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MARIANO RAJOY, DURANT SA DÉCLARATION COMME TÉMOIN DANS LE JUGEMENT DU CAS GÜRTEL, EN JUILLET 2017. PHOTO EFE | EPV |
Le président du gouvernement espagnol devra affronter une motion de censure après le verdict tombé jeudi 24 mai dans un vaste scandale de pots-de-vin qui éclabousse sa formation, le Parti populaire.Courrier international avec El País
« PARTI POURRI »
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Jeudi 24 mai en effet, la justice a rendu son verdict dans une gigantesque affaire de corruption, dont l’instruction avait duré sept ans et dont le procès avait commencé en octobre 2016.
L’affaire Gürtel, de son nom de code policier, se termine par des verdicts exemplaires, condamnant des chefs d’entreprise et surtout d’anciens responsables du PP : 351 ans de prison pour un total de 29 accusés.
La caisse noire du PP
Le verdict confirme l’existence d’une caisse noire au sein du PP, alimentée notamment par des surfacturations d’événements politiques et des pots-de-vin en liquide dans l’attribution de marchés publics. Et ce entre les années 1990 et le début des années 2010.
“Ce coup de massue [judiciaire] affecte la crédibilité d’un parti qui a gouverné l’Espagne entre 1996 et 2004, et depuis 2011”, écrit le quotidien El País dans son éditorial, précisant dans un autre article qu’il “s’agit du réseau de corruption le plus vaste de l’histoire de la démocratie espagnole”.
Le Parti populaire, comme personne juridique, a lui-même été condamné à une lourde amende en tant que bénéficiaire de ce “système de corruption institutionnel”, précise le verdict. Un des moments clés du procès a été la comparution, comme témoin, de Mariano Rajoy lui-même, le 26 juillet dernier. “Le président du gouvernement avait alors affirmé, rappelle El País, que ‘jamais’ son parti n’avait reçu de dons en liquide de chefs d’entreprise, et il avait répété à sept occasions qu’il ne s’était jamais occupé de questions financières dans la formation conservatrice, mais uniquement des questions politiques.”
Des preuves “confondantes”, selon le verdict
Un témoignage rejeté par la sentence : “Les juges ont estimé que les preuves sur l’existence de la caisse noire sont si ‘confondantes’ que les témoignages de Rajoy et de ses compagnons de parti ne leur ont pas paru ‘assez vraisemblables’”, poursuit El País.
Le verdict a fait l’effet d’une bombe politique, et le Parti socialiste (PSOE), principal parti d’opposition, a déposé dès vendredi 25 mai une motion de censure contre le gouvernement de Mariano Rajoy. L’éditorial d’El País est titré : “Un gouvernement zombie”, qui laisse Rajoy “sans arguments ni marge politique”.
Reste qu’une motion de censure n’est pas gagnée d’avance, selon l’arithmétique parlementaire. Si le PSOE peut compter sur l’appui du parti de gauche Unidos Podemos et de certaines petites formations, il n’est pas sûr que la motion de censure obtienne une majorité absolue.
Ciudadanos en tête des sondages
Le plus sûr serait de compter avec le parti centriste Ciudadanos (centre), qui soutient le PP mais dont les liens avec ce dernier se sont largement distendus ces derniers temps.
Dans la matinée du 25 mai, Ciudadanos, par la voix de son secrétaire général José Manuel Villegas, repris notamment par El País, a réclamé au PP “des élections anticipées dans les prochaines semaines [car] la corruption a liquidé cette législature”.
Faute de réponse, le responsable de Ciuadadanos a laissé entendre qu’il pourrait soutenir, sous conditions, la motion de censure – avec, toujours en vue, des élections anticipées. Le parti centriste joue sur du velours : le dernier sondage, publié le 14 mai par El País, le donne largement en tête avec 29 % des intentions de vote tandis que les trois autres grandes formations, Unidos Podemos, PP et PSOE, seraient au coude-à-coude, avec environ 19 % des voix.