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Samedi, militants du PCF et du Parti du travail de Belgique ont manifesté ensemble contre l’évasion fiscale, en remontant une rue belge prisée par les milliardaires français qui veulent échapper à l’impôt.
LA UNE DE L'HEBDOMADAIRE
L'HUMANITÉ DIMANCHE N° 655
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« Le groupe Auchan reçoit 80 millions d’argent public par an »
« Nous voulons faire du combat contre la fraude fiscale le combat majeur de notre action au Parlement européen », prévient Ian Brossat. La tête de liste PCF pour le 26 mai rappelle que, chaque année, 1 000 milliards d’euros partent en fumée en Europe à cause de ce fléau. « Et derrière, on nous explique que c’est sur nos services publics, nos hôpitaux et nos écoles qu’il faut rogner. C’est insupportable », dénonce-t-il. « Pour eux, c’est 3 % de déficit. Pour nous, c’est 0 % de fraude fiscale ! », assène également Fabien Roussel, en réponse à ceux qui attaquent la dépense publique plutôt que la fraude. Et de dérouler des propositions : prélever les multinationales à la source et « fermer les frontières aux évadés fiscaux », travailler à une harmonisation fiscale européenne ou encore renforcer la liste noire des paradis fiscaux.
Qu’en pensent les Belges du PTB ? « Tout pareil ! Nous voulons aussi un impôt sur la fortune européen, et un sur la fortune belge. On en a assez d’être un paradis fiscal », s’enthousiasme Marc Botenga, tête de liste du PTB pour les européennes. « Je te rappelle que tu parles à des Français. Ils ne peuvent pas voter pour toi ! », le chambre Raoul Hedebouw. Très vite, le guide Marco Van Hees rebondit sur la notion de «paradis fiscal ». « C’est plutôt l’enfer fiscal ici. D’un côté, les salariés belges viennent en France car on y est moins imposé sur le travail qu’en Belgique. De l’autre, les riches français viennent en Belgique, car on y est moins imposé sur le capital qu’en France… » Mais place à la balade, aux blagues et à la musique, car il faut « militer heureux », apprécie Fabien Roussel.
Où sont les milliardaires ? Ici, partout ! Au 32, Gilles Mulliez. Au 80, Jean. Au 88, Marie. Au 90, Patrick. Au 144, Guy. Et il y en a plein d’autres à Néchin, encore plus autour de Tournai, et davantage dans toute la Belgique. De porte en porte, les manifestants crient : « Mulliez paie tes impôts ! » À chaque étape, Marco rappelle l’activité, le patrimoine et le niveau d’imposition. Patrick, détenteur de Kiabi et de la société Seppci, qui pour 382 millions de bénéfices n’a payé que 2 euros d’impôt il y a peu. Devant la maison d’un de ses cousins, qui ne paie que 0,1 % d’impôt, Marie-Hélène Bourlard met un faux billet de 500 euros dans la boîte aux lettres. « Il faut l’aider le pauvre ! », lance avec malice la numéro 2 de la liste PCF. Plus loin, Marco se fait magnanime : « Ici, nous en avons un dont la société paie 2,2 % d’impôts. Pour un Mulliez, c’est déjà lourd. Ne le blâmons pas trop. » Le tour s’achève devant une maison achetée par Gérard Depardieu – il y est inscrit « Douane » – qui fait l’angle avec la rue de Gibraltar, célèbre paradis fiscal. Ça ne s’invente pas. Tout comme le cas d’Edgard Bonte, membre de la famille Mulliez, qui habite Néchin. À la tête d’Auchan, il veut supprimer 720 emplois et des magasins « alors que le groupe reçoit 80 millions d’argent public par an », s’indigne Fabien Roussel. Quand on s’exile pour cause d’impôt et qu’on licencie, en Macronie, ça n’empêche pas de toucher le Cice.