Les Mapuches, peuple autochtone du sud du Chili, luttent pour récupérer leurs terres ancestrales annexées depuis les années quatre-vingt par d’importantes compagnies, principalement hydroélectriques et forestières. La politique économique du Chili est en effet basée sur une grande ouverture à l’investissement privé qui a conduit à la vente de la plupart de ses ressources naturelles à des multinationales.
Les actions violentes du mouvement mapuche - barrages d’autoroutes, incendies de camions, occupations de fermes - sont régulièrement considérées comme des actes terroristes par les autorités, et jugées comme tels grâce à la loi antiterroriste établie par le dictateur Augusto Pinochet en 1984. Cette loi permet d’assimiler la destruction de biens privés à un acte terroriste et de juger les inculpés selon un cadre exceptionnel qui diminue sensiblement leurs droits. Des militants ont ainsi été condamnés à dix ans de prison pour incendie de véhicule.
Prière et veillée pour Mendoza Collio Photo Antitezo chez Flickr
Nibaldo Huenuman, Mapuche, défend les droits de son peuple au sein du Parti humaniste. « La violence vient d’abord de l’État, affirme-t-il. Ma communauté est encerclée de militaires en postes fixes. C’est une forme de violence. » Il regrette l’absence de dialogue avec le gouvernement qui a refusé de recevoir la délégation de Mapuches venue se présenter le mois dernier au palais présidentiel, à 700 kilomètres de leur territoire.
La mort de Collio, abattu dans le dos par l’armée alors qu’il ne portait pas d’arme, provoque un scandale politique. Solidaire du mouvement mapuche, la présidente Michelle Bachelet a pourtant échoué dans la résolution de ce conflit et n’a pas tenu sa promesse de ne pas utiliser la loi antiterroriste contre les militants. Le dialogue est bloqué, les Mapuches refusant à présent de recevoir la délégation gouvernementale envoyée suite au décès du jeune homme.
Si le parti de Bachelet a remporté toutes les présidentielles depuis le départ de Pinochet en 1990, c’est cette fois un candidat de l’opposition de droite, Sebastian Piñera, qui est en tête dans les sondages des élections qui auront lieu en décembre. Entrepreneur sympathisant de Sarkozy, Piñera se distingue en ne montrant aucune solidarité pour les Mapuches. Ses appels à appliquer plus systématiquement la loi antiterroriste contre eux, mais aussi contre les grévistes et manifestants en général, font craindre un revirement sécuritaire.
Emmanuelle Lebhar