dimanche 2 février 2020

POURQUOI LE CHILI CONNAÎT-IL UNE NOUVELLE FLAMBÉE DE VIOLENCE?

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PHOTO REUTERS
Quatre morts en trois jours, des magasins pillés, des commissariats attaqués… Cette semaine, le Chili, secoué par une crise sociale historique depuis octobre, a renoué avec la violence. 
Le début de l'année avait pourtant été synonyme d'accalmie après des semaines d'insurrection qui avaient fait plus de 25 morts. Si elles ne sont pas directement liées au mouvement de l'automne, les émeutes des derniers jours sont la manifestation des fortes tensions qui traversent une société très fragilisée. Cette fois, ce n'est pas l'augmentation du ticket de métro qui a enflammé Santiago et les autres grandes villes du pays, mais la mort mardi d'un fan de football, heurté par un camion de la police à l'extérieur d'un stade.

Les divers clubs de supporters du pays comptent désormais parmi les farouches opposants au président Sebastián Piñera et n'hésitent pas à faire le coup de poing avec la police. Dans un pays jusqu'alors réputé comme l'un des plus stables d'Amérique latine, le recours à la violence semble devenu plus que fréquent. Dans une note du think tank FPP, l'historien Mauricio Rojas s'en inquiète : « Nous sommes confrontés à un vide de représentation rempli par une grande diversité de nouveaux acteurs sans beaucoup plus de légitimité que celle de ne pas appartenir à l'élite et de pouvoir se faire entendre à travers la force et, dans de nombreux cas, la violence. »

Des réformes annoncées


La brutalité des forces de l'ordre, qui a fait dire vendredi à la Commission interaméricaine des droits de l'homme que le Chili traversait « une grave crise en matière de droits de l'homme », ne fait qu'ajouter à la tension. A ce climat se superpose une exaspération sociale loin d'être éteinte. Entre 55 et 60% des Chiliens disent encore soutenir le mouvement de contestation, qui, tous les vendredis, organise des manifestations plus ou moins suivies dans la capitale.

Pourtant, le président Piñera a annoncé une série de réformes censées corriger les errements d'un système ultralibéral et ramener le calme : augmentation de 50% du minimum vieillesse, cotisations des employeurs au régime de retraites, gel des tarifs de l'électricité… Il a promis un référendum le 26 avril pour changer la Constitution écrite sous Pinochet. Sauf qu'il est, comme le reste des institutions, totalement discrédité. Selon un récent sondage, seuls 6% des Chiliens l'approuvent. Quant aux partis politiques, qui pourraient canaliser la colère, ils ont perdu la confiance de la population (2%).