C'est la cruelle expérience que vient de vivre Sebastian Piñera, le nouveau président du Chili. Celui qui a ramené la droite chilienne au pouvoir, après vingt ans de gouvernement de centre gauche et les deux mandats de la populaire Michelle Bachelet, pourrait considérer que son accession au pouvoir suprême lui a déjà valu la perte de 1 milliard de dollars…
En effet, pour accéder à la tête de l'Etat chilien, Sebastian Piñera, qui n'est pas un nouveau venu en politique puisqu'il avait déjà été candidat à la présidentielle de 2005, s'était engagé à céder sa participation de 26 % détenue depuis 1988 dans la compagnie aérienne nationale LAN. L'opération entamée avant son investiture et ralentie par les conséquences du tremblement de terre qui a ravagé le Chili en février 2010, s'est conclue par une vente à la famille Cueto, l'autre actionnaire de référence de la compagnie. Elle lui rapporta environ 1,5 milliard de dollars.
Une somme rondelette, mais qui aurait pu l'être plus encore. En effet, suite à l'annonce, le 13 août dernier, de la prise de contrôle par LAN de sa concurrente brésilienne TAM, dans le but de constituer « LATAM » le plus important transporteur aérien d'Amérique latine, l'action de LAN s'est envolée, faisant passer la valorisation d'un bloc de 26 % à 2,5 milliards de dollars, soit 1 milliard de plus que trois mois plus tôt.
Ironie du sort, à la veille de l'annonce de la fusion, Sebastian Piñera déclarait à une radio, sur la base de la croissance organique de LAN, que son élection à la présidence lui avait coûté « 700 millions de dollars ». Niant toute amertume, il ajoutait : « Je suis heureux de faire ce que je fais. » Le lendemain, l'addition était gonflée de 300 millions !
Mais la placidité de Sebastian Piñera s'explique sans peine. Encore propriétaire de la chaîne Chilevision et actionnaire de Colo Colo, le club de football star du pays, celui que l'on surnomme le « Berlusconi chilien » se situe tout de même déjà à la 437 e place du classement Forbes des hommes les plus riches du monde !
PHILIPPE BERTRAND, Les Echos