses procédures de contrôle et de conformité internes. Un audit extérieur évaluera dans dix-huit mois les progrès effectués à New York.
Dans un communiqué, la banque précise que « le montant [de la pénalité] est intégralement couvert par la provision pour litiges inscrite dans les comptes de Société générale. Ces accords n’auront pas d’impact supplémentaire sur les résultats de la banque en 2018 ». Son directeur général, Frédéric Oudéa, a battu sa coulpe :
« Nous reconnaissons et regrettons les manquements identifiés dans le cadre de ces enquêtes et nous avons coopéré avec les autorités américaines pour mettre un terme à ces dossiers. Ces accords, qui font suite aux enquêtes clôturées plus tôt cette année, permettent à la banque de tourner la page des litiges du passé les plus importants ».
Début juin, la banque avait déjà accepté de verser environ 1,3 milliard de dollars aux autorités américaines et au Parquet national financier français pour mettre fin à deux litiges aux États-Unis relatifs au taux interbancaire Libor et au dossier du fonds souverain libyen. L’action a perdu 23 % de sa valeur depuis le début de l’année, une performance légèrement pire que celle du secteur.
Arnaud Leparmentier (New York, correspondant)
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LE BLOCUS CONTRE CUBA |
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