mercredi 20 février 2019

VÉNÉZUÉLA LA TRANSE DE DONALD TRUMP SUR LE SENTIER DE LA GUERRE


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« JE SUIS LE PRÉSIDENT DU VÉNÉZUÉLA »
«JE NE SUIS PAS UNE MARIONNETTE»
Devant les Vénézuéliens de Miami, le président des États-Unis a confirmé qu’il était prêt à actionner une « option » militaire pour « dégager » Maduro et éradiquer par la même occasion le socialisme de la région.par 
PHOTO ANDREW HARNIK
Donald Trump s’est lancé dans une danse effrénée à la manière des Indiens d’Amérique célébrant un prochain recours à la force. Il s’est fait plus martial que jamais lundi à Miami devant une foule enthousiaste de « bons » immigrés. Pas de ces exilés, on l’aura compris, qui assaillent aujourd’hui la frontière Sud des États-Unis, mais de personnes dont les parents ou-eux-mêmes ont fui le Venezuela chaviste ou Cuba communiste pour trouver refuge en Floride. À cinq jours de l’ultimatum fixé à samedi prochain pour obtenir le scalp du président Maduro en même temps que l’ouverture des frontières aux cargaisons d’aide humanitaire venues des États-Unis, il a prévenu les militaires vénézuéliens qui restent très majoritairement fidèles à l’héritier d’Hugo Chavez. « Au cas où vous continueriez de soutenir Maduro, a-t-il lancé, vous n’aurez aucun endroit où vous réfugier, pas de sortie possible. Vous perdrez tout. »

Devant un public conquis, le locataire de la Maison-Blanche a qualifié le président vénézuélien de « marionnette cubaine ». Bannissant le régime socialiste, il s’est saisi, comme d’une opportunité à ne pas manquer, des immenses difficultés rencontrées par la plus grande partie d’une population vénézuélienne inquiète et divisée, convaincue de la nécessité de changements mais pas du sabordage des acquis de la révolution bolivarienne, pour estimer que « les jours du communisme étaient comptés au Venezuela, mais aussi au Nicaragua et à Cuba ».

« UNE ÉLECTION SANS ÉLECTION »
  
Guaido semble tout attendre des initiatives de Trump
Compte tenu des pénuries de médicaments et de denrées alimentaires subies, l’aide humanitaire est devenue une arme clé de l’oncle Sam pour s’immiscer ouvertement dans les affaires intérieures vénézuéliennes. Si l’armée la laissait entrer, cela démontrerait que Maduro et le régime bolivarien ont perdu le contrôle. Cela affaiblirait leur légitimité au profit du président auto-proclamé et chef de l’opposition de droite, Juan Guaido. En même temps, le besoin d’une véritable aide se fait lancinant.

Cet enjeu n’a pas échappé aux puissances internationales hostiles aux menées impérialistes des États-Unis. La Russie, opposée comme la Chine ou la Turquie aux ingérences états-uniennes, devrait ainsi envoyer, « ce mercredi, quelque 300 tonnes d’aide humanitaire au Venezuela », s’est félicité le président Maduro.

À Miami Donald Trump a laissé entendre qu’il préférerait « une transition pacifique ». Mais, comme on le fait dans un souffle pour récupérer avant d’entonner l’élément de langage le plus important signalant sa montée en transe sur le sentier de la guerre : « Toutes les options sont sur la table », a-t-il martelé, en allusion directe à un potentiel recours à la force.

Ce forcing de Trump constitue une arme à double tranchant pour Guaido. Lui qui semble se détourner totalement d’un éventuel dialogue politique intérieur pour surmonter la crise et tout attendre ostensiblement des initiatives du bouillant locataire de la Maison-Blanche, révèle crûment le nom de la politique qu’il porte. Quand il va jusqu’à accueillir favorablement l’éventualité d’une intervention militaire des États-Unis, il apparaît en fait comme une poupée dans les mains de Washington, rejoignant une tradition bien établie de dirigeants conservateurs latino-américains dans la seconde moitié du siècle dernier.

Cuba dénonce « des mouvements de forces d’opérations spéciales des États-Unis vers les aéroports de Porto Rico, de la République dominicaine et d’autres îles des Caraïbes sans que leurs gouvernements n’en aient été informés ». Tous ces bruits de bottes génèrent une tension extrême qui alarme certaines ONG états-uniennes. Adam Isacson qui dirige un groupe de défense des droits humains basé à Washington s’inquiète : « Avec ce type de discours de traîneur de sabre, vous créez , dit-il, cité par le New York Times, toutes les conditions pour une potentielle déflagration. »

Pour sa part, le ministre cubain des Affaires étrangères, Bruno Rodriguez, a réuni lundi l’ensemble des ambassadeurs en poste sur l’île pour les appeler à empêcher l’irréparable. Il leur a demandé « au nom du gouvernement de Cuba », « d’agir en défense de la paix et pour éviter, grâce à l’effort conjoint de la communauté internationale, une agression militaire des États-Unis contre le Venezuela.»