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EMBASTILLÉ SANS PREUVE, LUIZ INACIO LULA DA SILVA, ICI À SAO BERNARDO DO CAMPO AU BRÉSIL, LE 7 AVRIL 2018 PHOTO ANDRE PENNER |
Emprisonné sans preuve, l’ancien président du Brésil a été de nouveau condamné, mercredi, à une peine de prison. Au même moment, la campagne internationale pour qu’il obtienne le prix Nobel de la paix gagne du terrain.
UNE JUSTICE TRÈS POLITIQUE DESIN ENEKO DE LAS HERAS LEIZAOLA |
D’après la femme de loi, Lula aurait bénéficié de pots-de-vin des entreprises de BTP OAS et Odebrecht afin d’effectuer des travaux de rénovation dans une propriété à Atibaia, ville située dans l’État de Sao Paulo (sud du Brésil) pour un montant de près de 298 000 euros (1,26 million de réis). En échange, elles auraient bénéficié de contrats de la compagnie pétrolière nationale Petrobras. Reprenant à son compte la sémantique chère au ministre de la Justice, la juge Gabriela Hardt n’a pas hésité à qualifier Lula de « capitaine d’une organisation criminelle », en référence au PT. Il aurait ainsi occulté d’importantes sommes d’argent pour rénover une demeure où il a certes séjourné mais qui appartient aux entrepreneurs Fernando Bittar et Jonas Suassuna. Les avocats de Lula n’ont pas manqué de faire valoir que leur client n’avait jamais été informé de tels travaux et, surtout, qu’il n’existait aucune preuve qu’il en soit le commanditaire.
La « conviction » n’existe pas dans le droit brésilien
« Pour prouver qu’il y a un crime de corruption passive, il faut démontrer quelles ont été les largesses reçues par un fonctionnaire public et préciser quel est “l’acte officiel” qu’il aurait réalisé en échange de ces largesses. La sentence ne présente pas cette information (…). En lien avec le crime de blanchiment d’argent, la sentence n’a pas présenté l’information selon laquelle Lula n’est pas propriétaire de la maison. (…) Durant le procès, la défense a allégué du fait que Lula ne pouvait pas être le bénéficiaire de ces travaux, même s’il a fréquenté le lieu, mais la juge n’a pas considéré cet argument », pointe le journal Brasil do Fato. La cabale politico-judiciaire dont est victime Lula n’a pas de fond. Le 24 janvier 2018, alors qu’il faisait la tête en course des sondages à la présidentielle, il avait été condamné en seconde instance pour les mêmes chefs d’inculpation et à une peine aussi lourde par le juge Sergio Moro. Selon ce dernier, l’ex-métallo aurait reçu un triplex de 300 m2 dans la station balnéaire de Guaruja de l’entreprise de bâtiment OAS, en échange de l’attribution de marchés publics de Petrobras. Cet appartement n’a jamais appartenu à Lula. À l’époque des faits incriminés, il habitait une résidence on ne peut plus connue au Brésil : le palais présidentiel du Planalto. Lors du verdict, le juge Sergio Moro a littéralement reconnu qu’il ne possédait aucune preuve mais qu’il avait la « conviction » que Lula était coupable, donc condamnable. La « conviction » n’existe pas dans le droit brésilien, comme l’ont rappelé près de 3 000 juristes dans une pétition. La loi stipule par ailleurs que nul ne peut être détenu tant que des recours sont déposés, la Constitution brésilienne consacrant le principe de présomption d’innocence. Depuis le 7 avril, Lula se trouve derrière les barreaux de la prison de Curitiba (sud). « La première condamnation injuste et illégale, dans le cas du triplex, a servi à empêcher que Lula soit de nouveau président de la République. La nouvelle condamnation est elle aussi injuste et illégale (…). Elle intervient au moment où Lula est présenté pour le prix Nobel de la paix par un demi-million d’appuis. Une fois encore, le (pouvoir) judiciaire agit contre Lula pour des raisons politiques, en essayant désormais d’influencer l’opinion publique internationale », a dénoncé le Parti des travailleurs dans un communiqué. Au point que l’ancien président est considéré comme un prisonnier politique aux yeux d’une partie de la société brésilienne et de ses soutiens, dont l’ancien prix Nobel de la paix, l’Argentin Adolfo Pérez Esquivel, à l’initiative de la campagne pour que Lula soit récipiendaire de la célèbre distinction.