dimanche 5 août 2018

LE CHILI DEVIENT LE PREMIER PAYS D’AMÉRIQUE DU SUD À INTERDIRE LES SACS PLASTIQUE

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UNE MOUETTE TENTE DE S'ENVOLER ALORS QU'ELLE A UN SAC
PLASTIQUE SUR LA TÊTE, LE 17 JUILLET 2018 SUR LA PLAGE
DE CALETA PORTALES, À VALPARAISO
PHOTO  CLAUDIO REYES 
Cette mesure, en vigueur depuis vendredi 3 août, est une petite révolution culturelle dans ce pays où seulement 4 % de la population recycle ses déchets et où sont consommés environ 3,4 milliards de sacs plastiques par an.
UN CHARIOT EN LIBRE SERVICE REMPLI DE SACS PLASTIQUE
DANS UN CENTRE COMMERCIAL DE SANTIAGO,
LA CAPITALE DU CHILI, LE 18 JUILLET 2018.
PHOTO CLAUDIO REYES / AFP
Le Chili est devenu le premier pays d’Amérique du Sud à interdire les sacs plastique, rejoignant la soixantaine de nations qui ont pris des mesures pour réduire la pollution provoquée par les 10 millions d’emballages de ce type consommés chaque minute dans le monde. « Je voulais partager ma joie avec vous : à compter d’aujourd’hui, nous promulguons la loi », a déclaré vendredi 3 août le président de droite, Sebastian Piñera, lors d’une cérémonie à Santiago, la capitale, avant de donner des sacs en toile au public.

Le texte interdit la distribution de sacs en plastique, sauf ceux servant à emballer des aliments « pour des raisons hygiéniques ou (…) pour éviter le gâchis de nourriture », selon le Journal officiel.

« Au large, il y a des îles de plastique de la taille du Mexique »

La loi donne six mois à compter de vendredi aux grandes entreprises et deux ans aux petits commerces pour mettre en application cette interdiction totale. Une fois ces délais écoulés, une amende de 370 dollars par sac plastique remis aux clients est prévue en cas d’infraction. Dans l’intervalle, « les commerces peuvent remettre un maximum de deux sacs plastique aux consommateurs à chaque achat », précise le texte.

« Nous sommes très heureux de faire un pas dans la bonne direction. Ce que nous proposons est simple : nous voulons changer le mode de vie des Chiliens. Nous voulons passer de la culture du jetable à celle du durable », a ajouté le chef de l’Etat. « Je me tire moi-même les oreilles, nous devons tous participer à la protection de l’environnement », déclare Marcos Santibañez, client d’un supermarché de la capitale, devant son chariot rempli de sacs pleins de produits.

UN GOÉLAND RAMASSE UN SAC EN PLASTIQUE SUR 
LA PLAGE DE CALETA PORTALES, À VALPARAISO, 
AU CHILI, LE 17 JUILLET 2018.
PHOTO CLAUDIO REYES / AFP

Au Chili, où seulement 4 % des 17,5 millions d’habitants recyclent leurs déchets, se passer de sacs plastique est une véritable révolution culturelle. On estime que les Chiliens utilisent 3,4 milliards de sacs par an, dont au moins 90 % finissent dans des décharges. Ou dans la mer. Pendant l’hiver austral, le littoral chilien, qui s’étend sur plus de 4 000 km, n’est fréquenté par personne, mais jonché de déchets. Ou peut les voir le long des plages du centre du pays. Dans les eaux gelées du Pacifique, les sacs plastiques s’accumulent, en profondeur et en surface, formant d’immenses îles.

« Près des côtes, entre le Chili et le Pérou, il y a des îles de plastique de la taille du Mexique, soit près de 2 millions de kilomètres carrés, rappelle Marcela Cubillos, ministre de l’environnement. Non seulement la quantité est problématique, mais surtout la durée, puisque [les sacs] peuvent rester dans la nature jusqu’à quatre cents ans sans se dégrader. Alors que leur utilité dans la vie quotidienne ne dépasse pas trente minutes. »

En 2016, un programme de nettoyage lancé par le gouvernement, avait permis de ramasser 93 tonnes d’ordures sur 218 kilomètres de plages. Quatre-vingt-dix pour cent de ces résidus étaient du plastique.

De nombreux pays interdisent ou limitent son utilisation

Le Chili rejoint ainsi la soixantaine de pays qui ont pris des mesures pour réduire leur consommation de sacs à usage unique. Lors de la Journée mondiale de l’environnement, le 5 juin, dix pays d’Amérique du Sud et des Caraïbes ont annoncé des initiatives pour limiter leur utilisation.

C’est la petite île des Caraïbes d’Antigua-et-Barbuda qui, dès 2016, avait montré l’exemple en devenant le premier pays du continent américain à interdire les sacs plastiques. La Colombie avait suivi en limitant son interdiction aux sacs de petite taille et en faisant payer pour les plus grands. En Amérique centrale, le Panama a adopté au début de 2018 une loi interdisant les sacs plastique.

En Europe, à la fin de mai, la Commission européenne est allée plus loin en proposant l’interdiction des cotons-tiges, couverts, assiettes, pailles, mélangeurs de cocktails et tiges de ballons en plastique, qui devront à la place être fabriqués en matériaux plus durables. En France, les sacs plastique à usage unique sont interdits en caisse depuis juillet 2016 et les sacs fins non compostables, hors caisse (comme les sacs de fruits et légumes), depuis janvier 2017.

Les chiffres donnent le tournis : on estime qu’environ 5 000 milliards de sacs en plastique sont consommés dans le monde chaque année, soit presque 10 millions par minute, selon le rapport publié par l’Organisation des Nations unies au début de juin qui évoque un défi d’une ampleur « décourageante ». « S’ils étaient attachés ensemble, ils pourraient entourer la planète sept fois toutes les heures », explique le rapport.