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Les présidentes du Chili, du Brésil et d'Argentine connaissent un début d'année difficile, marqué par une série de scandales sur fond de difficultés économiques. Les faits - Respectivement, première, deuxième et cinquième puissances d'Amérique du Sud, le Brésil, l'Argentine et le Chili se trouvent confrontés à des crises à la fois économiques et politiques. Inaugurant son deuxième mandat présidentiel, Dilma Rousseff doit gérer le scandale Petrobras. Cristina Kirchner, son homologue argentine, se trouve pareillement au coeur d'une ténébreuse affaire d’Etat à la suite du décès suspect d'un juge. Enfin, le retour à la présidence chilienne de Michelle Bachelet apparaît plus difficile que prévu.Par Gilles Sengès
Les vacances parlementaires arrivent au bon moment pour Michelle Bachelet. La présidente du Chili a connu un début d'année difficile. Entre le brutal coup de frein d'une économie dont la croissance est tombée de 4% en 2013 à 1,8% l'an dernier, le soupçon d'un financement illicite de sa dernière campagne présidentielle et son très contesté projet de loi sur l'interruption de grossesse, la magie qui a entouré son retour au pouvoir en mars 2014 s'est vite estompée. Son taux d'approbation est tombé à 44% dans l'opinion publique. Maigre consolation, le discrédit de l'opposition de droite, impliquée dans une affaire de corruption, est au plus haut.
La trêve estivale passée, le mois de mars s'annonce tout aussi animé alors que le parlement va débattre de la dépénalisation de l'avortement en cas de risque pour la vie de la mère, de non viabilité du fétus et de viol. Ce qui demeure révolutionnaire dans un Chili où l'église catholique jouit encore d'une influence considérable. Michelle Bachelet a dû se séparer de sa ministre de la Santé, à la veille du nouvel an, suite à la publication d’une interview dans laquelle l'intéressée accusait de nombreuses familles conservatrices d'avoir fait avorter leurs filles dans des cliniques privées. Le parti démocrate-chrétien qui figure dans la coalition gouvernementale aux côtés des communistes et des socialistes se trouve sous une forte pression.
Le ton promet d'être à peine moins passionnel autour du projet de réforme du marché du travail avec des dispositifs plus contraignants en matière de conventions collectives et de respect du droit de grève que les milieux d'affaires n'ont de cesse de dénoncer. «L'incertitude sur l'impact des réformes politiques paraît affecter l'investissement», abondent les experts du Fonds monétaire international qui a abaissé, le 25 janvier dernier, ses prévision de croissance pour le Chili en 2015 de 3,3 à 2,8% après une timide hausse de 1,4% l'an dernier.
La trêve carnavalesque promet aussi d'être salutaire pour Dilma Rousseff dont le second mandat à la présidence du Brésil a démarré de la pire des manières tant sur le plan politique qu'économique. Après la démission spectaculaire de la directrice générale de Petrobras, Maria das Graças Foster, et de cinq hauts responsables de Petrobras, au centre d'une affaire de corruption impliquant le Parti des travailleurs au pouvoir et ses alliés au gouvernement, il lui faut mettre en place une nouvelle équipe. A la veille de la réunion ce vendredi du conseil d'administration du groupe pétrolier, les candidats ne semblent pas se presser au portillon. Le nouveau patron devra tout à la fois redresser les comptes de la compagnie et rassurer les investisseurs en sachant que le scandale n'a pas fini de provoquer des secousses. Loin de là.
Aucune trêve ne semble promise à Cristina Kirchner à neuf mois de la fin de son mandat. Après avoir bataillé tout l'an dernier avec des fonds vautours américains sur la restructuration de la dette de son pays, la présidente de l'Argentine se trouve aujourd'hui confrontée à un fantôme. Celui du juge Nisman, retrouvé mort à son domicile, le 18 janvier dernier, alors qu'il s'apprêtait à l'accuser, devant la Chambre des députés, d'avoir négocié avec l'Iran l'arrêt des poursuites judiciaires à l'encontre des auteurs d'un attentat meurtrier mené contre un centre israélite de Buenos Aires en 1994. Chaque jour apporte son lot de révélations gênantes pour Cristina Kirchner. Qui n'a même pas profité du répit offert au début de la semaine par sa visite d’Etat à Pékin où l'un de ses tweets moqueurs sur la façon de parler des Chinois a fait couler beaucoup d'encre. Buenos Aires n'en a pas fini avec les tensions d'autant que la question de la dette n'est toujours pas résolue et que le FMI voit l'Argentine s'enfoncer dans la récession (-1,3%) cette année.