vendredi 11 décembre 2015

LUIS FELIPE ZSCHOCHE VALLE, 33 ANS, #ENMÉMOIRE

À Santiago, Luis avait déjà monté un premier groupe prometteur, Trakto, sous influences rock US, mélanges de Nirvana et de Queens of the Stone Age. Lui chantait en espagnol. Il racontera plus tard, autour d’une bière, qu’il lui arrivait d’être payé par des patrons de bars pour faire le show sur scène en cassant des guitares à 50 balles. Le rock quoi, version agitée et bon enfant. Libre et sans retenue.

Le jour à Paris, il gagne sa vie comme transitaire dans l’import-export. Le soir, il joue avec le groupe qu’il a formé en 2012, Captain Americano, auteur d’un EP six titres, denses et très relevés, dès l’année suivante. « Il y a peu de salles à Paris qui acceptaient les groupes comme nous. “Trop fort”, nous disait-on, nous forçant à chercher des salles en province, dans les festivals », se souviennent en chœur les trois autres membres du groupe : Nico, Erwan et Julien. Lui, contrairement à eux, ne mettait jamais de boules Quies.

« Il savait tellement bien écouter, glisse Erwan, il était tellement bon, naturellement doué qu’il en devenait intimidant. » Julien : « Et pourtant, c’est lui qui paraissait timide au premier abord. »

Les billets pour le concert du Bataclan avaient été un cadeau d’anniversaire que Cécile et Luis s’étaient offert. Les trois compères de Captain Americano sont restés dehors, un peu plus loin, sur une terrasse de café en attendant d’éventuels tickets revendus à moindre prix. Ces places ne viendront jamais. Tout comme Luis et Cécile. « On est inconsolable, souffle Julien, mais on se dit qu’il était avec elle, une bière à la main, devant un concert de rock, tous les éléments réunis pour être bien. »

En mai, Luis et ses trois compères avaient enregistré en studio quatorze morceaux. Le groupe s’apprêtait à mixer l’ensemble. « On va faire ce disque, on va le faire comme Luis l’entendait, mais il nous faut un peu plus de temps », répète aujourd’hui Nico. Peut-être demain.